Читайте только на ЛитРес

Книгу нельзя скачать файлом, но можно читать в нашем приложении или онлайн на сайте.

Читать книгу: «Souvenirs d'égotisme», страница 16

Шрифт:

LVI
Au Même

Rome, 31 décembre 1816.

Monti raisonnait un jour sur la philosophie de la poésie devant le célèbre Lord Byron et M. Hobhouse, l’historien. Il m’adressait la parole et débitait toutes les vieilles théories: qu’il valait mieux que le poète peignît Minerve qui arrête le bras d’Achille, que de montrer les anxiétés d’un héros emporté tantôt par la colère, tantôt par la prudence. M. Hobhouse s’écria tout à coup: He knows not how he is a poet!253.

Il en était tout honteux, et me fit répéter plusieurs fois l’assurance que Monti n’entendait pas l’anglais. Je vois que cette remarque s’applique à Canova. Cet homme, qui, avec le ciseau, donne des sentiments si sublimes, avec la parole n’est qu’un Italien vulgaire. Voilà ce qui, pour la première fois, je te le jure, m’a donné un peu de vanité. Les gens qui expliquent les règles, et surtout qui les font sentir, sont donc bons à quelque chose.

Accuse-moi la réception d’une feuille ridicule, si on la trouvait, intitulée: Raisons pour ne pas faire les 3e, 4e, etc., volumes de l’H.254.

Tu as dû recevoir, de Turin, un blanc-seing avec un projet de lettre. Je persiste, excepté pour le mot: Ballon d’essai qui me semble ridicule. Corrige et fais transcrire moyennant trois sous la feuille. Je tiens assez à la signature dissemblable pour ne pas incendier le rendez-vous sous les grands marronniers où l’on entend de si douce musique. Cependant on en recevra une seconde où il n’y a d’altéré que le mot Londres.

Mais, maudit bavard, envoie-moi donc les omissions de Michel-Ange!

J’ai lu le livre de M. Jules Onuphro Lani (de Nice), Edimbourg 1817. Cela me paraît le plus prudent. Le livre de Mme de Staël couvrira l’autre. Mets Dominique à même de solliciter la dispense. Ne peux-tu pas te placer à l’Ecole des Mines?

Dis-moi au moins l’effet que Michel-Ange a produit sur toi. Sans note, je crains que, cela ne soit trop pour les Fair islands255.

LVII
Au Même

Rome, 6 janvier 1817.

J’espère, mon cher Louis, que tu es le plus content des Dauphinois depuis le 26 décembre. Félix me le fait entendre. Cette idée-là me rendrait tout content sans la mort de ce pauvre Périer256.

Ce matin, en revenant de la villa Albani, où j’avais été tourmenté par le soleil que j’avais fui sous une allée sombre de chênes verts, j’ai appris la triste nouvelle.

J’avais reçu 2,100 fr., ce qui, avec 240 que j’ai encore, me permettrait de rester six mois à Rome ou à Naples. L’amitié que j’ai pour Pauline me rappelle à Cularo257. Je pars. Quand? Je ne suis pas encore résolu.

Si j’avais quelque espoir raisonnable de t’embrasser, je t’assure que je me hâterais, mais tu seras parti.

Il m’arrive un accident étrange, mais j’avais juré de ne rien prendre au tragique, ne songeant pas qu’une véritable tragédie me tomberait sur la tête. Mes deux malles mises au roulage à Florence le 12 et qui devaient être ici le 18 décembre, ne sont pas encore arrivées le 6 janvier. Dans ces malles est tout le style de Michel-Ange.

Que faire? J’ai fait le plafond de la Sixtine; sans faute le premier convoi te l’apportera écrit par moi, bien large. Il suffira de le coudre en son lieu dans le volume vert.

Il n’y a rien à dire à la chapelle Pauline, attendu que la fumée des cierges a fait justice de la chute de saint Paul et du saint Pierre.

Reste uniquement la lacune du Jugement dernier. Si cela est plus commode au bossu qu’il laisse huit pages ou une demi-feuille en blanc et qu’il finisse son ouvrage en mettant après Michel-Ange, le cours de cinquante heures258, plus une table.

