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Читать книгу: «Le tour de la France par deux enfants», страница 15

Bruno G.
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LXXV. – L'idée du patron Jérôme. – La mer. – Les ports de Marseille. – Ce qu'André et Julien demandent à Dieu

La prière nous donne le courage et l'espoir

Pendant le dîner, André raconta leur voyage de point en point, puis il chercha son livret d'ouvrier et ses certificats pour les montrer à Jérôme.

Jérôme avait écouté le récit d'André avec une grande attention; il feuilleta de même son livret avec soin; ensuite il réfléchit assez longtemps sans rien dire. Sa femme l'observait avec confiance. De temps à autre elle clignait de l'œil en regardant André et Julien comme pour leur dire: – Soyez tranquilles, enfants, Jérôme va tout arranger.

Jérôme, en effet, sur la fin du dîner, sortit de ses réflexions silencieuses. – Je crois, dit-il, qu'il y aurait un moyen de vous tirer d'embarras, mes enfants.

– Quand je vous le disais! s'écria la femme du marin avec admiration. – En même temps, le petit Julien faisait un saut de plaisir sur sa chaise, et André poussait un soupir de soulagement.

Jérôme reprit: – Avez-vous peur de la mer?

– Oh! monsieur, dirent à la fois les deux enfants, depuis si longtemps nous désirons la voir! Nous n'avons pas pu encore aller sur le port depuis que nous sommes à Marseille, car nous sommes venus droit chez vous; mais je vous réponds que nous n'aurons pas peur de la mer.

– A la bonne heure, reprit le marin. Eh bien, mon bateau vous mènera à Cette4, un joli port du département de l'Hérault: je mets à la voile après-demain. Une fois à Cette, j'interrogerai les uns et les autres sur Volden: nous autres mariniers nous nous connaissons tous, et déjà, à mon dernier voyage, j'avais chargé un camarade qui partait vers Bordeaux par le canal du Midi de prendre des informations sur l'adresse de Volden. Nous aurons donc, je l'espère, des nouvelles de votre oncle à Cette. Aussitôt on le préviendra de votre arrivée, et je vous confierai à un marinier qui vous conduira par le canal jusqu'à Bordeaux.

– Mais, monsieur, dit le petit Julien, les bateaux, ce sera peut-être encore trop cher pour notre bourse.

– Mon petit homme, vous avez un frère courageux qui ne craint point le travail: j'ai vu cela sur ses certificats. S'il veut faire comme je lui dirai et nous aider à charger ou décharger nos marchandises, non seulement le bateau ne lui coûtera rien, mais il gagnera votre nourriture à tous les deux et quelques pièces de cinq francs le long du chemin. Il aura du mal, c'est vrai, mais ici-bas rien sans peine.

– Comment donc! s'écria André avec joie, je ne demande qu'à travailler. C'est ainsi que nous avons fait avec M. Gertal depuis Besançon jusqu'à Valence.

– Mon Dieu, fit Julien, quel malheur que je ne puisse marcher! J'aurais fait les commissions, moi aussi, comme je faisais pour M. Gertal, et même je sais vendre un peu au besoin, allez, monsieur Jérôme.

Le patron Jérôme sourit à l'enfant:

– Vous avez raison, petit Julien, répondit-il, d'aimer à vous rendre utile; faites toujours ainsi, mon enfant. Dans la famille, voyez-vous, quand tout le monde travaille, la moisson arrive et personne ne pâtit. Mais en ce moment il ne faut songer qu'au repos, afin de vous guérir au plus vite.

Pendant qu'André et Julien remerciaient Jérôme, sa femme se mit à préparer pour les enfants l'ancienne chambre où couchait leur oncle. Cette chambre n'avait pas été louée depuis le départ de Frantz Volden. Les enfants, dès le soir même, y furent installés. C'était un petit cabinet haut perché sur une colline et qui dominait les toits de la ville.

Quand André ouvrit la fenêtre, il poussa un cri de surprise: – Oh! Julien, dit-il, que c'est beau!

Et, prenant Julien dans ses bras, il le porta jusqu'à la fenêtre. – La mer, la mer! s'écria Julien.

