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Verdir le secteur financier africain durant la reprise post-crise

Alberto Lemma[1]

Judith Tyson[1]

Andrea Tizzanni[2]

Introduction

L’Afrique est très exposée aux risques liés aux changements climatiques. D’après les calculs du Centre africain pour la politique en matière de climat, une élévation des températures mondiales de 1 °C entraînerait une contraction de 2 % du produit intérieur brut (PIB) de l’Afrique. Dans le cas d’une hausse de 4 °C, la contraction du PIB de l’Afrique pourrait aller jusqu’à 12 %[3]. Il ressort d’une récente analyse de la Banque européenne d’investissement (BEI) que presque tous les pays africains sont exposés à des risques importants, élevés ou très élevés liés aux changements climatiques (Ferrazzi et al., 2021 ; se reporter à la figure 1). L’exposition aux risques physiques liés aux changements climatiques est particulièrement élevée. Par exemple, l’élévation des températures et les sécheresses plus fréquentes sur tout le continent sont susceptibles de réduire la productivité de l’agriculture, qui est le pilier de nombreuses économies africaines. Les infrastructures devront être améliorées pour faire face aux températures plus élevées, et les pays côtiers pourraient avoir à s’adapter à la montée du niveau des mers. Certains éléments donnent à penser que ces risques se matérialisent déjà en Afrique (Organisation météorologique mondiale, 2019)[4]. Les pays africains sont moins exposés aux risques de transition que les autres régions en raison d’un moindre niveau d’industrialisation. Toutefois, plusieurs d’entre eux sont de grands producteurs de combustibles fossiles et environ un tiers est exposé à des risques importants ou élevés de transition. Par conséquent, les changements climatiques risquent de porter un coup d’arrêt voire de réduire à néant les progrès en matière de développement et de réduction de la pauvreté (Département des affaires économiques et sociales des Nations unies, 2020 ; Niang et al., 2014). De surcroît, les répercussions de la pandémie de COVID-19 mettent en péril les avancées en matière de développement durable, y compris celles qui concernent les objectifs en matière de climat (Banque mondiale, 2020).

Figure 1 : Scores de l’indice des risques physiques et de transition selon le continent


Source : analyse de la BEI, résumée dans Ferrazzi et al., 2021.

Les changements climatiques auront des répercussions sur les institutions financières africaines. Leurs actifs physiques risquent d’être endommagés ou détruits, tandis que le rendement d’autres actifs pourrait aussi être pénalisé. Dans un cas extrême, les banques risqueraient de se retrouver avec des « actifs échoués » non rentables[5]. Si l’on méconnaît les risques liés aux changements climatiques, la qualité des actifs (en d’autres termes, la probabilité que les emprunteurs remboursent) et, partant, la rentabilité s’en trouveront amoindries. Cela signifie qu’il est dans l’intérêt des institutions financières africaines de prendre en compte les risques climatiques et le potentiel de la finance verte.

Le verdissement du secteur financier est essentiel pour mobiliser des capitaux supplémentaires dans la lutte contre les changements climatiques. À l’échelle mondiale, les investisseurs manifestent un intérêt accru pour la durabilité environnementale : ainsi, la finance verte constitue une occasion d’attirer davantage de capitaux en Afrique pour financer la transition climatique. L’objectif de la finance verte est de trouver le juste équilibre entre viabilité financière et durabilité environnementale en soutenant des investissements financièrement viables qui contribuent à protéger l’environnement et à réduire les émissions de carbone. Pour séduire les investisseurs internationaux, il est essentiel que la finance verte respecte des normes reconnues et assorties d’un degré élevé de transparence.

Il est possible de faire plus pour que le secteur financier prenne en compte les risques climatiques et saisisse les possibilités offertes par le financement de l’action pour le climat. Ces efforts sont devenus particulièrement urgents dans le contexte de la reprise post-pandémie. Comme le montre l’analyse ci-après dans ce chapitre, les institutions financières africaines, les États, les banques centrales et les autorités de régulation sont de plus en plus conscients des risques posés par les changements climatiques et explorent le potentiel de la finance verte. Toutefois, le Fonds monétaire international, 2020 estime les besoins de financement supplémentaires de 30 à 50 milliards d’USD par an pour l’adaptation aux effets des changements climatiques rien que pour l’Afrique subsaharienne. La Commission économique des Nations unies pour l’Afrique, 2020 souligne également l’importance de la lutte contre les changements climatiques dans la réponse à la crise liée à la pandémie de COVID-19, ainsi que la nécessité de consacrer d’importants financements supplémentaires à cet effet. Selon Buchner et al., 2019, en 2017 et 2018, le flux annuel moyen de financements destinés à l’adaptation au niveau mondial ne s’élevait qu’à 30 milliards d’USD, dont moins de 23 % sont allés à l’Afrique. La quasi-totalité de ces financements provenait d’organismes publics.

