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Читать книгу: «Voyages loin de ma chambre t.2», страница 4

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Autres châteaux historiques,
L’abbaye de Marmoutier, Savonnières
Les Jardins Mame
Le Parc de Beaujardin, La Colonie de Mettray
Coup d’œil sur la ville de Tours

Comme tu le vois, mon cher Henri, tantôt c’est l’extérieur qui étale d’admirables beautés, tantôt c’est l’intérieur somptueusement décoré, parfois ce sont les deux qui brillent d’un éclat incomparable.

Ici, le parc l’emporte sur le château par le pittoresque de sa situation: vue étendue et variée, sites enchanteurs, eaux vives, cascades tapageuses, pelouses veloutées, drapées de grandes corbeilles de fleurs ou incrustées de mosaï-culture d’une régularité parfaite. Là, le château qui se détache sur l’émeraude des vastes prairies, se mire dans la transparence des eaux ou s’abrite sous l’ombre épaisse des bois et domine par son aspect féodal et princier, par son architecture remarquable.

C’est aussi de la dentelle de pierre, pierre blanche plus facile à travailler, plus agréable à l’œil; mais qui ne vaut pas quand même celle des antiques clochers à jours et des vieux châteaux-forts de Bretagne, façonnés dans le granit. L’intérieur arrive à son tour avec ses meubles rares, ses collections précieuses, ses bibelots artistiques, ses tableaux de maîtres. Cependant je consignerai ici mon intime pensée. Plusieurs de ces beaux châteaux sont un peu le palais de la Belle au bois dormant, j’ai ressenti ce sentiment d’une manière très vive à Chenonceaux, ils ne sont point habités. Pas de maîtres et pas beaucoup plus de domestiques. Un portier qui reste dans sa loge, il faut bien quelqu’un pour répondre, et cependant il me souvient d’avoir un certain dimanche parcouru dans tous les sens un joli parc entourant un joli château auquel nous sonnâmes en vain, sans rencontrer âme qui vive. Le gardien, cette après-midi là, avait sans doute pris la clef des champs.

Lorsque vous êtes entré, un valet de chambre se présente pour vous faire visiter. En général les maîtres sont en voyage, c’est la phrase stéréotypée sur les lèvres des serviteurs; ils voyagent ou vivent ailleurs plus simplement que ne le comporterait leur propriété. Il est certain que pour mener le train considérable qu’exigent de pareils châteaux, il faudrait une fortune énorme, que tous leurs propriétaires n’ont pas.

Leurs châteaux sont des musées qu’ils respectent des trésors dont ils sont fiers à juste titre et qu’ils gardent précieusement, mais dont ils ne peuvent se servir.

Les magnifiques châteaux dont je viens de te parler en détail sont les gros diamants dont la Touraine est en partie l’écrin; mais que de perles précieuses, que de ravissants joyaux, ce bel écrin renferme encore! Dans ce fortuné pays, on peut dire que chaque bourgade, ville ou village, a son château qui le préserve de l’oubli par ses souvenirs historiques, ou l’embellit de sa propre beauté.

Je citerai: Beaumont-la-Ronce, ancien château seigneurial; le château de la Tourballière, tous les deux érigés en marquisat, le premier en 1757, le second en 1656.

Le château de Beugny qui s’enfonce dans la forêt de Chinon. Boussay qui détache son profil gothique au milieu des eaux. Dans ce château sont nées quatre illustrations de la famille de Merou: Jean, chambellan du roi (1363), Pierre, amiral de France (1416); Philippe, chambellan du roi Louis XI (1461); Jacques-François, président de l’Assemblée Nationale (1789), général de division, mort en 1810.

Le château de Brizay, qui appartenait jadis à la famille de Maillé, et fut alors le théâtre d’un évènement douloureux: tous ses habitants furent un jour ensevelis sous les plafonds qui s’écroulèrent à la fois. Simon de Maillé, archevêque de Tours, qui se trouvait dans une partie très élevée du château, survit seul à désastre.

Le très beau château de Commaire, construction moderne, appartenant au marquis de Lussac.

Le château de Grillemont, possédé par le fameux Tristan, et habité par Louis XI.