Quarante-huit heures après avoir reçu mes malles je t’expédie un jugement terrible. Je suis plein du physique de la chose; il me manque tous les petits détails critiques et techniques que j’ai renvoyés là, pour les faire passer à l’aide d’un morceau célèbre. Je t’enverrai cela en toute hâte. T’envoyer un jugement sans détails techniques, les amateurs maniérés ne manqueraient pas de dire plus haut encore: «C’est un monsieur qui fait fort bien la philosophie, la politique, et même un peu de peinture.»

Les amateurs que j’ai vus ici enterrés dans la technique me montrent à la fois et le comment de la médiocrité actuelle et les critiques que l’on fera du pamphlet de Dominique.

Parle-moi un peu de toi. Les Zii se conduisent bien, c’est là l’essentiel.

Ma sœur est plus accablée que je ne l’aurais cru. Elle me dit pas même s’il y a testament. Périer en avait fait un qui donnait tout à ma sœur, sous la condition de payer 90,000 fr. aux neveux. Cela lui ferait 120,000 ou 100,000 francs en un domaine, à deux lieues de La Tour-du-Pin, dans des bois pittoresques. Avec ces 4,000 fr. de rente et les 4 ou 5,000 de Dominique, ils pourraient vivoter ensemble dans quelque coin. Ce coin sera-t-il à Paris ou à Milan?

Adieu, il y a de beaux yeux qu’il vaut mieux regarder que mes pattes de mouche. Que ces beaux yeux n’étaient-ils ce matin à la villa Albani devant le Parnasse de Raphaël Mengs!

Onuphro Lani259.

LVIII
Au Même

Rome, le 13 janvier 1817.

Comme je suis né malheureux, le ciel, qui veut que je passe pour le contraire d’un homme d’ordre à tes yeux, a retardé jusqu’au 12 janvier l’arrivée des matériaux du Jugement dernier. Je t’envoie la Sixtine copiée d’après nature. Couds-moi cela en son lieu et place avec une aiguille préparée par une belle main. Je la supplie de me rendre ce service. Elle sera ainsi la marraine de l’ouvrage. Plût à Dieu que l’enfant eût la fraîcheur de la marraine!

Reste le Moïse et le Jugement. Ce Moïse est un morceau bien dur. Je ne sais comment l’approximer de ces petits oiseaux à l’eau de rose qu’on nomme des Français aimables. Ceux que je vois ici me font désespérer et m’ôtent tout courage. Les fonctions analytiques de Lagrange seraient plus claires pour eux.

Mais parlons de ton bonheur. Dis moi quand le destin cruel te fera quitter Mens pour Plancy. C’est de là que j’attends les critiques. Elles seront un peu tardives.

Je pense que tu vas envoyer Michel au Bossu. Pour ne pas ennuyer par cent pages continues à la Bossuet, j’ai mis une couleur de prosopopée. Je ne sais si cela fait bien. J’ai mis la chambre obscure et les trois paysages pour faire sentir les styles, le portrait de mon duc d’après nature; mais ce portrait est-il assez fondu?

Je l’ignore. Mon homme va être bientôt duc. Si j’ai manqué de tact, corrige-moi. Si décidément cette couleur de prosopopée te choquait, renvoie-moi les deux pages; il n’y a qu’à ôter en trois traits de plume, tout est rentré dans le style sublime. As-tu décidé pour Jules Onuphre Lani de Nice, à Edimbourg? As-tu reçu deux ou trois lettres piquées? Mais il faudrait que cet animal n’en fît usage qu’au moment de la mort. Autrement le charmant rendez-vous que j’ai avec sweet music serait incendié. Paris est un théâtre plus curieux, mais je suis si amoureux, et tu sens la force de ces termes, de ma charmante musique que je doute si Paris pourra jamais me convenir.

Ce problème va se présenter. Ce pauvre P.260 a faussé compagnie bien mal à propos. Je vais être obligé d’aller me rinfrangere en février. Je perdrai deux mois sans plaisir ni utilité. Que deviendra the good sister261? Je la laisserai religieusement libre, mais je pense qu’elle verra qu’à trente et un ans, il lui convient d’habiter avec Dominique. Leurs deux petites lampes réunies pourront jeter une honnête clarté, mais comme les déplacements sont mortels à d’aussi frêles fortunes, il s’agit de choisir pour toujours. Si à Plancy, il te vient quelque pensée là-dessus, communique-la moi. Depuis la lettre sur Dotard, you know my self as I262.

