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Читать книгу: «Robinson Crusoe. I», страница 25

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OFFRES DE SERVICE

Je me glissai inapperçu aussi près qu'il me fut possible, et avant qu'aucun d'eux m'eût découvert, je leur criai en espagnol: – «Qui êtes-vous, gentlemen?»

Ils se levèrent à ce bruit; mais ils furent deux fois plus troublés quand ils me virent, moi et la figure rébarbative que je faisais. Ils restèrent muets et s'apprêtaient à s'enfuir, quand je leur adressai la parole en anglais: – Gentlemen, dis-je, ne soyez point surpris de ma venue; peut-être avez-vous auprès de vous un ami, bien que vous ne vous y attendissiez pas» – «Il faut alors qu'il soit envoyé du Ciel, me répondit l'un d'eux très-gravement, ôtant en même temps son chapeau, car notre condition passe tout secours humain.» – «Tout secours vient du Ciel, sir, répliquai-je. Mais ne pourriez-vous pas mettre un étranger à même de vous secourir, car vous semblez plongé dans quelque grand malheur? Je vous ai vu débarquer; et, lorsque vous sembliez faire une supplication à ces brutaux qui sont venus avec vous, – j'ai vu l'un d'eux lever son sabre pour vous tuer.»

Le pauvre homme, tremblant, la figure baignée de larmes, et dans l'ébahissement, s'écria: – «Parlé-je à un Dieu ou à un homme? En vérité, êtes-vous un homme ou un Ange?» – «Soyez sans crainte, sir, répondis-je; si Dieu avait envoyé un Ange pour vous secourir, il serait venu mieux vêtu et armé de toute autre façon que je ne suis. Je vous en prie, mettez de côté vos craintes, je suis un homme, un Anglais prêt à vous secourir; vous le voyez, j'ai seulement un serviteur, mais nous avons des armes et des munitions; dites franchement, pouvons-nous vous servir? Dites quelle est votre infortune?

– «Notre infortune, sir, serait trop longue à raconter tandis que nos assassins sont si proche. Mais bref, sir, je suis capitaine de ce vaisseau: mon équipage s'est mutiné contre moi, j'ai obtenu à grande peine qu'il ne me tuerait pas, et enfin d'être déposé au rivage, dans ce lieu désert, ainsi que ces deux hommes; l'un est mon second et l'autre un passager. Ici nous nous attendions à périr, croyant la place inhabitée, et nous ne savons que penser de cela.»

– «Où sont, lui dis-je, ces cruels, vos ennemis? savez-vous où ils sont allés?» – «Ils sont là, sir, répondit-il, montrant du doigt un fourré d'arbres; mon cœur tremble de crainte qu'ils ne nous aient vus et qu'ils ne vous aient entendu parler: si cela était, à coup sûr ils nous massacreraient touts.»

– «Ont-ils des armes à feu?» lui demandai-je. – «Deux mousquets seulement et un qu'ils ont laissé dans la chaloupe,» répondit-il. – . «Fort bien, dis-je, je me charge du reste; je vois qu'ils sont touts endormis, c'est chose facile que de les tuer touts. Mais ne vaudrait-il pas mieux les faire prisonniers?» – Il me dit alors que parmi eux il y avait deux désespérés coquins à qui il ne serait pas trop prudent de faire grâce; mais que, si on s'en assurait, il pensait que touts les autres retourneraient à leur devoir. Je lui demandai lesquels c'étaient. Il me dit qu'à cette distance il ne pouvait les indiquer, mais qu'il obéirait à mes ordres dans tout ce que je voudrais commander. – «Eh bien, dis-je, retirons-nous hors de leur vue et de leur portée d'entendre, de peur qu'ils ne s'éveillent, et nous délibérerons plus à fond.» – Puis volontiers ils s'éloignèrent avec moi jusqu'à ce que les bois nous eussent cachés.

– «Voyez, sir, lui dis-je, si j'entreprends votre délivrance, êtes-vous prêt à faire deux conditions avec moi?» Il prévint mes propositions en me déclarant que lui et son vaisseau, s'il le recouvrait, seraient en toutes choses entièrement dirigés et commandés par moi; et que, si le navire n'était point repris, il vivrait et mourrait avec moi dans quelque partie du monde que je voulusse le conduire; et les deux autres hommes protestèrent de même.