L’ancien château de Plessis-Rideau, que Gédéon Tallemant des Réaux acheta vers 1650, au prix de cent quinze livres, et auquel il donna le nom de château Réaux.

Le château de la Guerche, construit sous Charles VI, est fort curieux; situé sur les bords de la Creuse, il présente du côté de la rivière qui le baigne, une élévation de plus de cent pieds. On y voit six rangs de voûtes superposées. Les greniers sont au rez-de-chaussée du côté de la cour, et se composent de vastes pièces voûtées bien sèches, bien aérées, quoiqu’au niveau de la Creuse. Les murs à leur base ont cinq mètres d’épaisseur.

Le beau château de Chavigny, bâti dans le goût de la Renaissance. Le château d’Epigny, où naquit en 1717, le chevalier Pierre de Fontenailles, qui a laissé diverses poésies.

Le château de Montbazon situé sur une haute colline, construit au commencement du XIe siècle par Foulques Nerra. En 1459, Charles VII, tenant sa Cour dans le château de Montbazon, y reçut de François II l’hommage du duché de Bretagne.

Le château de la Bourdaisière où naquit Gabrielle d’Estrées en 1565.

Le château de la Vallière, d’où la famille de Baume-Le-Blanc avait pris son nom et qui rappelle tout à la fois la pieuse carmélite et les jours ensoleillés d’amour du grand roi.

Le vieux manoir de la Mothe-Sonzay, qui éveille l’attention des archéologues, fut construit par Henri II pour Diane de Poitiers.

Le château de Rochecotte, ancienne habitation et lieu de naissance du fameux chef vendéen Guillon, marquis de Rochecotte, condamné et fusillé en 1798, à la plaine de Grenelle, à Paris, à l’âge de vingt-neuf ans.

Un peu plus loin on remarque le château moderne de Saint-Patrice, appartenant à Monsieur le comte de Chabrol. Son parc renferme une épine miraculeuse qui commence sa floraison dans le mois de décembre et s’épanouit même sous la neige. La tradition populaire attribue ce phénomène végétal à saint Patrice qui jadis, après avoir traversé la Loire, planta son bâton en ce lieu. Ce bâton prit racine, devint buisson et se couvrit de fleurs. Depuis cette lointaine époque, le buisson qui repousse toujours, rappelle fidèlement chaque année le passage en ces lieux du patron de l’Irlande. Aussi les Irlandais qui visitent la Touraine ne manquent-ils jamais de faire ici un pieux pèlerinage.

Le majestueux château d’Ussé, qui, de son cadre de grands bois, domine le vaste bassin de la Loire. Ce château date de la première moitié du XVIe siècle. Il fut en partie construit par Vauban qui l’habita. Sa chapelle gothique est tout à fait charmante.

J’oublie certainement quelques vieux châteaux semés çà et là par Charles VII. Mais voici la Herpinière, une de ses maisons de plaisance, et Bonaventure, un pavillon élégant qu’il aimait et qu’il avait fait construire pour Agnès Sorel. Il venait souvent avec elle prendre le plaisir de la chasse à l’oiseau, dans les environs.

Le château de la Roche-Racan m’a fort intéressée. C’est là que naquit en 1589 et que mourut en 1670, âgé de quatre-vingt-un ans, le célèbre poète Honorat de Breuil, marquis de Racan, d’une des plus anciennes familles de Touraine. Le château de la Roche bâti à mi-côte et dont les murs ont quatre mètres d’épaisseur à la base, est remarquable aussi par une tour octogone d’où la vue s’étend sur une superbe vallée. Je comprends qu’en présence de cette belle campagne calme et recueillie, l’âme rêveuse du poète ait cherché dans la contemplation des beautés de la nature qui conduisent à Dieu, ses meilleures inspirations. Son esprit bercé, dans un rêve infini, a produit des odes sacrées tirées des psaumes et des poésies pastorales qui, si elles manquent de force, ont cependant donné à la langue poétique une harmonie et une grâce naturelles qu’on ne connaissait pas jusque là.

J’énumèrerai encore, entrevus à vol d’oiseau:

Le vieux château-fort de Montrésor, autrefois flanqué de tours et entouré de douves profondes.