De la fenêtre, en effet, on découvrait à perte de vue la mer, d'un bleu plus foncé encore que le ciel; on apercevait aussi les ports de Marseille et les navires innombrables dont les mâts se pressaient les uns contre les autres, agitant aux tourbillons du mistral leurs pavillons de toutes les couleurs. Les derniers rayons du soleil couchant emplissaient l'horizon d'une lumière d'or. Les deux enfants, serrés l'un contre l'autre, regardaient tour à tour l'immensité du ciel et celle de la mer, puis les trois ports pleins de navires et la grande ville qui s'étendait au-dessous d'eux. Devant ce spectacle si nouveau, ils étaient tout émus.

En même temps ils pensaient avec joie aux bonnes paroles de Jérôme. – Je suis bien content, dit André, d'avoir entendu parler de notre oncle: il me semble que je le connais à présent, et je l'aime déjà, notre oncle Frantz!

– Et moi aussi, dit Julien. Quelle bonne idée il a de vouloir acheter un bout de champ! C'est justement tout à fait mon goût. Ce serait si bon d'avoir un champ à cultiver, des vaches à soigner: Oh! André, je traverserais toutes les mers du monde rien que pour cela.

André sourit à l'enfant. – Allons, dit-il, je vois que mon Julien a la vocation de la culture, et que l'oncle Frantz et lui feront vite une paire d'amis. En attendant, il faut se reposer, afin d'avoir bien des forces pour le voyage.

La nuit venue, avant de s'endormir, Julien dit à André:

– Nous allons remercier Dieu de tout notre cœur.

– Et aussi, ajouta André, lui demander la persévérance, afin de ne plus nous décourager à chaque traverse nouvelle, afin d'apprendre à être toujours contents de notre sort.

Et joignant les mains en face du ciel étoilé que reflétait la mer, les deux orphelins firent à haute voix la prière du soir.

LXXVI. – Promenade au port de Marseille. – Visite à un grand paquebot. – Les cabines des passagers, les hamacs des matelots; les étables, la cuisine, la salle à manger du navire

La première embarcation des hommes a été un tronc d'arbre. Que de progrès accomplis depuis ce jour! Le simple tronc d'arbre est devenu une vraie ville flottante

Dès le lendemain, André commença à se rendre utile au patron, voulant le dédommager de la nourriture et du coucher qu'il leur donnait. Le jeune garçon descendit donc de bonne heure, vêtu de ses habits de travail, et suivit le marin au port, où l'on devait achever le chargement du bateau.

Le bateau de Jérôme faisait le petit cabotage de la Méditerranée, c'est-à-dire la navigation sur les côtes, transportant d'un port à l'autre les marchandises. En ce moment, c'était un chargement de sapins du nord, qu'il s'agissait de transporter à Cette pour faire des mâts de navire. André aida de tout son courage au chargement.

Le petit Julien, resté à la maison, gardait les enfants de la femme du marin, pendant que celle-ci, profitant de cette aide, était allée laver un gros paquet de linge.

A l'heure du dîner, André mangea rapidement, puis il prit Julien dans ses bras: – Comme tu dois t'ennuyer immobile ainsi! lui dit-il. J'ai une bonne heure de repos devant moi, et je vais en profiter pour te montrer quelque chose de bien intéressant. Nous allons voir le port et les grands navires qui traversent l'océan; j'ai obtenu d'un matelot la permission de visiter l'intérieur d'un magnifique bateau à vapeur.

Julien tout joyeux passa un bras autour du cou de son frère, et un quart d'heure après ils étaient sur le quai.

– Oh! mon Dieu, mon Dieu, dit Julien, que de navires! Il y en a de toutes les grandeurs.

– Et ils viennent de tous les pays, dit André. Regarde celui-ci, qui est un des plus beaux du port en ce moment; c'est celui que nous allons voir. C'est le Sindh, qui fait la traversée de la Chine en France: il est arrivé ici avant-hier.

André, tenant Julien avec précaution, descendit dans une barque, et le batelier les conduisit en ramant auprès du grand navire, peint en noir et orné de dorures, qui s'élevait bien au-dessus d'eux comme un édifice porté par l'eau.

