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Читать книгу: «Le tour de la France par deux enfants», страница 21

Bruno G.
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CVI. – Un grand homme auquel le Nord doit une partie de sa prospérité: Philippe de Girard. – La machine à filer le lin

Un seul homme, par son génie et sa persévérance, peut faire changer de face toute une contrée

En l'année 1775, un petit enfant nommé Philippe de Girard venait au monde dans un village du département de Vaucluse.

– Le département de Vaucluse, se dit Julien, chef-lieu Avignon; j'ai passé par là en allant à Marseille, je me le rappelle très bien.

Dès que le petit Philippe sut lire, il employa toutes ses journées à étudier, à feuilleter des livres savants.

A l'heure des récréations, Philippe allait jouer dans le jardin paternel, mais ses jeux étaient de nouveaux travaux. Il construisait de petits moulins que faisait tourner le ruisseau du jardin: il fabriquait de toutes pièces ou dessinait sur le papier des machines de diverses sortes.

A l'âge de quatorze ans, Philippe de Girard avait déjà inventé une machine pour utiliser la grande force des vagues de la mer.

Il n'avait pas seize ans lorsqu'un malheur frappa sa famille: son père et sa mère furent forcés de quitter la France pendant la Révolution, et ils perdirent tout ce qu'ils possédaient.

Errant dans des pays étrangers, réduits à la pauvreté la plus grande, les parents de Philippe de Girard seraient peut-être morts de misère sans le courage de leur jeune fils.

Philippe met tout son génie au service de son amour filial; c'est lui qui gagne le pain de son père et de sa mère, il est leur secours, leur consolation, leur honneur. Il travaille sans repos, et c'est pour eux qu'il travaille.

En 1810, Philippe et sa famille étaient réunis à table pour déjeuner. En ce moment, un journal arriva. Son père l'ouvrit, y jeta les yeux, puis le passant à son fils: «Tiens, Philippe, voilà qui te regarde.»

Et le jeune homme lut dans le journal ce décret de Napoléon Ier:

«Il sera accordé un prix d'un million de francs à l'inventeur (de quelque nation qu'il puisse être) de la meilleure machine à filer le lin.»

– Un million! s'écria Philippe. Oh! si je pouvais le gagner et vous rendre votre fortune d'autrefois!..

Après le dîner, Philippe va se promener dans le jardin sous les grands arbres, réfléchissant, cherchant comment faire. Il se procure du lin, du fil, une loupe (une loupe est une sorte de verre qui grossit les objets pour les yeux); puis il s'enferme dans sa chambre, et, tenant d'une main le lin, de l'autre le fil, il se dit: «Avec ceci, il faut que je fasse cela.»

Il passa la journée et la nuit à réfléchir, imaginant et construisant dans sa tête des machines de toute sorte.

Le lendemain, quand il revint à la même heure pour le déjeuner en famille, il dit à son père:

– Le million est à nous, la machine est trouvée!

L'idée principale de la machine était trouvée en effet, mais, pour l'exécuter, Philippe de Girard rencontra les plus grandes difficultés. Il dépensa le peu d'argent qu'il avait; enfin, après plusieurs années, au moment où la machine était enfin parfaite et où Philippe allait recevoir son prix, Napoléon tomba. Le gouvernement qui lui succéda refusa de payer le million promis.

Alors Philippe ruiné s'exila. Il alla fonder en Pologne une manufacture de lin qui prit une grande importance et fut même le centre d'une nouvelle ville. Cette ville porte le nom de Girard et elle est désignée sur les cartes actuelles par le nom de Girardoff.

Ainsi, grâce à un travail assidu, Girard finit par obtenir et par donner aux siens la richesse qu'il avait failli déjà trouver. Néanmoins, jusqu'à la fin de sa vie il ne cessa de travailler et d'inventer sans relâche; c'est par vingtaines que se comptent les machines que l'industrie lui doit.