Le château de Candé qui appartient à la famille Drake del Castillo.

Le château d’Armilly. Le château des Hérissaudières. L’ancien château fortifié de Noisay, à la physionomie sévère.

Le château de Brou, bâti au XVe siècle par le maréchal de Boucicaut.

Le château des Etangs qui était autrefois une des principales forteresses du pays. Les Ligueurs y avaient un corps de troupes qui ravageaient les environs.

Le château de Bouffret construit en style gothique.

Le château de Corcoué, style Renaissance.

Les vieux châteaux de Saché et de Marcilly-sur-Maulne.

Le beau château de la Ferrière avec sa grande forêt du même nom.

Gizeux, demeure du XIIe siècle.

Le château de Vantourneux, à Madame la comtesse de Montesquiou.

Le château de Bossay avec son antique donjon du XIIIe siècle.

Le château de la Chenardière qui appartint aux familles de Montmorency, de Laval, de Maillé. Les châteaux de Sennevières, de Sazilly, du Coudray-Montpensier, de Valesne, de Courcelles, de Sonnay, de la Guérinière, de Montgoger, de Rouvray, de Coulaines, de Custière, de la Branchoire, de Valmer, de Poillé, d’Alette, des Recordières, des Ports, des Bordes, de la Brêche, de Saint-Ouen, etc., etc.

J’en passe sans doute beaucoup et peut-être des plus beaux, mais quand on voyage rapidement, on ne peut tout voir, et encore moins tout retenir.

Cette façon prompte de parcourir le pays ne manque pas d’attraits. Ce qu’on voit se présente sous son meilleur aspect, on n’a pas le temps d’envisager l’envers des choses ni d’examiner leur mauvais côté.

LANGEAIS

J’ai vivement regretté de ne pouvoir visiter le vieux château de Langeais, en mémoire de notre bonne duchesse. En effet, n’est-ce pas dans la grande salle de ce château qu’eut lieu en 1491 le mariage de Charles VIII avec Anne de Bretagne. Oui, l’élégante Touraine est remplie de souvenirs de notre fière Bretagne, qui semble avoir posé sa griffe de granit sur tout ce qu’elle a touché.

Des étrangers ont, paraît-il, acheté ce château qui reste fermé aux visiteurs, mais il n’y a pas bien longtemps encore on pouvait lire sur une pierre posée dans l’escalier, l’inscription suivante: «La pierre phyllozofalle, c’est estre content de ses biens; qui n’a souffisance, n’a rien; 1520.»

Le donjon du château de Langeais est le doyen des édifices de ce genre, il fut construit vers 992 par le duc d’Anjou, Foulques Nerra. Plus tard le château devint la propriété de Pierre de Brosse, barbier de Louis IX. Il passa ensuite aux mains de Jean Bourré, ministre et favori de Philippe le Hardi qui le reconstruisit entièrement. C’est à Langeais que se passait autrefois une coutume étrange, un devoir féodal des plus singuliers. Quand un roi de France arrivait dans cette bourgade pour la première fois, ses habitants étaient obligés d’aller à sa rencontre à une demi-lieue, tenant chacun en main une petite botte de paille. Hein! les habitants ne se mettaient pas en frais pour recevoir leur roi! Cette bienvenue extraordinaire dont on n’a pu me donner l’explication, eut lieu le 14 novembre 1565, lorsque Charles IX vint au château de Langeais, où il passa la nuit.

J’ai entrevu le château de Plessis-lès-Tours. Ce château construit en 1463 par Louis XI, fut sa demeure favorite. C’est là qu’il mourut en 1484, assisté par saint Vincent de Paul et cinq autres religieux que le roi avait près de lui depuis un an. C’est à Plessis-les-Tours que le traître La Balue fut d’abord emprisonné. Son cachot était la tour qui contient l’escalier; voilà à peu près tout ce qui reste de ce château. Ah! ce n’est plus une demeure royale, ce n’est même plus une belle ruine que l’on conserve respectueusement. Décadence des choses humaines: ses pieds baignent dans la fange et ses jardins sont devenus un réceptacle de fumiers et servent de dépotoir à la ville!