Mais revenons. J’insiste pour envoyer 5 ou 600 exemplaires respirer l’air natal à Bruxelles. Vu le bâtard263, il faut tâcher de rentrer dans nos fonds, et vaincre un peu de paresse.

Je suis passionné pour ta critique, tu me connais intus et in cute. Ne ménage rien, donne le mot le plus cruel à la plus cruelle nouvelle, comme dit notre ami Shakespeare.

R. le 21 j. 1817.

Comme je suis né malheureux, observant trop longtemps les loges de Raphaël au Vatican le 16, par un temps froid, je suis au lit depuis le 16 au soir, cum grandi dolore capitis. Cela ne retarde que de 4 ou 5 jours le Moïse et le jugement, car le médecin m’annonce la fin de la fièvre pour demain. Fais pousser le Bossu jusqu’au jugement. L’ouvrage, à son égard, sera comme fini.

Recommande au Bossu de ne faire feu qu’à propos, autrement il incendie mon rendez-vous. Appelle Jules Onuphro Lani, surtout envoie à Bruxelles 600. Je serai à Cularo pour la fin de février. Je crains que le timbre n’ait ébruité la grossesse de cette pauvre Dominique. Dieu sait quel scandale dans Landerneau, outre que l’envieux Alexandre nous a déjà vu lire le gros volume l’année dernière264.

LIX
Note pour le Libraire

(Envois de l’Histoire de la peinture en Italie)
Le 15 septembre 1817.

Nota: n’afficher et n’envoyer aux journaux que quinze jours après avoir adressé des exemplaires aux personnes nommées ci-après.

Ne pas envoyer d’exemplaires à la Quotidienne, aux Débats, au Bon Français, à la Quinzaine.

Envoyer à:

M. le duc de La Rochefoucault-Liancourt, rue Royale-Saint-Honoré, 9;

M. le duc de Choiseul-Praslin, rue Matignon, 1;

M. le comte de Tracy, rue d’Anjou-Saint-Honoré, 42;

M. le comte de Volney, pair de France, membre de l’Académie française, rue de La Rochefoucault, 11;

M. le comte Garat, rue Notre-Dame-des-Champs;

M. le lieutenant-général, comte, pair de France Dessoles, rue d’Enfer-Saint-Michel, 4;

M. le lieutenant-général Andreossy, rue de la Ville-l’Evêque, 22;

M. de Cazes, ministre;

M. le due de Broglie, pair de France, rue Lepelletier, 20. Et le duc de Broglie, de la Chambre des députés, rue Saint-Dominique, 19;

M. de Staël fils;

M. Benjamin Constant (Mercure);

Sir Francis Eggerton;

M. le duc de Brancas-Lauraguais, pair de France, rue Traversière-Saint-Honoré, 45;

M. Terier de Monciel;

Mme la comtesse de Saint-Aulaire;

M. le comte Boissy-d’Anglas, pair, rue de Choiseul, 13;

M. le comte Chaptal, membre de l’Institut, président de la Société d’encouragement, rue Saint-Dominique-Saint-Germain, 70;

M. Thénard, membre de l’Académie des Sciences, rue de Grenelle-Saint-Germain, 42;

M. Biot, membre de l’Institut, au Collège de France, place Cambrai. Absent de France;

M. le chevalier Poisson, membre de l’Institut, rue d’Enfer-Saint-Michel, 20;

M. le comte La Place, pair de France et membre de l’Institut, rue de Vaugirard, 31;

M. de Humboldt;

M. Maine-Biran, rue d’Aguesseau, 22;

M. Manuel, avocat;

M. Dupin, avocat, rue Pavée-Saint-André-des-Arcs, 18;

M. Berryer, avocat, rue Neuve-Saint-Augustin, 40;

M. Mauguin, avocat de la Cour royale, rue Sainte-Anne, 53;

M. de Jouy, de l’Institut, rue des Trois-Frères, 11;

M. Say, du Constitutionnel;

M. Villemain, chef de division à la Police;

M. le comte de Ségur, grand-maître des cérémonies, rue Duphot, 10;

M. de Lally-Tollendal, pair, membre de l’Institut, Grande-Rue-Verte, 8;

M. Laffitte, banquier, député, rue de la Chaussée-d’Antin, 11;

M. le maréchal duc d’Albuféra, rue de la Ville-l’Evêque, 18;

M. le prince d’Eckmüll, rue Saint-Dominique-Saint-Germain, 107;

M. Béranger, auteur du Recueil de chansons;

Mme Récamier;