Mais sa plus belle œuvre, ce fut cette machine à filer le lin qui devait être une des richesses de sa patrie. Elle se répandit partout rapidement, surtout dans le Nord. C'est une simple machine qui a fait la fortune et la grandeur de plusieurs villes du Nord, principalement de Lille, centre de l'industrie du lin. Aussi la ville de Lille s'est-elle toujours montrée reconnaissante envers Philippe de Girard.

L'État fait aujourd'hui une pension à sa nièce et à sa petite-nièce.

CVII. – L'Artois et la Picardie. – Le siège de Calais

Le courage rend égaux les riches et les pauvres, les grands et les petits, dans la défense de la patrie

Julien, tournant la page de son livre, continua sa lecture:

L'Artois et la Picardie sont, comme la Flandre, des pays de plaines très fertiles qui produisent en abondance le blé, le colza et le lin. Ces trois provinces industrieuses, placées en face de l'Angleterre, font aussi un grand commerce maritime. Par les ports de Boulogne et de Calais passent chaque année, par centaines de mille, les personnes qui se rendent d'Angleterre en France ou de France en Angleterre.

Il y a cinq cents ans, le roi d'Angleterre, Édouard III, avait envahi la France et assiégé Calais. Les habitants, pendant une année entière, soutinrent vaillamment le siège; mais les vivres vinrent à manquer, la famine était affreuse, il fallut se rendre.

Le brave gouverneur de la ville, Jean de Vienne, fit dire au roi d'Angleterre que Calais se rendait et que tous ses habitants demandaient à quitter la ville.

Le roi répondit qu'il ne les laisserait pas sortir, mais ferait tuer les plus pauvres et accorderait la vie aux riches au prix d'une forte rançon.

Voici la belle réponse que lui fit alors Jean de Vienne.

– Seigneur roi, nous avons tous combattu aussi loyalement les uns que les autres, nous avons tous subi ensemble bien des misères, mais nous en subirons de plus grandes encore plutôt que de souffrir que le plus petit de la ville soit traité autrement que le plus grand d'entre nous.

Le roi furieux répondit qu'en ce cas il les ferait tous pendre.

Les chevaliers anglais réussirent pourtant à le calmer un peu, et il se contenta d'exiger que Calais lui livrât six bourgeois, parmi les notables, pour être mis à mort.

Le gouverneur de la ville vint alors au marché pour annoncer la triste nouvelle. Il fit sonner la cloche. Au son du la cloche, hommes et femmes se réunirent pour l'entendre.

Grande fut la consternation en apprenant l'arrêt du roi d'Angleterre. Tous se regardaient les uns les autres, se demandant quelles seraient parmi eux les six malheureuses victimes. Tout d'un coup le plus riche bourgeois de la ville, Eustache de Saint-Pierre, se leva; il s'avança vers le gouverneur et, d'une voix ferme, il se proposa le premier pour mourir.

Aussitôt trois autres bourgeois imitent son noble exemple et, quand il ne reste plus que deux victimes à choisir, tant d'habitants se proposent pour mourir et sauver leurs concitoyens, que le gouverneur de la ville est obligé de tirer au sort.

Ensuite les six bourgeois partirent au camp anglais, en chemise, pieds nus, la corde au cou, portant les clefs de la ville. Ils s'agenouillèrent devant le roi en lui tendant les clefs.

Il n'y eut alors, parmi les Anglais, si vaillant homme qui pût s'empêcher de pleurer en voyant le dévouement des six bourgeois. Seul, le roi d'Angleterre, jetant sur eux un coup d'œil de haine, commanda que l'on coupât aussitôt leurs têtes. Tous les barons et chevaliers anglais versaient des larmes et demandaient de faire grâce, mais Édouard, grinçant des dents, s'écria:

– Qu'on fasse venir le coupe-tête.