La crise sanitaire met aujourd’hui en péril le financement de l’action pour le climat dans les pays en développement. Les préoccupations concernant la capacité budgétaire, la viabilité de la dette et les possibilités d’accès aux marchés internationaux de certains pays en développement risquent de limiter la capacité à investir des États africains, comme il est indiqué au chapitre 1 du présent rapport. Même avant la crise, la perception d’une mise en concurrence des besoins en matière d’adaptation aux changements climatiques avec d’autres exigences freinait l’investissement dans les pays en développement (Allan et al., 2019). Dans ce contexte, il est essentiel que le secteur privé africain, soutenu par un secteur financier opérationnel, joue un rôle accru dans le soutien à l’action pour le climat et à l’investissement durable sur le plan environnemental. Le présent chapitre décrit les tendances et les évolutions actuelles en matière de financements verts et donne un éclairage sur les efforts supplémentaires nécessaires pour combler le déficit en la matière. Les données sur le financement de l’action pour le climat et la finance verte sur le continent demeurent également très lacunaires, ce qui limite l’analyse et la compréhension du secteur. Les organisations internationales peuvent jouer un rôle important en travaillant avec les institutions financières pour financer la transition climatique et en aidant à combler les lacunes en matière de connaissances et de capacités afin que des produits financiers durables puissent être proposés.

Encadré 1 : Qu’est-ce que la finance verte ?

On entend par finance verte des financements structurés qui ont vocation à soutenir une amélioration des résultats environnementaux. La taxinomie de l’UE pour les activités durables établit une liste des activités qui peuvent être considérées comme relevant de la finance verte ; elle couvre les investissements qui favorisent l’atténuation des changements climatiques ou l’adaptation à leurs effets, l’utilisation durable des ressources aquatiques, marines et terrestres, l’économie circulaire (recyclage accru, efficacité des matériaux, élimination efficace des déchets), la réduction de la pollution et la protection de la biodiversité et des écosystèmes (Union européenne, 2020).

La finance verte s’appuie à la fois sur des instruments de dette et des instruments de fonds propres. Les financements en fonds propres sont couramment utilisés aux premiers stades d’un projet ou pour des entreprises de création relativement récente. Les positions de second rang (c’est-à-dire les actions ou les parts dont le rang de priorité de paiement est inférieur dans la liquidation d’une entreprise) sont fréquemment utilisées dans de tels cas, car elles permettent aux investisseurs d’absorber plus de risques. Les institutions financières internationales jouent un rôle particulièrement important en investissant dans les tranches de fonds propres de rang inférieur, ce qui peut avoir valeur de signal de la viabilité financière de l’opération (Krushelnytska, 2017). Les flux de financement vers des investissements durables via la dette verte passent principalement par les prêts auprès d’institutions financières (y compris des banques commerciales et des institutions de financement du développement) et par le recours au marché obligataire.

La finance verte en Afrique
Marchés des capitaux

Les obligations vertes sont un moyen de collecter des ressources financières pour financer des projets qui prévoient une composante environnementale positive. Elles sont émises par divers acteurs, parmi lesquels des États souverains, des banques multilatérales de développement, de grandes entreprises et des banques commerciales. Les différentes catégories d’obligations vertes comprennent les obligations avec « usage spécifique des fonds levés » (le produit de l’émission obligataire sert à financer un projet vert), les obligations de projet (le financement est limité aux actifs et passifs du projet), les titres verts (obligations assorties d’une forme quelconque de sûreté) et les obligations vertes assorties d’un « mécanisme de paiement au résultat » (les investisseurs privés financent une intervention et sont remboursés, avec une prime, si le résultat convenu est atteint).