M. Récamier (Jacques), banquier, rue Basse-du-Rempart, 48;

M. Dupuytren, chirurgien en chef, vis-à-vis la colonnade du Louvre;

M. Talma, rue de Seine-Saint-Germain, 6;

Mlle Mars, rue Neuve-du-Luxembourg, 2 bis;

M. Prud’hon, peintre d’histoire, rue de Sorbonne, 11;

M. Gœthe, ministre d’État, à Francfort-sur-le-Mein;

M. Sismonde-Sismondi, à Genève;

Sir Walter Scott, poète, à Edimbourg265.

LX
Au baron de Mareste

Milan, le 15 octobre 1817266.

Jugez du plaisir que m’a fait votre lettre, je n’ai pas encore de journaux! – Je suis ravi de la défaite des jacobins Manuel, Laffitte et consorts. Dites-moi comment on a mis le désordre parmi eux. Ensuite, je ne conçois pas la peur du bon parti. Que feraient cinq ou six bavards de plus? – La généralité de la France a nommé de gros butors, qui seront toujours du parti de notre admirable Maisonnette267. Je suis peiné à fond de ce que vous me dites de Besançon268, qui n’a pas encore son affaire. Ceci est un exemple pour Henri. Il est résolu à ne prendre de place qu’à la dernière extrémité. Or, il a encore 6,000 fr. pour six ans. Cependant voici son état de services. Je vous prie de mettre tous vos soins aux articles. – Maisonnette va croître en puissance et, en ayant le courage d’attendre cinq ou six mois, nous serons articulés, id est vendus. Ne pourrait-on pas essayer de faire passer au Constitutionnel et au Mercure, l’article de Crozet? – En attendant, faisons parler le Journal général, ou même les Lettres Champenoises. Quant aux Débats, Maisonnette pourrait se réduire à les prier de parler, même en mal. Je finis par répéter qu’en en parlant à Maisonnette tous les quinze jours, d’ici à six mois nous obtiendrons l’insertion. Quand ce serait d’ici à un an, mieux vaut tard que jamais.

Je suis bien fâché de la paresse de Crozet. Ça vous aurait fait une maison charmante; sa femme est pleine d’esprit naturel; vous y auriez présenté deux ou trois hommes de sens; c’était un excellent endroit pour être les pieds sur les chenets. Grondez-le ferme afin qu’en dépit de la grande maxime, il se repente.

Adieu, parlez de moi à Mme Chanson et à Maisonnette. Je parle de vous à Hélie, qui est tout à fait supérieur269.

LXI
Au même

Milan, le 12 septembre 1818.

Enfin, vous voilà en pied, mon cher ami, et distribuant des passeports aux voyageurs ébahis, qui viennent d’être renvoyés de commis en commis, pendant vingt minutes, et avec sept mille francs encore270. Je vous assure que cet heureux événement m’a donné une joie sincère. Est-il vrai qu’il date du 1er janvier dernier? C’est le cas de dire: chi la dura la vince. Rien de nouveau. Un ballet d’Otello archi-sublime; trois opéras de suite archi-plats. Le dernier de Solliva est le plus mauvais de tous. Nous allons en avoir un de Winter et un de Morlachi.

Ici, les Romantiques se battent ferme contre les Classiques; vous sentez bien que je suis du parti de l’Edinburgh Review. A propos, remettez à M. Joubert le nº 56, il me l’enverra par la poste. Ne pourriez-vous pas risquer la même voie pour les autres livres?

J’ai vu avec plaisir cet homme d’esprit, M. Courvoisier, recevoir le prix de son zèle désintéressé. Lyon en 1817, fait grand bruit hors la France.

Nous aurons ici Marie Stuart, ballet de Vigano. Comment s’en va votre Opera buffa? Dites à vos plats journalistes de vanter un peu les ballets de Vigano et les décorations de Milan. Nous en avons eu cent-vingt-deux de nouvelles en 1817; chacune coûte vingt-quatre sequins.

Vous n’avez pas le temps de lire; mais le samedi, chez Maisonnette, vous devez apprendre des nouvelles littéraires. Je pense qu’il peut bien paraître à Paris, six volumes par an, dignes de vous. Faites-moi connaître ce qui vous semble bon.