Au même moment, la reine d'Angleterre arriva. Elle se jeta à deux genoux aux pieds du roi, son époux:

– Grâce, grâce! dit-elle; et elle pleurait à tel point qu'elle ne pouvait se soutenir. Ah! gentil sire, je ne vous ai jamais rien demandé; aujourd'hui je vous le demande, pour l'amour de moi, ayez pitié de ces six hommes!

Le roi garda le silence durant quelques moments, regardant sa femme agenouillée devant lui: – Ah! madame, dit-il, j'aimerais mieux que vous fussiez ailleurs qu'ici.

Enfin il s'attendrit et il accorda la grâce des six héros de Calais.

CVIII. – La couverture de laine pour la mère Étienne. – Reims et les lainages

Se souvenir toujours d'un bienfait, c'est montrer qu'on en était vraiment digne

– Mon oncle, dit un jour André à l'oncle Frantz, il y a une chose qui me préoccupe; lorsque nous avons quitté la Lorraine, le père et la mère Étienne nous ont aidés comme si nous étions leurs enfants, et la bonne mère Étienne, sans rien me dire, a glissé dans ma bourse deux pièces de cinq francs que j'y ai trouvées à Épinal. Cependant ils sont très gênés, car ils ont perdu toutes leurs économies pendant la guerre, et moi, malgré nos peines, j'ai néanmoins en ce moment deux fois plus d'argent qu'en quittant Phalsbourg. Je voudrais bien leur rendre ces deux pièces de cinq francs et leur en montrer ma reconnaissance.

– Je t'approuve, André, dit l'oncle Frantz: il faut toujours, dès qu'on le peut, rendre ce qu'on a reçu et répondre à un bon procédé par un autre. Nous passerons chez la mère Étienne avant d'arriver à Phalsbourg, et nous lui offrirons quelque chose.

– Mon oncle, dit Julien qui avait écouté avec attention, je me rappelle que Mme Étienne nous avait mis la nuit sur notre lit des habits pour nous couvrir, car, disait-elle, elle n'avait plus une seule couverture de laine depuis la guerre.

– En effet, dit André, et malgré cela elle n'a pas hésité à nous donner ses petites économies! Bonne mère Étienne!

– Eh bien, mes enfants, dit l'oncle Frantz, nous arriverons bientôt à Reims, profitons-en pour acheter une chaude couverture que nous offrirons à la mère Étienne. Reims est la ville des lainages par excellence, et notre bateau va y rester assez de temps pour que nous y puissions faire notre achat.

L'oncle Frantz et les deux enfants parcoururent la belle ville de Reims, la plus peuplée du département de la Marne. Ils visitèrent la superbe cathédrale, et Julien, se rappelant les récits de la mère Gertrude, dit à son oncle que Jeanne Darc avait fait autrefois dans cette cathédrale sacrer le roi Charles VII.

C'était un jour de marché, et partout s'étalaient les produits de la Champagne, qui consistent surtout en lainages, en fers, en vins célèbres.

– Les lainages, dit l'oncle Frantz, sont la plus ancienne des industries françaises et une de celles où la France l'emporte sur ses rivales. On carde et on peigne les laines, puis on les tisse, et les tissus de Reims, ainsi que les draps de Sedan, sont justement renommés.

Tout en causant ainsi, on choisit une bonne couverture, chaude et grande, et on se réjouit par avance du plaisir qu'on aurait à l'offrir à la mère Étienne.

On reprit ensuite le chemin du bateau et on recommença à travailler en songeant qu'on arriverait bientôt en Lorraine.

Julien s'empressa de se remettre lui aussi au travail; il fit une belle page d'écriture, des problèmes que l'oncle Frantz lui avait donnés à résoudre et qui roulaient sur l'achat et la vente des lainages. Puis il prit son livre d'histoires et lut ce qui s'y trouvait sur la Champagne.