Ils montèrent avec précaution l'escalier mobile qui est attaché au flanc du bâtiment, et bientôt tous les deux se trouvèrent sur le pont, c'est-à-dire sur le plancher supérieur; car les grands vaisseaux sont comme des maisons flottantes à plusieurs étages, et chacun de ces étages s'appelle un pont.

Le marin auquel André avait parlé à l'avance les attendait. Il leur fit faire tout le tour de la vaste plate-forme. Il leur montra à un des bouts le grand tourniquet avec lequel on manœuvre le gouvernail; la cabine du capitaine était près de là, mais il était défendu d'y entrer sans permission. De chaque côté du navire étaient suspendus en l'air des chaloupes et canots, que l'on peut faire glisser dans la mer, et qui servent aux marins à quitter ou à regagner le navire.

– Voyez ces petites embarcations, dit le matelot; si par malheur le paquebot venait à être incendié ou à sombrer en pleine mer, c'est dans ces chaloupes ou ces canots que nous nous réfugierions, marins et passagers.

– Sont-elles petites, dit Julien, en comparaison du grand navire! on dirait des coques de noix.

– Dieu merci, de tels accidents sont rares, dit le marin. Le vaisseau est solide; il est presque tout en fer.

Pendant ce temps, des matelots chargés du service des cuisines ou du transport des marchandises allaient et venaient autour des enfants. Il y en avait de tous les pays et presque de toutes les races d'hommes, les uns jaunes, les autres noirs. A quelques pas, un jeune Chinois au teint olive, la tête ornée d'une longue queue, les pieds nus dans des sandales pointues, pompait de l'eau. – Quoi! dit Julien, il y a une pompe ici comme dans une cour.

– Certes oui, dit le marin: nous avons dans le fond du navire un réservoir d'eau douce: comment ferions-nous sans eau bonne à boire pendant une traversée qui dure trois mois?.. Voulez-vous voir à présent notre étable?

– Votre étable! répondit Julien avec étonnement.

– Mais oui, dit le marin, en montrant des espèces de grandes cages d'une propreté exquise, dans lesquelles il y avait une vache, des veaux et des moutons. Voici un agneau qui est à bord du navire; c'est le favori du capitaine: on le laisse de temps en temps se promener en liberté sur le pont. A côté, voilà les poules qui nous donnent de bons œufs frais pour les malades.

Julien n'en pouvait croire ses yeux. Ce qui le surprenait le plus, c'était l'ordre admirable et la propreté qui régnaient à bord.

– Songez donc, mon petit, dit le marin, que sans la propreté il n'y a de santé pour personne, surtout pour le matelot.

Après avoir visité le pont, on descendit par un escalier en bois à l'étage inférieur. – Je vais vous montrer, dit le marin, les chambres ou cabines où couchent les passagers.

Il ouvrit une des portes, et Julien vit une chambrette fort propre avec une table, des chaises, des fauteuils. Pour ménager la place, plusieurs petits lits étaient placés les uns au-dessus des autres.

– Quand on veut monter dans le second lit, dit le marin, on prend une chaise, et on se trouve au-dessus de son voisin.

Au fond était une petite fenêtre, hermétiquement close pour empêcher l'eau des vagues de pénétrer à l'intérieur.

Puis ce furent les salles de bains qu'on visita avec leurs jolies baignoires, la salle à manger avec sa longue table; on regarda les buffets, où les verres et les assiettes étaient fixés pour éviter que le mouvement du navire ne les brisât. Au-dessus de la table pendait une toile tendue: – Voyez-vous? dit le marin, quand les passagers dînent et que la chaleur est trop forte, par exemple sur la mer Rouge ou sous l'Équateur, un Chinois placé près de la porte agite cette toile avec une corde: la toile se remue alors comme un grand éventail, et donne de l'air aux passagers… Ce piano, qui est au fond de la salle, sert à égayer les longues soirées à bord du navire.

– Comme tout est prévu! disait Julien; ce navire est une vraie ville qui se promène sur l'eau.

– Mais où couchent donc les matelots? demanda André.