– «Eh bien, dis-je, mes deux conditions les voici:

«1º Tant que vous demeurerez dans cette île avec moi, vous ne prétendrez ici à aucune autorité. Si je vous confie des armes, vous en viderez vos mains quand bon me semblera. Vous ne ferez aucun préjudice ni à moi ni aux miens sur cette terre, et vous serez soumis à mes ordres;

«2º Si le navire est ou peut être recouvré, vous me transporterez gratuitement, moi et mon serviteur, en Angleterre.»

Il me donna toutes les assurances que l'imagination et la bonne foi humaines puissent inventer qu'il se soumettrait à ces demandes extrêmement raisonnables, et qu'en outre, comme il me devrait la vie, il le reconnaîtrait en toute occasion aussi long-temps qu'il vivrait.

– «Eh bien, dis-je alors, voici trois mousquets pour vous, avec de la poudre et des balles; dites-moi maintenant ce que vous pensez convenable de faire.» Il me témoigna toute la gratitude dont il était capable, mais il me demanda à se laisser entièrement guider par moi. Je lui dis que je croyais l'affaire très-chanceuse; que le meilleur parti, selon moi, était de faire feu sur eux tout d'un coup pendant qu'ils étaient couchés; que, si quelqu'un, échappant à notre première décharge, voulait se rendre, nous pourrions le sauver, et qu'ainsi nous laisserions à la providence de Dieu la direction de nos coups.

Il me répliqua, avec beaucoup de modération, qu'il lui fâchait de les tuer s'il pouvait faire autrement; mais que pour ces deux incorrigibles vauriens qui avaient été les auteurs de toute la mutinerie dans le bâtiment, s'ils échappaient nous serions perdus; car ils iraient à bord et ramèneraient tout l'équipage pour nous tuer. – «Cela étant, dis-je, la nécessité confirme mon avis: c'est le seul moyen de sauver notre vie.» – Cependant, lui voyant toujours de l'aversion pour répandre le sang, je lui dis de s'avancer avec ses compagnons et d'agir comme ils le jugeraient convenable.

Au milieu de cet entretien nous en entendîmes quelques-uns se réveiller, et bientôt après nous en vîmes deux sur pieds. Je demandai au capitaine s'ils étaient les chefs de la mutinerie; il me répondit que non. – «Eh bien! Laissez-les se retirer, la Providence semble les avoir éveillés à dessein de leur sauver la vie. Maintenant si les autres vous échappent, c'est votre faute.»

Animé par ces paroles, il prit à la main le mousquet que je lui avais donné, un pistolet à sa ceinture, et s'avança avec ses deux compagnons, armés également chacun d'un fusil. Marchant devant, ces deux hommes firent quelque bruit: un des matelots, qui s'était éveillé, se retourna, et les voyant venir, il se mit à appeler les autres; mais il était trop tard, car au moment où il cria ils firent feu, – j'entends les deux hommes, – le capitaine réservant prudemment son coup. Ils avaient si bien visé les meneurs, qu'ils connaissaient, que l'un d'eux fut tué sur la place, et l'autre grièvement blessé. N'étant point frappé à mort, il se dressa sur ses pieds, et appela vivement à son aide; mais le capitaine le joignit et lui dit qu'il était trop tard pour crier au secours, qu'il ferait mieux de demander à Dieu le pardon de son infamie; et à ces mots il lui asséna un coup de crosse qui lui coupa la parole à jamais. De cette troupe il en restait encore trois, dont l'un était légèrement blessé. J'arrivai en ce moment; et quand ils virent leur danger et qu'il serait inutile de faire de la résistance, ils implorèrent miséricorde. Le capitaine leur dit: – «Je vous accorderai la vie si vous voulez me donner quelque assurance que vous prenez en horreur la trahison dont vous vous êtes rendus coupables, et jurez de m'aider fidèlement à recouvrer le navire et à le ramener à la Jamaïque, d'où il vient.» – Ils lui firent toutes les protestations de sincérité qu'on pouvait désirer; et, comme il inclinait à les croire et à leur laisser la vie sauve, je n'allai point à l'encontre; je l'obligeai seulement à les garder pieds et mains liés tant qu'ils seraient dans l'île.