Le château de Richelieu n’a pas été plus heureux. Il fut bâti en 1637, par le célèbre cardinal, dans un petit village auquel il donna son nom, et dont il essaya de faire une ville; mais les villes ne s’improvisent pas, elles sont l’œuvre patiente du temps. Et Richelieu n’est aujourd’hui qu’un chef-lieu de canton de deux mille trois cent dix-huit habitants.

C’était un splendide château. Richelieu avait déployé là toute sa magnificence. A l’extérieur, architecture admirablement ornementée; à l’intérieur, marbres, sculptures et peintures des grands maîtres remplissaient les appartements.

Quelques-uns des tableaux sont à Tours, quelques autres à Paris, ainsi que la fameuse table de marbre dont il a été parlé si souvent et qu’on voit aujourd’hui au Louvre.

Quant au château, l’un des plus beaux de France, comme je viens de le dire, et peut-être le plus régulièrement bâti, il n’en reste pas trace. Il a été démoli du faîte à la base, sans qu’on en retrouve une seule pierre.

Le même sort attendait le château de Chanteloup, habitation vraiment royale que le duc de Choiseul, ministre sous Louis XV, avait acheté en 1760. C’est pendant son exil dans ce château, exil qui lui valut tant de sympathies, qu’il fit édifier cette élégante pyramide de quarante mètres de haut, composée de sept étages, qui vont toujours en se rétrécissant, qu’on appelle La Pagode. Elle existe encore et on la voit de loin s’élevant au milieu des bois.

Une table de marbre, placée au rez-de-chaussée, portait le registre de maroquin rouge, où l’on inscrivait le nom des personnages éminents qui venaient visiter le duc pendant sa disgrâce.

Le château de Champigny habité par des princes du sang et jadis par Charles IX, n’est plus lui aussi qu’un souvenir. Richelieu en étant devenu propriétaire le fit complètement démolir.

Il existe cependant la Sainte-Chapelle dont les vitraux, représentant la vie de saint Louis, sont très remarquables.

Le bourg de Champigny est la patrie de Lambert, grand musicien sous Louis XIV. Sa fille épousa Lulli.

Du château de Marmande il ne reste plus qu’une tour de cent dix pieds de haut, qu’on nomme la Flèche de Marmande, et un gros pavillon qu’on appelle la Tour carrée.

Sainte Radegonde dont le nom vient de la pieuse reine de France Radegonde, qui l’habita longtemps, est un joli village tout près de Tours.

On y remarque les ruines de l’ancienne et très célèbre abbaye de Marmoutier.

L’ABBAYE DE MARMOUTIER

C’est au IVe siècle que saint Martin, évêque de Tours, fonda cette célèbre abbaye, dont la renommée devait s’accroître de siècle en siècle. Elle était aussi riche des dons du ciel que de ceux de la terre. D’un côté, les vertus austères de ses saints moines qui inspiraient la plus grande vénération; de l’autre, les immenses biens, dus à la piété des peuples et des rois qu’elle possédait. Ce fut avec la sainte ampoule de Marmoutier qu’Henri IV fut sacré.

L’église et les anciens bâtiments rendus en 1797 ont été démolis. Il ne reste que le vieux portique qui servait d’entrée principale au sud. Le superbe escalier qui avait échappé aux fureurs révolutionnaires a été vendu depuis et emporté en Angleterre. On en voit une reproduction très exacte au musée de Tours. Marmoutier appartient aujourd’hui aux Dames du Sacré-Cœur, qui ont fondé dans l’enceinte même de l’abbaye un très beau pensionnat.

SAVONNIÈRES

Les grottes de Savonnières d’une longueur de cent dix mètres et divisées en plusieurs compartiments qu’on appelle ici caves gouttières, sont curieuses à visiter.

