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Читать книгу: «Des homicides commis par les aliénés», страница 7

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TENTATIVE DE MEURTRE PAR UN JEUNE HOMME ÂGÉ DE MOINS DE 16 ANS SUR SON FRÈRE CADET, AVEC PRÉMÉDITATION ET GUET-APENS. – HÉRÉDITÉ. – MALFORMATION CÉRÉBRALE CONGÉNITALE. – ÉDUCATION DÉFECTUEUSE. – RESPONSABILITÉ LIMITÉE

Nous, médecins soussignés, commis par ordonnance de M. A. Guillot, juge d'instruction près le Tribunal de la Seine, en date du 7 mai 1877, à l'effet d'examiner au point de vue de l'état mental le nommé J… Louis, inculpé de tentative d'homicide avec préméditation et guet-apens sur la personne de son frère, après avoir prêté serment, avoir souvent et longuement visité l'inculpé à la Petite-Roquette, avoir recueilli des renseignements sur ses antécédents personnels et de famille, et avoir lu attentivement toutes les pièces du dossier, avons consigné le résultat de notre examen et de nos investigations dans le présent rapport:

J… Louis, né le 16 septembre 1861, apprenti potier d'étain, est d'une famille où se sont produits des cas nombreux d'aliénation mentale et d'affections cérébrales. Sa grand'mère maternelle est morte aliénée à la Salpêtrière; une tante maternelle aliénée, placée à l'asile de M… s'est pendue; un oncle maternel a été atteint, l'année dernière, d'un accès de mélancolie suicide pour lequel il a été sur le point d'être traité dans une maison de santé spéciale; un frère de Louis J… est mort récemment d'une méningite tuberculeuse; son autre frère, Alexandre, celui qui a été frappé, a été atteint à l'âge de 3 ans 1/2 d'accidents cérébraux graves avec convulsions, à la suite desquels il est resté affecté de surdité; cette infirmité l'a rendu très-irritable; n'entendant que difficilement et incomplètement, il s'imagine qu'on se moque de lui.

La mère de Louis J… est une femme douce, d'un caractère facile, mais peu intelligente; c'est une tête faible, et à la suite de la mort de son jeune enfant, on a craint qu'elle ne perdît la raison.

Le père, brave et honnête homme, est un type de soldat; gardien de la paix depuis longtemps, il jouit de l'estime de ses chefs, mais dans les dernières années il a donné des signes de fatigue, et en récompense de sa bonne conduite, on le conserve dans un emploi qui est presque une sinécure.

Louis J… n'a pas eu une enfance particulièrement maladive; grêle et d'une constitution débile, il porte des signes de malformations congénitales. Sa tête est asymétrique; les deux bosses frontales ne sont pas égales, la ligne médiane de la voûte palatine est déviée, la face participe à cette déviation.

On le représente généralement comme d'un caractère triste et sombre, quoique serviable et affectueux; ses parents n'ont jamais eu à lui faire de reproches graves; une seule fois, il s'est enivré, et comme on l'en réprimandait vertement, il s'est sauvé de la maison, en criant qu'il n'y reviendrait plus. Plein d'attentions pour sa mère, respectueux vis-à-vis de son père, soigneux des intérêts de son patron, assidu et très-exact à sa besogne, il menait une existence correcte sous les yeux de ses parents.

Bien que ses rapports avec son frère fussent en apparence satisfaisants, il s'élevait de fréquentes querelles entre eux, surtout à l'atelier; la provocation venait souvent du plus jeune, et même, dans une circonstance récente, celui-ci avait blessé son frère aîné d'un coup de pelle à la tête. Louis abusait aussi parfois de la supériorité de sa force physique contre son frère cadet. Une certaine animosité latente semble s'être développée sourdement, peut-être sans que ni l'un ni l'autre en eût conscience. Le plus jeune, et aussi le plus faible, se vengeait par des injures et des provocations des coups qu'il avait reçus; il appelait son frère des noms d'assassins fameux; il n'est pas impossible que celui-ci ait puisé dans les souvenirs que ces noms lui rappelaient une incitation à l'acte qu'il a commis.

Les parents aimaient également leurs enfants, et s'il y avait eu une nuance de prédilection, c'eût été en faveur de Louis.

Les deux frères allaient de temps en temps au spectacle; ils ont assisté à la plupart des drames à sensation; ils lisaient aussi des romans, le cadet plus que l'aîné; le dossier renferme des couvertures de publications illustrées trouvées chez eux, et représentant des scènes de rixe et de meurtre. Ils couchaient dans le même lit, travaillaient chez le même patron; allant et revenant ensemble; toutefois, il arrivait que Louis partait le premier le matin, et se rendait seul à l'atelier; c'est ce qui eut lieu le 5 mai.

La veille, on les avait vus se disputer et se battre dans la cour de la maison où ils travaillaient; Louis, en sa qualité d'ancien, avait été investi d'une certaine autorité sur les autres apprentis; peut-être n'exerçait-il pas avec assez de ménagements son semblant de pouvoir, et son frère n'était pas plus épargné que les autres. Cependant, le soir, chez leurs parents, on ne s'aperçut de rien, et la nuit se passa sans discussions. Ces circonstances préliminaires ont leur valeur, et il importait de les énoncer.

Le 5 mai, Louis part seul, comme nous l'avons dit, pour l'atelier; en y arrivant, il aiguise son couteau. Alexandre vient un peu plus tard et lui demande pourquoi il repasse son couteau; c'est parce qu'il ne coupe pas, répond Louis.