Le marché mondial des obligations vertes s’est rapidement développé depuis sa création en 2007, lorsque la BEI a émis la première obligation verte au monde, une obligation climatiquement responsable de 600 millions d’EUR. La première obligation verte de la Banque mondiale a été émise en 2008 (pour un montant équivalent à 346 millions d’USD), suivie d’un emprunt vert de 1 milliard d’USD de la Société financière internationale (IFC) en 2013 (IFC, 2016a). Selon les estimations de Climate Bonds Initiative (CBI), le marché des obligations vertes représentait quelque 1 000 milliards d’USD d’émissions cumulées en 2020 (Climate Bonds Initiative, 2021a). Cette croissance s’explique par la nécessité de financer des projets verts et par l’émergence d’une solide base d’investisseurs écoresponsables, composée non seulement de fonds spécialisés, mais aussi d’investisseurs généralistes qui cherchent à prendre en compte les risques climatiques dans leurs portefeuilles.

Le marché africain des obligations vertes se développe, le nombre et le montant des émissions augmentant presque chaque année (figure 2). La banque sud-africaine Nedbank a émis la première obligation verte du continent en 2012, pour un montant en principal initial de 5 milliards de ZAR (577 millions d’USD). Les fonds levés ont été réservés à des investissements visant à stimuler l’emploi dans des secteurs de l’économie verte : l’industrie manufacturière, la construction et les infrastructures. Au cours des années qui ont suivi, un certain nombre d’obligations vertes ont été émises par des États ou ont bénéficié de garanties souveraines. Les autorités municipales (qui cherchent à lever des fonds pour financer des infrastructures urbaines), les entreprises du secteur privé et les institutions financières ont elles aussi émis des obligations de ce type. Deux obligations vertes ont été émises en Afrique en 2020 – l’une d’un montant de 800 millions d’USD émise par l’État égyptien et l’autre de 200 millions d’USD émise par la Standard Bank en Afrique du Sud –, représentant 53 % du total des émissions à ce jour sur le territoire africain.

Figure 2 : Montant des obligations vertes africaines par type d’émetteur (en Mrd USD, nominal), 2014-2020


Source : base de données sur les obligations d’Environmental Finance, 2021.

Tableau 1 : Total des émissions d’obligations vertes par région, en cumul sur la période 2014-2020


RégionMarchés des obligations vertesNb d’émetteursNb de transactionsValeur (en Mrd USD)
Europe256871 385456,9
Amérique du Nord25614 628247,8
Asie-Pacifique18619844217
Amérique latine118110720,9
Afrique617201,9
Total621 9656 984944,5

Source : Climate Bonds Initiative (2021a).

Le marché africain des obligations vertes reste peu développé par rapport aux autres régions. Entre 2014 et 2020, ce sont 20 obligations vertes qui ont été émises dans six pays africains pour un montant d’environ 2 milliards d’USD. Dans le même temps, les émissions d’obligations vertes atteignaient 1 000 milliards d’USD dans le monde. L’Afrique représentait environ 0,2 % du marché mondial des obligations vertes sur la période considérée, mais elle était à l’origine de 2,8 % du PIB mondial en 2020 (Fonds monétaire international, 2021) : ainsi, le potentiel du marché africain des obligations vertes n’est pas encore pleinement réalisé.

Les obligations vertes ciblent divers secteurs, en monnaies fortes et en monnaies locales. Jusqu’en 2020, les obligations vertes concernaient notamment des projets dans l’industrie manufacturière et dans les secteurs des déchets, de l’énergie, de l’eau, de la construction et des transports. Les obligations sont principalement libellées en USD, qui représente 53 % du total des émissions, suivi du rand sud-africain (23 %) et du dirham marocain (13 %) (Climate Bonds Initiative, 2021a). Des obligations vertes ont également été émises dans des monnaies telles que le shilling kényan, le dollar namibien, le dirham marocain et le naira nigérian. Les émissions en monnaie nationale permettent aux institutions de financer des projets verts qui génèrent des recettes en monnaie locale par l’octroi de prêts en monnaie locale, évitant ainsi de répercuter le risque de change aux promoteurs de projets.

Figure 3 : Montant des affectations des fonds levés par les obligations vertes africaines (en Mrd USD, nominal), 2014-2020


Source : base de données sur les obligations d’Environmental Finance, 2021.