– Venez, venez, dit le marin. – Et on entra dans une grande salle basse. – Voici notre dortoir, dit-il.

– Comment cela? reprit Julien, je ne vois pas un lit.

– Patience, j'en vais faire un pour vous montrer.

Et en moins de rien le marin saisit au plafond un paquet qu'il déroula. C'était une natte de forte toile, longue et étroite. Il accrocha une des extrémités à un crochet fixé au plafond, l'autre à un second crochet placé à deux mètres de distance; puis, se tenant des deux mains à l'un des crochets, il s'enleva de terre et bondit dans cette couchette suspendue en l'air.

– Voici, dit-il, le lit fait et votre serviteur dedans. J'ai de plus une couverture pour m'envelopper. C'est tout ce qu'il faut au matelot pour dormir à l'aise dans son hamac, bercé par la mer au bruit des vagues.

– Alors, dit Julien, tous les crochets que je vois servent pour les lits de tous les matelots?

– Justement, mon petit. Et voyez, chaque crochet a un numéro d'ordre, chaque hamac aussi. Il y a quarante numéros, nous couchons ici quarante hommes, et nous avons chacun le nôtre.

On visita aussi les cuisines avec leurs grands fourneaux que chauffe la machine à vapeur du navire, puis la boulangerie et le four. Enfin on allait, on venait, montant et descendant les différents étages, et chemin faisant on rencontrait des Chinois aux larges pantalons jaunes, ou des Arabes aux yeux brillants et sauvages, car une partie des hommes de peine du navire est composée de Chinois et d'Algériens.

Lorsqu'on eut bien tout examiné, on remercia le marin et on s'en alla vite; car André ne voulait pas être en retard pour l'heure du travail.

– Que tu es bon de te donner tant de peine pour moi, mon frère! dit Julien, pendant qu'André l'emportait dans ses bras. Cela doit bien te fatiguer de me soutenir toujours.

– Non, mon Julien, dit André; j'ai une bonne santé et je suis fort; ne crains pas de me fatiguer. C'est à ceux qui sont plus forts d'aider les plus faibles, et je ne suis jamais si heureux que quand nous partageons un plaisir ensemble.

LXXVII. – La côte de Provence. – Toulon. – Nice. – La Corse. – Discussion entre les matelots; quelle est la plus belle province de France. Comment André les met d'accord

Ayons tous un même cœur pour aimer la France

Après avoir ramené son frère à la maison, André continua d'aider toute la journée Jérôme à charger le bateau, auquel le patron avait donné le nom de la Ville d'Aix en souvenir de son pays natal.

Le lendemain ce bateau, aussi modeste et pauvre que le paquebot à vapeur était superbe, mit de bonne heure à la voile. – Le vent est favorable, disait Jérôme, il faut en profiter.

On sortit du port, et on passa devant les forts qui le protègent, devant les murailles qui s'avancent en mer pour le défendre contre la violence des vagues. Enfin on vit s'ouvrir l'horizon sans limite de la pleine mer, qui semblait dans le lointain se confondre avec le ciel. Julien ne pouvait se lasser de regarder cette grande nappe bleue sur laquelle le bateau bondissait si légèrement; le vent enflait les voiles et on marchait vite. André observait la manœuvre avec attention pour apprendre ce qu'il y avait à faire. La mer était bonne, et les deux jeunes Lorrains n'éprouvèrent pas le mal de mer, ce malaise suivi de vomissements dont sont pris souvent ceux qui vont sur mer sans y être habitués.

Le long du chemin le patron et les deux hommes d'équipage, lorsqu'ils se trouvaient à portée de Julien, lui adressaient la parole et lui montraient les divers points de la côte.

Du bateau, on put apercevoir longtemps la ville de Marseille, dont les innombrables maisons se pressaient au bord de la mer, le clocher de Notre-Dame de la Garde surmonté d'une statue colossale qui brillait de loin au soleil, enfin la ceinture de hautes collines qui s'élevaient de chaque côté de la ville, baignant leur pied jusque dans la mer.

– Comme elle est belle, cette côte de Provence! dit Julien. Elle est toute découpée en caps arrondis. Comment donc s'appellent ces montagnes qui ondulent, là-bas, à droite?