Elles ont beaucoup d’analogie avec les fameuses grottes d’Arcy dans l’Yonne. Elles sont si sombres qu’on ne peut y entrer qu’avec de la lumière. L’eau qui suinte des voûtes forme à la longue de petits ruisseaux qui ont le don de pétrifier tout ce qu’on y dépose. Mais il faut beaucoup de temps pour que l’objet, fruit, légume, nid devienne pierre. Il faut aussi plusieurs mois, pour que ces eaux, qui tombent goutte à goutte se soient solidifiées, dans les moules généralement en métal qui les reçoivent; on fait ainsi de fort jolis camées qui ont toute l’apparence d’une pierre finement sculptée.

Le dépôt de ces eaux, blanches et diaphanes, chargées de sels calcaires, forme encore avec le temps des cristallisations remarquables: des stalactites bizarres qui ont la transparence et le poli de l’albâtre descendent des voûtes.

Les eaux de Savonnières ne sont pas les seules du département à fabriquer des pétrifications, les eaux de l’étang de Saint-Genault dans les environs de Loches agissent ainsi sur le bois auquel elles donnent la pesanteur de la pierre tout en le nuançant de diverses couleurs, sans lui enlever son caractère primitif; d’autres eaux ont la propriété de rougir les pierres blanches qui y séjournent, de former des incrustations brillantes sur les mousses qu’elles baignent.

Non loin des grottes pétrifiantes de Savonnières se trouve le château de Villandry, une belle demeure ombreuse et fleurie, son beau parc se distingue par ses pelouses toutes brodées de mosaïculture, cela devient un art véritable à l’aide de ces feuillages aussi réguliers de formes que variés de tons, on arrive à tracer les plus charmants dessins, élégants festons, capricieuses arabesques, encadrent les initiales enlacées des propriétaires, parfois même, ce sont leurs armoiries qui se détachent sur les tapis d’herbes fines.

JARDINS MAME

L’histoire des jardins célèbres de l’antiquité est parvenue jusqu’à nous.

On écrira aussi celle de quelques-uns de nos jardins modernes à commencer par celui de Monsieur Mame, qui se nomme les Touches et se trouve à Ballan à dix kilomètres de Tours. Les serres de ce beau jardin renferment les plantes les plus curieuses et les plus rares venues de tous les continents, de merveilleuses orchidées, des roses incomparables, des camélias superbes, quel éclatant fouillis de corolles et de calices, quelle abondance de parfums exquis, quelle élégance de formes, quelle richesse de coloris; mais aussi quel entretien méticuleux, que de soins délicats et constants! Chaque mois le plus beau de ces palais de verre se remplit d’une collection choisie des fleurs du moment, c’est la collection des azalées, aux millions de fleurs variées, que nous avons vue dans tout son épanouissement. Je suis sortie absolument éblouie. Ce serait à vous donner envie d’être fleur et d’habiter ces serres là.

Je n’avais que le temps de visiter l’une ou l’autre des propriétés de Monsieur Mame.

En ces jours de chaleur j’ai préféré la campagne à la ville. Les produits de la nature l’ont emporté sur ceux de l’industrie, et cependant la belle imprimerie Mame fondée au commencement du siècle, et qui occupe plus de douze cents ouvriers, mérite bien qu’on la visite.

«La façade de cet établissement est un modèle de grâce, de convenance, d’harmonie, avec lequel rien de moderne ne saurait rivaliser à Tours.»

L’intérieur de ce grand établissement est aussi parfait que possible, tant au point de vue des machines, de la perfection du travail, que du bien-être des travailleurs.

On peut dire que Monsieur Mame est le père de ses douze cents ouvriers avant d’en être le maître, c’est le plus bel éloge qu’on puisse lui adresser.

En fait d’enclos, on visite encore dans un faubourg de Tours le château Beau Jardin, une jolie demeure plantée au milieu d’un parc, sorte de jardin zoologique haut muré. Tous les animaux non féroces de la création auraient le droit si on pouvait les y amener, d’y vivre en liberté.

Les emplumés très nombreux et de races variées picorent où bon leur semble; les quadrupèdes jouissent des mêmes privilèges; de belles vaches blanches vous voient passer sans perdre un coup de dent; les chevreuils bondissent près de vous, les gazelles viennent vous regarder de leurs grands yeux doux; une jolie chèvre de Mongolie suit vos pas; de graves lamas sont assis tranquillement sur les marches du perron et ne se dérangent pour personne.