Un certain nombre d’initiatives prévoient des normes communes, des plateformes de coopération et des infrastructures de soutien pour promouvoir le développement des marchés d’obligations vertes et de capitaux verts. En 2012, la Bourse de Johannesburg (Afrique du Sud) et la Bourse égyptienne ont compté parmi les membres fondateurs de l’initiative des Bourses pour un investissement durable (Sustainable Stock Exchanges – SSE[6]), dont l’objectif est de créer une plateforme mondiale permettant aux Bourses de promouvoir des investissements durables. Quatorze autres pays africains[7] se sont ralliés à cette initiative (initiative des Bourses pour un investissement durable, 2021). Les Bourses sont de plus en plus conscientes de l’importance de la durabilité et des aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Par exemple, les places boursières du Botswana, d’Égypte, du Kenya, du Nigeria et d’Afrique du Sud publient chacune un rapport annuel sur la durabilité, celles du Botswana, du Nigeria et d’Afrique du Sud formulent également des orientations écrites sur la publication d’informations ESG et les possibilités de formation en la matière. Les Bourses de Namibie, du Nigeria, d’Afrique du Sud et du Zimbabwe ont fait de la publication d’informations ESG une condition préalable à la cotation. Par ailleurs, les Bourses d’Afrique du Sud, du Kenya et du Nigeria ont mis en place des compartiments spécifiques pour les obligations vertes ou en envisagent l’introduction (Climate Bonds Initiative, 2021b). En Afrique du Sud, la Bourse de Johannesburg a déjà une cote verte.

Banques

Les banques africaines pourraient contribuer de manière notable à appuyer les besoins de financement de l’action pour le climat sur tout le continent. En Afrique du Sud, les banques commerciales fournissent déjà d’importants volumes de financement vert, de l’ordre de 1,3 milliard d’USD pour la période allant jusqu’à 2018 (Cassim et al., 2021). Cela est peu toutefois par rapport au crédit total au secteur privé : sur la base des données de la Banque mondiale, ce montant représenterait environ 0,4 % du crédit intérieur au secteur privé ou 0,5 % du financement bancaire en faveur du secteur privé (estimations d’après les données de la Banque mondiale, 2021). Étant donné que le secteur financier de l’Afrique du Sud figure parmi les plus développés du continent, il est probable que les volumes de financement mis à disposition par les banques privées dans le domaine de la lutte contre les changements climatiques soient encore plus faibles sur les autres marchés africains. Il semble que les banques actives en Afrique du Sud et dans d’autres pays africains disposent d’une marge importante pour soutenir davantage la concrétisation des contributions déterminées au niveau national dans le cadre de l’accord de Paris.

Les effets des changements climatiques et les transitions énergétiques représentent des risques notables pour les banques africaines. Au fil de l’abandon progressif des combustibles fossiles et de l’aggravation des phénomènes liés au climat, de nombreux secteurs économiques seront touchés. Par exemple, 90 % des réserves de charbon de l’Afrique devraient devenir des ressources échouées, avec à la clé d’importantes pertes pour un grand nombre de pays (Bos et Gupta, 2019). Selon l’agence de notation Moody’s, près de 30 % du portefeuille total de prêts des banques africaines concernent des secteurs sensibles sur le plan environnemental[8]. Plus de 40 % des 78 banques interrogées dans le cadre de l’enquête 2021 de la BEI sur le secteur bancaire en Afrique ont déclaré que le secteur agricole – qui devrait être extrêmement touché par les changements climatiques – représentait au moins 10 % de leurs portefeuilles ; pour près de la moitié de ces banques, il en représentait plus de 20 % (figure 4)[9]. En outre, 20 % des banques ont déclaré détenir au moins 10 % de prêts au secteur pétrolier et gazier dans leurs portefeuilles. On peut donc s’attendre à ce que les risques climatiques aient une incidence considérable sur les portefeuilles de prêts et la rentabilité des banques en Afrique.

Les banques africaines accordent des financements verts, mais ceux-ci ne représentent toujours qu’une petite part du total de leurs portefeuilles. L’Afrique de l’Est et l’Afrique australe devancent légèrement les autres régions africaines lorsqu’il s’agit d’exploiter ce potentiel ; 12 % des banques présentes en Afrique de l’Est et 7 % de celles présentes en Afrique australe détiennent plus de 20 % de prêts en faveur des énergies renouvelables dans le total de leurs portefeuilles, contre 6 % pour l’ensemble de l’échantillon. Pour les deux tiers des banques toutefois, le secteur des énergies renouvelables continue de représenter moins de 10 % du portefeuille total, ce qui donne à penser que le potentiel de la finance verte reste encore inexploité globalement.

Figure 4 : Répartition sectorielle du portefeuille total (% des banques africaines interrogées)


Source : enquête 2021 de la BEI sur le secteur bancaire en Afrique.