Sur ces entrefaites j'envoyai Vendredi et le second du capitaine vers la chaloupe, avec ordre de s'en assurer, et d'emporter les avirons et la voile; ce qu'ils firent. Aussitôt trois matelots rôdant, qui fort heureusement pour eux s'étaient écartés des autres, revinrent au bruit des mousquets; et, voyant leur capitaine, de leur prisonnier qu'il était, devenu leur vainqueur, ils consentirent à se laisser garrotter aussi; et notre victoire fut complète.

Il ne restait plus alors au capitaine et à moi qu'à nous ouvrir réciproquement sur notre position. Je commençai le premier, et lui contai mon histoire entière, qu'il écouta avec une attention qui allait jusqu'à l'ébahissement, surtout la manière merveilleuse dont j'avais été fourni de vivres et de munitions. Et au fait, comme mon histoire est un tissu de prodiges, elle fit sur lui une profonde impression. Puis, quand il en vint à réfléchir sur lui-même, et que je semblais avoir été préservé en ce lieu à dessein de lui sauver la vie, des larmes coulèrent sur sa face, et il ne put proférer une parole.

Après que cette conversation fut terminée je le conduisis lui et ses deux compagnons dans mon logis, où je les introduisis par mon issue, c'est-à-dire par le haut de la maison. Là, pour se rafraîchir, je leur offris les provisions que je me trouvais avoir, puis je leur montrai toutes les inventions dont je m'étais ingénié pendant mon long séjour, mon bien long séjour en ce lieu.

Tout ce que je leur faisais voir, tout ce que je leur disais excitait leur étonnement. Mais le capitaine admira surtout mes fortifications, et combien j'avais habilement masqué ma retraite par un fourré d'arbres. Il y avait alors près de vingt ans qu'il avait été planté; et, comme en ces régions la végétation est beaucoup plus prompte qu'en Angleterre, il était devenu une petite forêt si épaisse qu'elle était impénétrable de toutes parts, excepté d'un côté où je m'étais réservé un petit passage tortueux. Je lui dis que c'était là mon château et ma résidence, mais que j'avais aussi, comme la plupart des princes, une maison de plaisance à la campagne, où je pouvais me retirer dans l'occasion, et que je la lui montrerais une autre fois; mais que pour le présent notre affaire était de songer aux moyens de recouvrer le vaisseau. Il en convint avec moi, mais il m'avoua, qu'il ne savait vraiment quelles mesures prendre. – «Il y a encore à bord, dit-il, vingt-six hommes qui, ayant trempé dans une abominable conspiration, compromettant leur vie vis-à-vis de la loi, s'y opiniâtreront par désespoir et voudront pousser les choses à bout; car ils n'ignorent pas que s'ils étaient réduits ils seraient pendus en arrivant en Angleterre ou dans quelqu'une de ses colonies. Nous sommes en trop petit nombre pour nous permettre de les attaquer.»

Je réfléchis quelque temps sur cette objection, et j'en trouvai la conclusion très-raisonnable. Il s'agissait donc d'imaginer promptement quelque stratagème, aussi bien pour les faire tomber par surprise dans quelque piége, que pour les empêcher de faire une descente sur nous et de nous exterminer. Il me vint incontinent à l'esprit qu'avant peu les gens du navire, voulant savoir ce qu'étaient devenus leurs camarades et la chaloupe, viendraient assurément à terre dans leur autre embarcation pour les chercher, et qu'ils se présenteraient peut-être armés et en force trop supérieure pour nous. Le capitaine trouva ceci très-plausible.

Là-dessus je lui dis: – «La première chose que nous avons à faire est de nous assurer de la chaloupe qui gît sur la grève, de telle sorte qu'ils ne puissent la remmener; d'emporter tout ce qu'elle contient, et de la désemparer, si bien qu'elle soit hors d'état de voguer.» En conséquence nous allâmes à la barque; nous prîmes les armes qui étaient restées à bord, et aussi tout ce que nous y trouvâmes, c'est-à-dire une bouteille d'eau de vie et une autre de rum, quelques biscuits, une corne à poudre et un grandissime morceau de sucre dans une pièce de canevas: il y en avait bien cinq ou six livres. Tout ceci fut le bien-venu pour moi, surtout l'eau-de-vie et le sucre, dont je n'avais pas goûté depuis tant d'années.