On comprend qu’ils sont chez eux; tout ce monde vit à sa guise dans cet heureux paradis terrestre, pendant quelque temps du moins, car l’existence de ces nombreux hôtes n’est pas longue, paraît-il, malgré leur liberté relative et les soins dont ils sont l’objet. Une consolation, c’est de penser que ces pauvres victimes de la civilisation sont encore utilisés après décès; leur propriétaire les envoie généreusement enrichir le muséum d’histoire naturelle de Tours5.

Le temps qui ne replie jamais son aile, m’a entraînée dans son vol incertain et je n’ai pu visiter la magnifique poudrerie du Ripault (d’ailleurs cela eût été fort difficile), qui produit en moyenne cinq cent mille kilos de poudre par an, ni la colonie de Mettray fort intéressante.

Mettray est le type des colonies pénitentiaires agricoles en France et à l’étranger.

Ce passage d’une notice de Monsieur Augustin Cochin sur Mettray, suffit pour faire connaître et apprécier cette belle fondation.

«Pratique de la religion, amour du travail, esprit de famille, émulation de l’exemple, culte de l’honneur, habitude de la discipline, bon usage de la liberté; tout le système pénitentiaire, toute l’influence moralisatrice de Mettray sont dans ces grandes et simples idées.

«Une autre institution non moins importante que la première a été fondée dans la commune de Mettray sous le titre de Maison paternelle. Cet établissement n’est par le fait qu’un collège de répression où l’on reçoit les élèves indisciplinés des maisons d’éducation, et à la faveur duquel on évite le renvoi, parti extrême, qui compromettrait l’avenir de l’enfant, sans remédier au mal.

«Grâce à ces deux institutions, l’enfance pauvre délinquante, et l’enfance riche insubordonnée, se trouvent désormais soumises à une influence vraiment moralisatrice.»

Honneur aux fondateurs de ces excellentes institutions.

Tours, dont la fondation remonte fort loin, dont l’histoire est longue et compliquée, est actuellement une belle ville qui produit un très grand effet avec ses magnifiques ponts, ses nombreuses promenades, ses boulevards, ses avenues, celle de Grand-Mont particulièrement, ses rues larges aux maisons élégantes, aux magasins superbes.

Sa situation est charmante au milieu d’une plaine fertile qui s’étend entre la Loire et le Cher. La plupart des monuments qui l’embellissent sont modernes. Il ne reste de l’admirable basilique de Saint Martin, que deux clochers dont l’un porte le nom de Tour de l’horloge, et l’autre celui de Tour Charlemagne.

Le palais archiépiscopal est très remarquable aussi, la cathédrale l’est également. Saint Martin fut son fondateur. Détruite par un incendie en 561, Grégoire de Tours la reconstruisit en lui donnant de plus vastes proportions. Un second incendie la consuma à la fin du XIIe siècle. Cette fois sa réédification se poursuivit avec lenteur, elle ne fut achevée qu’en 1550. Le portail accompagné de deux tours fort élevées est orné au milieu d’une rosace de toute beauté. En fait d’objets d’art, elle ne contient guère que le tombeau des enfants de Charles VIII, en marbre blanc.

Elle présente cette particularité, que l’on rencontre dans beaucoup d’églises, principalement dans celles qui affectent la forme de la croix latine et qui consiste en une inclinaison très apparente du chevet vers la gauche, représentation symbolique de l’inclinaison de la tête de Notre-Seigneur Jésus-Christ sur la croix.

Ce soir même, je reprends le chemin de Bretagne, mes pérégrinations sont finies et… mes descriptions aussi; mais peut-être encourageront-elles mon cher fils à venir à son tour visiter le Jardin de la France, cette terre riche et souriante, cette belle Touraine, constellée de souvenirs… capitonnée de châteaux.

5.Depuis ma visite à Beaujardin, le propriétaire est mort; tous les animaux ont été vendus, et ce domaine a changé de maître et de destination.
Возрастное ограничение:
12+
Дата выхода на Литрес:
11 августа 2017
Объем:
300 стр. 1 иллюстрация
Правообладатель:
Public Domain

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