Les banques d’Afrique subsaharienne sont conscientes de l’importance d’adopter des principes sur la finance verte, dans l’optique de prendre en compte les risques et de profiter des nouvelles possibilités. Pour les banques commerciales, une stratégie de lutte contre les changements climatiques constitue un outil important pour promouvoir l’engagement dans des activités de finance verte et leur conférer une plus grande efficacité (Programme des Nations unies pour l’environnement, 2014). Les résultats de l’enquête 2021 de la BEI sur le secteur bancaire en Afrique font ressortir que 54 % des banques africaines mettent en oeuvre des pratiques en matière de finance verte à différents niveaux, allant de l’intégration du climat dans une stratégie ESG en vigueur à la formalisation d’une stratégie autonome de lutte contre les changements climatiques. La majorité des banques (84 %) ont reconnu qu’une stratégie climatique en bonne et due forme pouvait ouvrir de nouvelles perspectives, par exemple dans le domaine des énergies renouvelables. En outre, plus des trois quarts des banques savent que, pour réduire les risques de réputation et les risques financiers associés aux changements climatiques, il est essentiel de se doter de stratégies et de principes en matière d’action pour le climat et de les porter à la connaissance du public. Les deux tiers des banques interrogées voient dans les produits verts, comme les prêts hypothécaires verts et les prêts à l’appui de l’efficacité énergétique, une occasion d’élargir la gamme qu’elles proposent à leur clientèle. Plus de la moitié des banques reconnaissent que miser sur les portefeuilles verts, y compris les obligations vertes, pourrait constituer une bonne occasion de diversifier leurs sources de financement. Enfin, 60 % des banques interrogées considèrent que les émissions d’obligations vertes et les lignes de crédit vertes auprès d’institutions de financement du développement leur permettront d’accroître leurs ressources à l’avenir. Toutefois, à ce jour, elles ne sont que 17 % à avoir lancé des produits financiers verts spécifiques et, selon les estimations, ceux-ci représentent une part modeste du portefeuille – pas plus de 2 % pour 45 % d’entre elles, et entre 2 et 20 % pour les autres.

Figure 5 : Potentiel de la finance verte et produits financiers verts (% des banques africaines interrogées)


Source : enquête 2021 de la BEI sur le secteur bancaire en Afrique.

Les banques africaines évaluent l’incidence éventuelle des risques climatiques sur chaque prêt ou client, mais la quantification des risques au niveau du portefeuille est moins courante, et les liens avec la tarification ne sont pas encore intégrés de manière systématique. Les banques doivent évaluer les risques climatiques, car tout écart inattendu des résultats financiers en découlant risque d’avoir une incidence significative sur leurs bénéfices et leurs charges et, partant, d’obérer la viabilité financière (IFC, 2016b). La plupart des banques interrogées (70 %) ont indiqué tenir compte, lors de l’instruction d’un prêt, de l’incidence que pourraient avoir les risques physiques et de transition sur leurs clients ou leurs projets d’investissement, tandis que 42 % d’entre elles évaluent les risques au niveau du portefeuille (figure 6). Toutefois, les données de l’enquête ne montrent pas dans quelle mesure ces évaluations sont systématiques, et les banques ne sont que 27 % à déclarer intégrer les risques climatiques dans la tarification de leurs prêts.

Figure 6 : Approche des risques climatiques (% des banques africaines interrogées)


Source : enquête 2021 de la BEI sur le secteur bancaire en Afrique.

Il semble possible d’élargir les prestations d’assistance technique en matière de finance verte et d’élaboration de produits financiers verts (figure 6). Les banques pourraient améliorer leurs résultats financiers grâce à la fourniture d’une assistance technique aux clients, étant donné que les changements apportés pour promouvoir l’atténuation des changements climatiques et l’adaptation à leurs effets sont souvent susceptibles d’avoir une incidence financière positive sur les entreprises (Ellis et al., 2013), avec à la clé des rendements financiers plus élevés et une probabilité de remboursement accrue. Mais dans la pratique, les banques interrogées sont seulement 25 % environ à fournir une telle assistance technique et 22 % à envisager de mettre en oeuvre cette prestation à l’avenir. À cet effet, les banques doivent non seulement reconnaître les risques, mais aussi comprendre comment les clients peuvent y faire face. Ce constat donne à penser qu’il existe peut-être aussi un besoin de sensibilisation et de renforcement des capacités au niveau des banques, afin de leur permettre d’apporter ce type de soutien aux clients. La prestation d’assistance technique pourrait en outre les aider à mettre au point des produits financiers verts qui, comme indiqué plus haut, restent rares.