– Ce sont les montagnes qui entourent Toulon, répondit le père Jérôme. Toulon est là-bas tout au fond. Voilà encore un port superbe! Seulement ce ne sont plus guère des navires de commerce qui s'y abritent, comme à Marseille: ce sont des vaisseaux de guerre, car Toulon est notre grand port de guerre sur la Méditerranée. Les navires de guerre ne sont pas moins curieux à voir que les paquebots de passagers. Là, tout est bardé de cuivre ou de fer, tout est cuirassé pour résister aux boulets ennemis, et, de chaque côté du pont, on voit les gueules menaçantes des canons.

– C'est dommage que nous ne passions pas par Toulon.

– Merci, petit! cela allongerait un peu trop notre route. Nous allons tout droit à Cette sans perdre de temps.

Le bateau allait vite en effet, et parfois la poussière humide des vagues arrivait jusque sur la figure de Julien. Celui-ci voyait toujours se succéder devant lui les côtes et les golfes de Provence, bordés de montagnes.

– Quelle superbe contrée, disait le patron Jérôme, que cette Provence toute couverte d'oliviers, de pins et d'herbes odorantes! C'est mon pays, ajouta-t-il, fièrement, et vois-tu, petit, à mon avis, c'est le plus beau du monde.

– Patron, dit l'un des marins, le lieu où l'on est né est toujours le premier du monde. Ainsi, moi qui vous parle, je ne connais rien qui me rie au cœur comme le joli comté de Nice; car je suis né là sur la côte, dans une petite maison entourée d'orangers et de citronniers qui toute l'année sont couverts de fleurs et de fruits. Ma mère était sans cesse occupée à cueillir les citrons ou les oranges pour les porter à Nice sur sa tête dans une grande corbeille. Nulle part je ne vois rien qui me paraisse charmant comme nos bois toujours verts d'orangers, de citronniers et d'oliviers, qui descendent des hauteurs de la montagne jusqu'au bord de la mer. Tout vient si bien dans notre chaud pays! Il y a autant de fleurs en hiver qu'au printemps; pendant que la neige couvre les contrées du nord, les étrangers malades viennent chercher chez nous le soleil et la santé.

– Et la Corse, donc, s'écria l'autre marin. Quel pays, quelle fertilité! Elle a en raccourci tous les climats. Sur la côte, du côté d'Ajaccio, c'est la douceur du midi; notre campagne est pleine aussi d'orangers, de lauriers et de myrtes, comme votre pays de Nice, camarade. Nos oliviers sont dix fois hauts comme ceux de votre Provence, patron. Et le cotonnier, le palmier peuvent croître chez nous comme en Algérie. Cela n'empêche pas qu'on trouve sur nos hautes montagnes neuf mois d'hiver, de neige et de glace, et de grands pins qui se moquent de l'avalanche.

– Oui, dit le patron; mais vous n'avez pas de bras chez vous; la Corse est dépeuplée et vos terres sont incultes.

– Patron, c'est vrai. Nous tenons plus volontiers un fusil que la charrue. Mais patience, nos enfants s'instruiront, et ils comprendront alors le parti qu'ils peuvent tirer des richesses du sol. En attendant, la France nous doit le plus habile capitaine du monde, Napoléon Ier.

– Eh bien, moi, dit le petit Julien qui était content aussi de donner son avis, je vous assure que la Lorraine vaut toutes les autres provinces. Il n'y a point d'orangers chez nous, ni d'oliviers; mais on sait joliment travailler en Lorraine, les femmes comme les hommes, et l'on a su s'y battre aussi; car nous avons eu Jeanne Darc et de grands généraux.

– Alors, pour nous mettre d'accord, dit André en souriant à l'enfant, disons donc que la France entière, la patrie, est pour nous tout ce qu'il y a de plus cher au monde.

– Bravo! vive la France, dit d'une même voix le petit équipage.

– Vive la patrie française! reprit le patron Jérôme; quand il s'agit de l'aimer ou de la défendre, tous ses enfants ne font qu'un cœur.