TRANSLATION DES PRISONNIERS

Quand nous eûmes porté toutes ces choses à terre, – les rames, le mât, la voile et le gouvernail avaient été enlevés auparavant, comme je l'ai dit, – nous fîmes un grand trou au fond de la chaloupe, afin que, s'ils venaient en assez grand nombre pour nous vaincre, ils ne pussent toutefois la remmener.

À dire vrai, je ne me figurais guère que nous fussions capables de recouvrer le navire; mais j'avais mon but. Dans le cas où ils repartiraient sans la chaloupe, je ne doutais pas que je ne pusse la mettre en état de nous transporter aux Îles-sous-le-Vent et de recueillir en chemin nos amis les Espagnols; car ils étaient toujours présents à ma pensée.

Ayant à l'aide de nos forces réunies tiré la chaloupe si avant sur la grève, que la marée haute ne pût l'entraîner, ayant fait en outre un trou dans le fond, trop grand pour être promptement rebouché, nous nous étions assis pour songer à ce que nous avions à faire; et, tandis que nous concertions nos plans, nous entendîmes tirer un coup de canon, puis nous vîmes le navire faire avec son pavillon comme un signal pour rappeler la chaloupe à bord; mais la chaloupe ne bougea pas, et il se remit de plus belle à tirer et à lui adresser des signaux.

À la fin, quand il s'apperçut que ses signaux et ses coups de canon n'aboutissaient à rien et que la chaloupe ne se montrait pas, nous le vîmes, – à l'aide de mes longues-vues, – mettre à la mer une autre embarcation qui nagea vers le rivage; et tandis qu'elle s'approchait nous reconnûmes qu'elle n'était pas montée par moins de dix hommes, munis d'armes à feu.

Comme le navire mouillait à peu près à deux lieues du rivage, nous eûmes tout le loisir, durant le trajet, d'examiner l'embarcation, ses hommes d'équipage et même leurs figures; parce que, la marée les ayant fait dériver un peu à l'Est de l'autre chaloupe, ils longèrent le rivage pour venir à la même place où elle avait abordé et où elle était gisante.

De cette façon, dis-je, nous eûmes tout le loisir de les examiner. Le capitaine connaissait la physionomie et le caractère de touts les hommes qui se trouvaient dans l'embarcation; il m'assura qu'il y avait parmi eux trois honnêtes garçons, qui, dominés et effrayés, avaient été assurément entraînés dans le complot par les autres.

Mais quant au maître d'équipage, qui semblait être le principal officier, et quant à tout le reste, ils étaient aussi dangereux que qui que ce fût du bâtiment, et devaient sans aucun doute agir en désespérés dans leur nouvelle entreprise. Enfin il redoutait véhémentement qu'ils ne fussent trop forts pour nous.

Je me pris à sourire, et lui dis que des gens dans notre position étaient au-dessus de la crainte; que, puisque à peu près toutes les conditions possibles étaient meilleures que celle où nous semblions être, nous devions accueillir toute conséquence résultante, soit vie ou mort, comme un affranchissement. Je lui demandai ce qu'il pensait des circonstances de ma vie, et si ma délivrance n'était pas chose digne d'être tentée. – «Et qu'est devenue, sir, continuai-je, votre créance que j'avais été conservé ici à dessein de vous sauver la vie, créance qui vous avait exalté il y a peu de temps? Pour ma part, je ne vois qu'une chose malencontreuse dans toute cette affaire.» – «Eh quelle est-elle?» dit-il. – «C'est, répondis-je, qu'il y a parmi ces gens, comme vous l'avez dit, trois ou quatre honnêtes garçons qu'il faudrait épargner. S'ils avaient été touts le rebut de l'équipage, j'aurais cru que la providence de Dieu les avait séparés pour les livrer entre nos mains; car faites fond là-dessus: tout homme qui mettra le pied sur le rivage sera nôtre, et vivra ou mourra suivant qu'il agira envers nous.»

Ces paroles, prononcées d'une voix ferme et d'un air enjoué, lui redonnèrent du courage, et nous nous mîmes vigoureusement à notre besogne. Dès la première apparence d'une embarcation venant du navire, nous avions songé à écarter nos prisonniers, et, au fait, nous nous en étions parfaitement assurés.