Les banques se dotent de personnel spécialisé pour mieux exploiter le potentiel de la finance verte. Les banques dont le personnel possède des compétences en matière de lutte contre les changements climatiques sont plus à même de mener des activités dans la finance verte de façon satisfaisante (Groupe de travail sur la publication d’informations financières relatives au climat, 2017). La moitié des banques interrogées dans le cadre de l’enquête 2021 de la BEI sur le secteur bancaire en Afrique était dotée d’un personnel spécialisé dans les risques climatiques et 15 % envisageaient d’embaucher du personnel pour travailler dans ce domaine (figure 7). Treize banques ont indiqué avoir embauché du personnel possédant une forme de certification en évaluation des risques climatiques ou avoir formé du personnel dans ce domaine (analyse des risques environnementaux et sociaux de l’Initiative de collaboration du Programme des Nations unies pour l’environnement avec le secteur financier, par exemple). Les grandes banques semblent mieux placées pour prendre en compte les changements climatiques, car elles sont plus susceptibles d’être dotées d’un personnel spécifique – 36 % seulement des banques de petite dimension disposent d’un personnel spécialisé dans le financement de l’action pour le climat, contre 64 % des grandes banques[10]. Parmi les banques interrogées, 42 % emploient actuellement du personnel axé sur la mise à profit du potentiel de prêts à l’appui des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique et 15 % envisagent d’embaucher du personnel dans ce secteur en expansion.

Figure 7 : Personnel spécialisé dans les changements climatiques selon l’actif total des banques réparti en quartiles (% des banques africaines interrogées)


Source : enquête 2021 de la BEI sur le secteur bancaire en Afrique.

Les banques africaines considèrent la faiblesse de la demande pour des produits financiers verts et le manque de compétences techniques parmi leur personnel comme les principaux obstacles à l’investissement dans ce secteur. La faiblesse de la demande pour de tels produits a été citée par 32 % des banques interrogées comme le principal obstacle aux efforts supplémentaires pour identifier, évaluer et prendre en compte les risques climatiques et les possibilités offertes par l’action pour le climat. En outre, 52 % des banques ont fait figurer l’absence de données, d’outils et de modèles permettant d’évaluer les risques climatiques au premier ou au deuxième rang des principaux facteurs limitants. Le manque de connaissances concernant ces produits est considéré comme le principal obstacle ou comme le deuxième obstacle majeur pour 23 % et 25 % des banques, respectivement. Néanmoins, on peut s’attendre à ce que la demande augmente, étant donné que les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris pourraient inciter les États à adopter de nouvelles mesures législatives pour le secteur privé dans les domaines de l’atténuation des changements climatiques et de l’adaptation à leurs effets. Faire connaître le potentiel de la finance verte ainsi que les options et produits verts pourrait également contribuer à remédier à la faiblesse de la demande. Les compétences peuvent être renforcées par la mise en place de formations à l’intention des pays à faible revenu, telles que le cours sur les changements climatiques et la finance proposé dans le cadre de l’Initiative de collaboration du Programme des Nations unies pour l’environnement avec le secteur financier (PNUE-FI) ; une autre solution serait de créer des partenariats d’apprentissage entre banques, à l’image de Alliance for Green Commercial Banks de l’IFC.

Figure 8 : Principaux obstacles à l’identification, à l’évaluation et à la prise en compte des risques climatiques et des possibilités offertes par l’action pour le climat (% des banques africaines interrogées)


Source : enquête 2021 de la BEI sur le secteur bancaire en Afrique.

Dans l’ensemble, les données de l’enquête de la BEI montrent que les banques africaines examinent avec soin les éventuelles incidences financières des changements climatiques et le potentiel de la finance verte. Elles prennent de plus en plus l’initiative d’intégrer les changements climatiques dans leurs activités, notamment en allouant des ressources en personnel pour travailler sur la question et, dans une moindre mesure, en fournissant une assistance technique ou des produits spécialisés. Cela peut constituer une base solide pour stimuler la croissance de la finance verte par l’entremise des banques africaines. Toutefois, les résultats de l’enquête mettent également en évidence la nécessité de progresser davantage dans l’étoffement des compétences et dans la réorientation des portefeuilles vers des secteurs qui atténuent les effets des changements climatiques ou y sont plus résilients. Les banques jugent la demande de financements verts faible à l’heure actuelle. Il pourrait par conséquent s’avérer nécessaire qu’elles promeuvent les produits financiers verts et sensibilisent davantage leurs clients aux risques climatiques et aux possibilités offertes par l’action pour le climat afin de stimuler la demande.

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9789286150654
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