Voyez-vous quelquefois M. Masson et M. Busche271?

LXII
Au Même

Grenoble, le 9 avril 1818.
(Maison Bougy, place Grenette, nº 10.)

Mon aimable ami, le procès et la maladie de ma sœur me tiendront ici un long et ennuyeux mois. J’espère, comme moyen de salut, quelques lettres de vous. Je vous expliquerai la position de Milan et vous me comprendrez ensuite à demi-mot. Je vous décrirai les merveilles de nos arts. Cela faisait la seconde partie de ma réponse à votre délicieuse lettre de dix-huit pages, que je sais par cœur. Vous aurez trouvé, sans doute, trop de politique dans la mienne. Comme vos agents vous flattent, j’ai copié la manière de voir de plusieurs Anglais qui ont passé chez nous en dernier lieu. Je suis d’avis qu’il faut garder l’armée d’occupation et s’en tenir au Concordat de 1801, plus une ordonnance du Roi qui, pour dix ans, défende tous les titres, une suspension provisoire de la noblesse, comme nous avons une suspension provisoire des trois quarts de la Charte.

Vous reconnaîtrez la sottise de mon cœur; le discours de M. Laffitte, lu hier à Chambéry, m’a pénétré de douleur. Je pense qu’il exagère pour tâter du ministère. Je pense de plus, avec Jefferson, qu’il faut faire au plus vite et proclamer la banqueroute. Sans les emprunts, on n’aurait pas payé les Alliés. Ils auraient divisé la France? Où est le mal? – faut-il être absolument 83 départements, ni plus ni moins, pour être heureux? Ne gagnerions-nous pas à être Belges?

D’ailleurs, il faudrait une garnison de vingt mille hommes par département, pour garder, au bout de cinq ans, la France démembrée. Si l’on avait déclaré que les dettes contractées sous un roi, ne sont pas obligatoires pour son successeur, voyez Pitt impossible et l’Angleterre heureuse.

Comme votre aimable ami (Maisonnette), poursuivi par la politique, jusque dans sa tasse de chocolat, doit-être non moins poursuivi par les flatteurs, communiquez-lui ces idées américaines.

M. Gaillard, consul à Milan, fut invoqué dernièrement par quelques Français qui, à la Police avaient des difficultés pour un visa oublié sur leurs passeports: il répondit en refusant d’intervenir. Je suis Consul du Roi et non «des Français.» – Le comte Strassoldo, indigné du propos, fit lever la difficulté. Vous maintenez de tels agents et vous renvoyez l’armée d’occupation.

Je trouve ici un préfet un peu méprisé, pour n’avoir pas répondu, en Français, aux provocations entendues par ses oreilles au Cours de la Graille272, devant cinq cents témoins. Je suppose qu’il avait ses ordres. D’après mes idées, chez un peuple étiolé par deux cents ans de Louis XIV, il est utile d’avoir des autorités personnellement méprisées. Cependant, je vous engage à renvoyer M. de Pina.

J’envoie à l’aimable Maisonnette les tragédies de Monti; c’est le Racine de l’Italie, du génie dans l’expression. La tragédie des Gracques273 peut être une nourriture fortifiante pour un poète classique. Mais le classicisme de notre ami ne cède-t-il pas à la connaissance des hommes, qui s’achète quai Malaquais274? Se tue-t-il toujours de travail?

Si le couvert du ministre n’est pas indiscret, je vous enverrai, pour vous, deux petits volumes, bien imprimés, contenant plusieurs poèmes de Monti. Comme cette digne girouette n’a changé de parti que quatre fois seulement, ses poèmes sont rares275.

LXIII
Au Même

Paris, le 4 mai 1818.

Cher tyran, enfin, hier soir, en rentrant, jé havé trouvé une letter du duc de Stendhal: elle est tellement excellente que je crois devoir vous faire bien vite cadeau d’une copie d’icelle.

(Schmit).

Copie:

Grenoble, le 1er mai 1818.

Mon aimable compagnon, que votre longue lettre m’a fait de plaisir! Elle m’a attendu vingt-quatre heures, parce que j’étais dans nos montagnes, la seule chose qui puisse rompre l’ennui dans ce pays d’égoïsme plat.