LXXVIII. – Une gloire de Marseille: le plus grand des sculpteurs français, Pierre Puget. – Un grand orateur et un législateur nés en Provence. – Le code français

«Nul bien sans peine.» (Pierre Puget.)

Pendant que le patron de la Ville d'Aix s'éloignait pour donner des ordres, Julien atteignit son fidèle compagnon de voyage, son livre sur les grands hommes de la France.

– Voyons donc, se dit-il, pendant que tout le monde est occupé, moi je m'en vais faire connaissance avec quelques-uns des noms célèbres de la Provence.

Et il se mit à lire avec attention.

I. A Marseille, naquit un grand homme qui fut à la fois sculpteur, peintre et architecte, Pierre Puget. La sculpture est l'art de tailler dans la pierre, le marbre ou le bois, des hommes, des animaux ou d'autres objets; par exemple, les statues qui ornent les places publiques sont l'œuvre des sculpteurs.

Le jeune Puget travailla d'abord chez un constructeur de navires et, à l'âge de seize ans, il se fit remarquer pour un superbe navire qu'il avait orné de dessins et de sculptures en bois. A cette époque, on avait coutume d'orner le devant des navires de statues, d'anges aux ailes déployées, de guirlandes dorées qui étincelaient au soleil, et on s'adressait pour tous ces ornements à des sculpteurs habiles.

Mais, à ce moment de sa vie, le rêve du jeune Puget n'était pas de sculpter: c'était d'apprendre la peinture et, pour l'étudier, d'aller en Italie, où étaient alors les plus grands maîtres de cet art. Dans ce but, il travailla avec courage comme ouvrier pendant un an, afin de gagner la somme nécessaire à son voyage. Puis, à dix-sept ans, il partit à pied, s'arrêtant en route quand l'argent lui manquait, et recommençant à travailler jusqu'à ce qu'il eût gagné de quoi aller plus loin. Comme on pense, il eut bien des peines à endurer pour arriver au terme de sa route, et il se trouva souvent dans la misère.

Une fois arrivé en Italie, il étudia la peinture auprès de différents maîtres. Il montrait déjà dans cet art un véritable génie, lorsqu'il tomba gravement malade. Le médecin lui dit qu'il ne se guérirait pas s'il continuait à peindre, à cause de l'odeur malsaine des peintures, et qu'il lui fallait changer d'occupation pour sauver sa santé. Le jeune peintre se trouva ainsi obligé de recommencer des études nouvelles: il ne se découragea pas, et il reprit son premier métier de sculpteur. Sa gloire ne perdit rien au change, car c'est dans la sculpture qu'il a acquis, non sans des peines et des travaux incessants, une impérissable renommée.

Pierre Puget avait gravé dans sa maison ces paroles qui semblent résumer sa vie:

«Nul bien sans peine.»

– Voilà une devise dont je veux me souvenir toujours, dit Julien; cela me donnera du courage.

Il reprit ensuite son livre et continua:

II. La Provence a produit plusieurs orateurs et hommes de loi célèbres. Près d'Aix est né Mirabeau, le plus grand de nos orateurs pendant la Révolution de 1789.

C'est aussi en Provence que naquit un rival de Mirabeau, Portalis, qui prit une grande part dans la suite à la formation du Code civil. Vous savez, enfants, qu'on appelle Code le livre où sont réunies toutes les lois du pays: le Code est le Livre des lois. Eh bien, depuis la fin du siècle dernier et le commencement du dix-neuvième siècle, un code nouveau a été établi en France; Portalis est un de ceux qui ont le plus contribué à faire ce code, à chercher les lois les plus sages et les plus justes pour notre pays.

Le code français est une des gloires de notre nation, et les autres peuples de l'Europe nous ont emprunté les plus importantes des lois qu'il renferme. Ceux qui veulent devenir magistrats ou avocats font de ces lois une étude approfondie, et on appelle Écoles de droit les établissements de l'État où on enseigne le code.

4.Depuis 1928, le nom de la ville est Sète.
Возрастное ограничение:
12+
Дата выхода на Литрес:
25 июня 2017
Объем:
340 стр. 1 иллюстрация
Правообладатель:
Public Domain

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