CIX. – Les hommes célèbres de la Champagne. – Colbert et la France sous Louis XIV. – Philippe Lebon et le gaz d'éclairage. – Le fabuliste la Fontaine

Nous jouissons tous les jours, et souvent sans le savoir, de l'œuvre des grands hommes: c'est un bienfait perpétuel qu'ils laissent après eux

I. Le plus grand ministre de Louis XIV et l'un des plus grands hommes qui aient gouverné la France, ce fut Colbert, le fils d'un simple marchand de laines de Reims qui avait pour enseigne un homme vêtu d'un long vêtement de drap avec ces mots: Au long-vêtu. Colbert avait pris dans le commerce des habitudes d'ordre et d'intègre probité, qu'il apporta plus tard dans les affaires publiques. Le cardinal Mazarin dit à son lit de mort à Louis XIV: «Sire, je vous dois beaucoup, mais je crois m'acquitter en quelque sorte avec Votre Majesté en vous donnant Colbert.» Les prévisions de Mazarin ne furent pas trompées, et c'est à Colbert qu'est due pour la plus grande partie la gloire du siècle de Louis XIV.

A cette époque, une foule de gens prenaient dans le trésor public et gaspillaient l'argent de la France. Colbert, par sa fermeté et sa sévérité, réprima tous ces abus. On l'appelait «l'homme de marbre», parce qu'il ne donnait à chacun que ce qui lui était dû, sans se laisser fléchir par les menaces ou par les promesses.

«Sire, écrivait-il au roi, un repas inutile de mille écus me fait une peine incroyable; et lorsque au contraire il est question de millions d'or pour la Pologne, je vendrais tout mon bien et j'irais à pied pour y fournir, si cela était nécessaire.» Car c'était alors l'époque où les nations qui entouraient la Pologne commençaient à s'en disputer les provinces.

Colbert fit plus que de donner tout son bien pour la France: il lui donna tout son temps, toutes ses forces, toute sa vie. Il travaillait seize heures par jour, soutenu par l'idée qu'il travaillait au bonheur du peuple et à la gloire de la France.

Malheureusement, ce labeur perpétuel ruinait sa santé. En outre les courtisans le haïssaient, car il n'aimait point à leur accorder des faveurs injustes. Le roi Louis XIV finit par méconnaître ses services, et par le disgracier au moment où il allait mourir épuisé par ses travaux.

Mais Colbert laissait en mourant de grandes œuvres, et le bien qu'il avait fait à la France ne fut point perdu. Maintenant encore, dans l'état florissant où nous sommes, on pourrait retrouver la trace des efforts de Colbert. On comprend à peine comment ce grand ministre put suffire à accomplir à la fois tant de travaux et de réformes diverses.

– Mon Dieu, dit Julien en lui-même, voilà un homme qui a été bien utile à la France; et pourtant c'était le fils d'un simple marchand de draps, ce Colbert. Mais ce n'était pas un paresseux seize heures de travail par jour, comme il prenait de la peine! Allons, je vois que, pour arriver à faire bien des choses et à les bien faire, il faut travailler sans cesse.

II. Philippe Lebon naquit dans un village de la Haute-Marne. Devenu ingénieur des ponts et chaussées, il était à la campagne, chez son père, lorsqu'il fit une des plus importantes découvertes de notre siècle. Il était occupé à des expériences de physique et de chimie, et chauffait sur le feu une fiole remplie de sciure de bois: le feu s'étant communiqué à la fumée et au gaz qui s'échappaient de la fiole, ce gaz se mit à brûler d'un vif éclat. Aussitôt, Philippe Lebon conçut la pensée d'éclairer les maisons et les villes au moyen du gaz qui sort du bois ou du charbon de terre quand on les chauffe fortement. Il était tellement enthousiasmé de sa découverte, qu'il disait aux habitants de son village:

– Je retourne à Paris, et de là je puis, si vous voulez, vous chauffer et vous éclairer avec du gaz que je vous enverrai par des tuyaux.

On le traita de fou, mais son invention, loin d'être une folie, est une des plus utiles applications de la science.

Philippe Lebon eut bien de la peine pour faire accepter en France son idée, et même il n'y put réussir. C'est en Angleterre qu'on adopta d'abord sa découverte.