Il y en avait deux dont le capitaine était moins sûr que des autres: je les fis conduire par Vendredi et un des trois hommes délivrés à ma caverne, où ils étaient assez éloignés et hors de toute possibilité d'être entendus ou découverts, ou de trouver leur chemin pour sortir des bois s'ils parvenaient à se débarrasser eux-mêmes. Là ils les laissèrent garrottés, mais ils leur donnèrent quelques provisions, et leur promirent que, s'ils y demeuraient tranquillement, on leur rendrait leur liberté dans un jour ou deux; mais que, s'ils tentaient de s'échapper, ils seraient mis à mort sans miséricorde. Ils protestèrent sincèrement qu'ils supporteraient leur emprisonnement avec patience, et parurent très-reconnaissants de ce qu'on les traitait si bien, qu'ils avaient des provisions et de la lumière; car Vendredi leur avait donné pour leur bien-être quelques-unes de ces chandelles que nous faisions nous-mêmes. – Ils avaient la persuasion qu'il se tiendrait en sentinelle à l'entrée de la caverne.

Les autres prisonniers étaient mieux traités: deux d'entre eux, à la vérité, avaient les bras liés, parce que le capitaine n'osait pas trop s'y fier; mais les deux autres avaient été pris à mon service, sur la recommandation du capitaine et sur leur promesse solemnelle de vivre et de mourir avec nous. Ainsi, y compris ceux-ci et les trois braves garçons, nous étions sept hommes bien armés; et je ne mettais pas en doute que nous ne pussions venir à bout des dix arrivants, considérant surtout ce que le capitaine avait dit, qu'il y avait trois ou quatre honnêtes hommes parmi eux.

Aussitôt qu'ils atteignirent à l'endroit où gisait leur autre embarcation, ils poussèrent la leur sur la grève et mirent pied à terre en la hâlant après eux; ce qui me fit grand plaisir à voir: car j'avais craint qu'ils ne la laissassent à l'ancre, à quelque distance du rivage, avec du monde dedans pour la garder, et qu'ainsi il nous fût impossible de nous en emparer.

Une fois à terre, la première chose qu'ils firent, ce fut de courir touts à l'autre embarcation; et il fut aisé de voir qu'ils tombèrent dans une grande surprise en la trouvant dépouillée, – comme il a été dit, – de tout ce qui s'y trouvait et avec un grand trou dans le fond.

Après avoir pendant quelque temps réfléchi sur cela, ils poussèrent de toutes leurs forces deux ou trois grands cris pour essayer s'ils ne pourraient point se faire entendre de leurs compagnons; mais c'était peine inutile. Alors ils se serrèrent touts en cercle et firent une salve de mousqueterie; nous l'entendîmes, il est vrai les échos en firent retentir les bois, mais ce fut tout. Les prisonniers qui étaient dans la caverne, nous en étions sûrs, ne pouvaient entendre, et ceux en notre garde, quoiqu'ils entendissent très-bien, n'avaient pas toutefois la hardiesse de répondre.

Ils furent si étonnés et si atterrés de ce silence, qu'ils résolurent, comme ils nous le dirent plus tard, de se rembarquer pour retourner vers le navire, et de raconter que leurs camarades avaient été massacrés et leur chaloupe défoncée. En conséquence ils lancèrent immédiatement leur esquif et remontèrent touts à bord.

À cette vue le capitaine fut terriblement surpris et même stupéfié; il pensait qu'ils allaient rejoindre le navire et mettre à la voile, regardant leurs compagnons comme perdus; et qu'ainsi il lui fallait décidément perdre son navire, qu'il avait eu l'espérance de recouvrer. Mais il eut bientôt une tout autre raison de se déconcerter.

À peine s'étaient-ils éloignés que nous les vîmes revenir au rivage mais avec de nouvelles mesures de conduite, sur lesquelles sans doute ils avaient délibéré, c'est-à-dire qu'ils laissèrent trois hommes dans l'embarcation, et que les autres descendirent à terre et s'enfoncèrent dans le pays pour chercher leurs compagnons.

Ce fut un grand désappointement pour nous, et nous en étions à ne savoir que faire; car nous saisir des sept hommes qui se trouvaient à terre ne serait d'aucun avantage si nous laissions échapper le bateau; parce qu'il regagnerait le navire, et qu'alors à coup sûr le reste de l'équipage lèverait l'ancre et mettrait à la voile, de sorte que nous perdrions le bâtiment sans retour.