C’est aussi bien plat l’avantage en question. O ciel! faut-il qu’un Moscovite s’avilisse à ce point! Mais comme Besançon dit que l’on perd la moitié de son bon sens dès qu’on est seulement à quarante lieues de Paris, je prends le parti de faire comme lui dans cette circonstance; s’il en veut, j’en prends, et demain je vous envoie l’extrait de baptême. En me prévenant quinze jours d’avance, ce qui me vaudra une autre lettre de vous, je ferai compter les 200 francs à Paris.

Parlez-vous sérieusement? Le vicomte276 en queue de morue! Le vicomte dîner aux Frères provençaux! C’est trop fort, c’est incroyable! Je le voyais au troisième degré du marasme moral. Il m’écrivait autrefois des lettres délicieuses et, depuis un an, il n’est rien sorti. Portez-en mes plaintes à la vicomtesse.

Je vous approuve de tout mon cœur, dans votre dos à dos silencieux avec quelque pour cent. Il faut apprendre à ces coquines-là qu’elles ne sont bonnes que quand on les désire. Et Mina? Dites à Besançon que je compte partir d’ici le 10 mai, au plus tard: qu’il me dépêche encore une secousse électrique avant mon départ.

Ne plaisantez pas mon tyran Milaniste, songez qu’il n’y a point eu de réaction. Depuis la chute des brigands, en tout 23 arrestations; pesez cela. Je finis parce que je m’ennuie tant dans ce pays que je suis éteint.

Quand vous écrirez à Dessurne277, demandez-lui comment vont les ventes. On lui a envoyé trois marchandises, savoir: Vie de Haydn, l’Histoire de la peinture, Voyages de Stendhal278. Le nº 57 de l’Edinburg-Review, parlant de ce dernier, on a dû en vendre. Savez-vous que Besançon vous remettra 300 francs avec prière de les faire passer Fleet street, 203, pour acheter une Edinburg Review de rencontre, plus 2 volumes de table, Paternoster row, chez Longmans.

Adieu, mon cher secrétaire d’ambassade. Je vous somme de me donner des nouvelles. Alors quel est le moins plat des Annales ou du Journal général? Je suis chargé d’abonner mes amis à quelque chose qui ne soit pas les Débats. – Je ne suis pas taillé en solliciteur; j’ai la jambe trop grosse.

Yours, Tavistock279.
253.Il ne sait pas comment il est poète!
254.Voir plus haut, p. 231.
255.Lettre inédite. – (Bibliothèque de Grenoble).
256.Le mari de sa sœur Pauline.
257.Grenoble.
258.Epilogue de l’Histoire de la Peinture.
259.Monsieur Louis Crozet, ingénieur du corps royal des ponts et chaussées, chez M. Payan l’aîné, à Mens (Isère). Lettre inédite. – (Bibliothèque de Grenoble).
260.Périer.
261.La bonne sœur (Pauline).
262.Tu me connais comme je me connais moi-même.
263.Le père de Beyle.
264.Lettre inédite. – (Bibliothèque de Grenoble).
265.Document inédit. – (Bibliothèque de Grenoble.)
266.Il existe une autre lettre du 15 octobre 1817, datée de Thuélin, tome 1er de la correspondance, page 43.
267.Lingay.
268.Mareste, lui-même.
269.Lettre inédite (Collection de M. Auguste Cordier), copie de la main de R. Colomb.
270.Mareste avait un poste à la Préfecture de police.
271.Lettre inédite (Collection de M. Aug. Cordier). – Copie de la main de R. Colomb.
272.Quai de Grenoble.
273.La tragédie de Caio Gracco, composée postérieurement à 1800, lorsque Monti avait le titre d’historiographe du royaume d’Italie.
274.Sous M. le duc Decazes, le ministère de la police était dans un hôtel du quai Malaquais.
275.Lettre inédite (Collection de M. Auguste Cordier). – Copie de la main de R. Colomb.
276.M. Louis de Barral.
277.L’éditeur Delaunay.
278.Rome, Naples et Florence.
279.Lettre inédite. – (Collection de M. Auguste Cordier). – Copie de la main de R. Colomb.
Возрастное ограничение:
12+
Дата выхода на Литрес:
28 октября 2017
Объем:
310 стр. 1 иллюстрация
Правообладатель:
Public Domain

С этой книгой читают