Au milieu de ses efforts et de ses courageux essais, Philippe Lebon rencontra une mort tragique. Il fui assassiné, en 1804, à Paris, dans les Champs-Élysées, sans qu'on ait jamais pu découvrir ni son meurtrier ni le motif de cet assassinat. Une pension fut accordée par l'État à la veuve de Philippe Lebon.

III. Outre ces inventeurs célèbres, la Champagne a produit un de nos plus grands poètes.

A Château-Thierry, dans l'Aisne, vivait au dix-septième siècle un excellent homme de mœurs fort simples, qui était chargé d'inspecter les eaux et forêts. Il passait en effet une grande partie de son temps dans les bois. Il restait tout songeur sous un arbre pendant des heures entières, oubliant souvent le moment de dîner, ne s'apercevant pas parfois de la pluie qui tombait. Il jouissait du plaisir d'être dans la campagne, il regardait et observait tous les animaux; il s'intéressait aux allées et venues de toutes les bêtes des champs, grandes ou petites. Et les animaux lui faisaient penser aux hommes; il retrouvait dans le renard la ruse, dans le loup la férocité, dans le chien la fidélité, dans le pigeon la tendresse. Il composait alors dans sa tête de petits récits dont les personnages étaient des animaux, des fables où parlaient le corbeau, le renard, la cigale et la fourmi.

Vous avez reconnu, enfants, ce grand poète dont vous apprenez les fables par cœur, la Fontaine. C'est un des écrivains qui ont immortalisé notre langue: ses fables ont fait le tour du monde; on les lit partout, on les traduit partout, on les apprend partout. Elles sont pleines d'esprit, de grâce, de naturel, et en même temps elles montrent aux hommes les défauts dont ils devraient se corriger.

CX. – Retour à la ville natale. – André et Julien obtiennent le titre de Français. – La tombe de Michel Volden

Le souvenir de ceux qui nous furent chers est dans la vie comme un encouragement à faire le bien

Après une semaine de fatigue on arriva enfin en Alsace-Lorraine. On quitta le bateau à quelques kilomètres de Phalsbourg; nos voyageurs transportèrent leurs malles et s'installèrent dans une auberge à bon marché qu'ils connaissaient.

Puis l'oncle Frantz, usant de ses droits de tuteur auprès des autorités allemandes, s'empressa de déclarer pour ses neveux et pour lui-même leur résolution de rester Français et d'habiter en France. Comme ils étaient en règle pour toutes les formalités nécessaires, acte en fut dressé sans obstacle.

Alors l'oncle Frantz et les deux enfants se sentirent tout émus d'être enfin arrivés au but qu'ils avaient poursuivi avec tant d'énergie et de persévérance. Ils songèrent à la France; ils étaient heureux de lui appartenir et d'avoir une patrie; et cependant il ne restait plus devant eux rien autre chose, ni maison, ni ville où l'on pût s'installer et vivre tranquille: désormais il faudrait travailler sans relâche pour gagner le pain quotidien jusqu'à ce qu'on eût enfin un foyer, «une maison à soi,» comme disait le petit Julien. Mais ces trois âmes courageuses ne s'en effrayaient pas: – Le devoir d'abord, disait l'oncle Frantz, le reste ensuite!

Julien et André, le cœur gros de souvenirs, suivaient avec émotion les rues de la ville natale. On passa devant la petite maison où Julien et André étaient nés, où leur mère, où leur père étaient morts. Chemin faisant on rencontrait des visages amis, de vieilles connaissances qui vous souhaitaient la bienvenue, comme maître Hetman, l'ancien patron d'André.

Après la maison paternelle, la première où se rendirent les enfants fut celle de l'instituteur qui les avait instruits, et auquel ils voulaient exprimer leur reconnaissance.

L'instituteur découvrit dans un coin de son jardin quelques fleurs en avance sur le printemps, et Julien fit un gros bouquet de ravenelles d'or et de pervenches bleues. Puis nos trois amis, dans une même pensée, se dirigèrent vers le petit cimetière de Phalsbourg.