Cependant il n'y avait d'autre remède que d'attendre et de voir ce qu'offrirait l'issue des choses. – Après que les sept hommes furent descendus à terre, les trois hommes restés dans l'esquif remontèrent à une bonne distance du rivage, et mirent à l'ancre pour les attendre. Ainsi il nous était impossible de parvenir jusqu'à eux.

Ceux qui avaient mis pied à terre se tenaient serrés touts ensemble et marchaient vers le sommet de la petite éminence au-dessous de laquelle était située mon habitation, et nous les pouvions voir parfaitement sans en être apperçus. Nous aurions été enchantés qu'ils vinssent plus près de nous, afin de faire feu dessus, ou bien qu'ils s'éloignassent davantage pour que nous pussions nous-mêmes nous débusquer.

Quand ils furent parvenus sur le versant de la colline d'où ils pouvaient planer au loin sur les vallées et les bois qui s'étendaient au Nord-Ouest, dans la partie la plus basse de l'île, ils se mirent à appeler et à crier jusqu'à n'en pouvoir plus. Là, n'osant pas sans doute s'aventurer loin du rivage, ni s'éloigner l'un de l'autre, ils s'assirent touts ensemble sous un arbre pour délibérer. S'ils avaient trouvé bon d'aller là pour s'y endormir, comme avait fait la première bande, c'eût été notre affaire; mais ils étaient trop remplis de l'appréhension du danger pour s'abandonner au sommeil, bien qu'assurément ils ne pussent se rendre compte de l'espèce de péril qu'ils avaient à craindre.

Le capitaine fit une ouverture fort sage au sujet de leur délibération. – «Ils vont peut-être, disait-il, faire une nouvelle salve générale pour tâcher de se faire entendre de leurs compagnons; fondons touts sur eux juste au moment où leurs mousquets seront déchargés; à coup sûr ils demanderont quartier, et nous nous en rendrons maîtres sans effusion de sang.» – J'approuvai cette proposition, pourvu qu'elle fût exécutée lorsque nous serions assez près d'eux pour les assaillir avant qu'ils eussent pu recharger leurs armes.

Mais le cas prévu n'advint, pas, et nous demeurâmes encore long-temps fort irrésolus sur le parti à prendre. Enfin je dis à mon monde que mon opinion était qu'il n'y avait rien à faire avant la nuit; qu'alors, s'ils n'étaient pas retournés à leur embarcation, nous pourrions peut-être trouver moyen de nous jeter entre eux et le rivage, et quelque stratagème pour attirer à terre ceux restés dans l'esquif.

Nous avions attendu fort long-temps, quoique très-impatients de les voir s'éloigner et fort mal à notre aise, quand, après d'interminables consultations, nous les vîmes touts se lever et descendre vers la mer. Il paraît que de si terribles appréhensions du danger de cette place pesaient sur eux, qu'ils avaient résolu de regagner le navire, pour annoncer à bord la perte de leurs compagnons, et poursuivre leur voyage projeté.

Sitôt que je les apperçus se diriger vers le rivage, j'imaginai, – et cela était réellement, – qu'ils renonçaient à leurs recherches et se décidaient à s'en retourner. À cette seule appréhension le capitaine, à qui j'avais communiqué cette pensée, fut près de tomber en défaillance; mais, sur-le-champ, pour les faire revenir sur leurs pas, je m'avisai d'un stratagème qui répondit complètement à mon but.

J'ordonnai à Vendredi et au second du capitaine d'aller de l'autre côté de la crique à l'Ouest, vers l'endroit où étaient parvenus les Sauvages lorsque je sauvai Vendredi; sitôt qu'ils seraient arrivés à une petite butte distante d'un demi-mille environ, je leur recommandai de crier aussi fort qu'ils pourraient, et d'attendre jusqu'à ce que les matelots les eussent entendus; puis, dès que les matelots leur auraient répondu, de rebrousser chemin, et alors, se tenant hors de vue, répondant toujours quand les autres appelleraient, de prendre un détour pour les attirer au milieu des bois, aussi avant dans l'île que possible; puis enfin de revenir vers moi par certaines routes que je leur indiquai.

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12+
Дата выхода на Литрес:
28 сентября 2017
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