Le soleil allait bientôt se coucher, empourprant l'horizon, lorsqu'on arriva près de la tombe de Michel Volden. On s'agenouilla devant la petite croix en fer qu'André avait lui-même forgée autrefois et placée sur la tombe de son père; puis on y déposa le bouquet de Julien.

Alors de ces trois cœurs remplis de tendresse et de regrets s'éleva intérieurement une prière.

L'oncle Frantz, immobile sur le gazon funèbre, repassait en son âme les souvenirs de sa jeunesse; il songeait aux belles années passées en compagnie de ce frère qui dormait son dernier sommeil au milieu des vieux parents, sur la terre natale devenue une terre étrangère! il lui jurait en son cœur d'être le père de ses deux orphelins.

Quant à André et à Julien, ils avaient les yeux pleins de larmes: – Père, murmuraient-ils, nous avons rempli ton vœu, nous sommes enfin les enfants de la France; bénis tes fils une dernière fois. Père, père, notre cœur est resté tout plein de tes enseignements; nous tâcherons d'être, comme tu le voulais, dignes de la patrie, et pour cela nous aimerons par dessus toute chose le bien, la justice, tout ce qui est grand, tout ce qui est généreux, tout ce qui doit faire que la patrie française ne saurait périr.

CXI. – Une lettre à l'oncle Frantz. – Un homme d'honneur. – La dette du père acquittée par le fils

Que notre nom soit sans tache, et que devant personne nous n'ayons à en rougir

Le lendemain, au moment de quitter Phalsbourg, l'oncle Frantz reçut une lettre de Bordeaux, lettre courte, simple, dix lignes seulement; mais ces dix lignes imprévues lui causèrent une telle émotion qu'il faillit se trouver mal.

«Frantz, disait la lettre, vous aviez placé toutes vos économies chez mon père, et sa ruine vous a absolument ruiné, vous aussi. Elle en a ruiné beaucoup d'autres, malheureusement, et le but le plus cher de ma vie sera de les rembourser tous. Je ne le puis que très lentement; néanmoins, comme de tous les créanciers de mon père vous êtes celui auquel il s'intéresse le plus, je veux commencer par vous le devoir que je me suis imposé d'acquitter peu à peu tous les engagements de mon père. Présentez-vous donc à la banque V. Delmore et Cie, rue de Rivoli, à Paris: il vous sera versé sur la présentation de vos titres les 6,500 francs qui vous sont dus.»

– André, Julien, s'écria l'oncle Frantz en ouvrant ses bras aux deux enfants, et en les serrant étroitement sur son cœur, remerciez Dieu avec moi et n'oubliez jamais le nom de l'homme d'honneur qui vient de m'écrire.

André lut la lettre tout haut; Julien écoutait, les yeux grands ouverts de surprise.

– Est-ce possible? s'écria-t-il. Alors, mon oncle, nous ne sommes plus pauvres, et nous pourrons, nous aussi, cultiver un petit bien comme vous le vouliez? Oh! mon Dieu, mon Dieu, quel bonheur!

Et l'enfant riait de plaisir en disant: – Nous aurons de belles vaches comme la fermière de Celles, j'apprendrai à labourer, à tailler les arbres, à soigner les bêtes, n'est-ce pas, mon oncle? Oh! que ce monsieur est brave et honnête tout de même, de rembourser ainsi les dettes de son père! Mon oncle, je prierai Dieu pour lui tous les jours de ma vie.

– Tu auras raison, Julien, dit l'oncle, car ce souvenir te rappellera constamment que l'honneur vaut toutes les fortunes du monde: un honnête homme estime plus haut que tout le reste un nom sans tache.

Возрастное ограничение:
12+
Дата выхода на Литрес:
25 июня 2017
Объем:
340 стр. 1 иллюстрация
Правообладатель:
Public Domain

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