Alexandre descend à la cave, suivant son habitude de chaque matin. Quelques instants après, son frère l'y rejoint et se cache derrière un pilier. Quand Alexandre passe à côté de lui avec un seau de charbon à la main, il se précipite sur lui, sans querelle, sans provocation préalable, et le frappe quatre fois de son couteau; puis il remonte promptement, et rencontrant un ouvrier qui accourait aux cris du blessé, il lui dit d'un ton tranquille qu'il allait chercher le pharmacien.

Il erre toute la journée dans les rues de Paris et dans le jardin du Luxembourg, et vers 5 heures il est arrêté, sans opposer aucune résistance.

Interrogé dans la soirée par M. le Juge d'Instruction, Louis récrimine d'abord contre son frère, prétendant que celui-ci lui «a fait des misères, qu'il l'accuse à faux, qu'il n'est pas vrai qu'il ait aiguisé son couteau, que son frère l'a vu dans la cave, qu'ils y ont causé ensemble, qu'Alexandre l'a appelé vieux cochon et vieux chameau, que c'est alors qu'il l'a frappé, puis d'un ton irrité, il ajoute: Que voulez-vous que je vous dise? Vous prétendez que je fais des mensonges; tout ce que dira mon frère sera la vérité, si vous voulez; qu'avant de mourir, il me charge tant qu'il vous plaira.» Puis conduit à l'Hôtel-Dieu, et confronté avec son frère qui semble être sur le point de rendre le dernier soupir, il change d'attitude, fléchit sur ses jambes, s'arrache les cheveux, et montre le plus grand désespoir; il sa penche vers son frère, l'appelant, lui demandant pardon; Alexandre se soulève avec peine, lui répond d'une voix faible qu'il lui pardonne, et retombe épuisé. Louis est emmené dans le cabinet du Directeur de l'Hôtel-Dieu, et là, avec des cris, des sanglots, et des mouvements convulsifs, il rétracte ses précédentes déclarations, et dit: «Tout ce que je vous ai dit tout à l'heure est faux; mon frère ne m'a pas provoqué; c'est bien pour le frapper que j'ai repassé mon couteau. Papa, papa! Oh! mon Dieu, pardon, Alexandre; laisse moi t'embrasser, Alexandre, Alexandre, il ne me répond pas, il est mort! Ah! il m'avait fait des misères, mais pas assez pour le faire mourir; non, pas assez; j'ai eu tort, moi tout seul, moi tout seul. Assassin, assassin. J'ai tué mon frère; Oh papa, il ne répondra jamais. A-lex-an-dre! qui ne m'a pas embrassé, puisqu'il va mourir, vous me l'avez dit. Caïn! Caïn a tué son frère, moi, je lui ai donné quatre coups de couteau.»

Puis, se tournant vers un des assistants: «C'est mon père, je le vois, mon père, mon père; ton fils, ton fils, vois-tu, c'est un assassin; et c'était demain l'anniversaire de la mort de mon petit frère. Je lui avais acheté une couronne pour la déposer sur sa tombe, et je n'irai pas; je serai à la Roquette, dans un noir cachot. Oui, à la Ro-quet-te.

«Le meurtrier frappe sa victime au grand jour, mais moi, misérable, le fils d'un honnête homme, j'ai frappé dans l'ombre, par jalousie, oui, par jalousie.

«Oh! Alexandre, mais laissez-moi l'embrasser, il est là dans la cave obscure; je l'attends, je lui plonge mon couteau quatre fois, oui, quatre fois; je me sauve comme Caïn, et je dis que je vais chez le pharmacien parce que mon frère s'est fait mal; ce n'était pas vrai, je l'avais tué.

«Meurtrier de ton frère! tu vas mourir; Alexandre, je te vengerai, et je saurai mourir; mon père n'aura plus d'enfants.»

Cette scène, péniblement dramatique, se prolonge plus d'une heure, et M. le Juge d'Instruction remarque que si, par intervalles, Louis paraît sincère dans l'expression de sa douleur, dans d'autres moments son débit emphatique et déclamatoire rappelle celui d'un acteur récitant une scène de mélodrame. Il se demande si Louis ne cherche pas à cacher son indifférence sous des phrases sonores et des exclamations théâtrales. L'interne de garde est mandé, et constate que l'inculpé a le pouls calme, qu'il est parfaitement lucide, quoique sous l'influence d'une surexcitation nerveuse.

Ajoutons que ramené au Dépôt, à la suite de cette scène, Louis était redevenu lui-même, et que le lendemain il demandait des livres et un jeu de cartes. Dix jours après, confronté avec son père, Louis déclare que «son frère était méchant, qu'il le taquinait, parce qu'étant sourd, il croyait toujours qu'on disait du mal de lui; il assure que l'idée lui est venue de le frapper le matin quand il a repassé son couteau, qu'il a hésité, qu'enfin il s'y est décidé, qu'il a été satisfait au moment où il a porté le premier coup, qu'ensuite il a frappé sans savoir ce qu'il faisait, qu'aujourd'hui il en a bien du regret, qu'il mérite le nom de Billoir que son frère lui donnait; il s'agenouille, pleure et demande pardon.»

Dans nos entrevues répétées nous avons trouvé le prévenu, enfantin, obéissant pendant le cours de la visite à des impressions mobiles et contradictoires, tantôt déprimé, tantôt excitable, récriminant ou témoignant de son repentir. Il était facile de faire varier ses dispositions apparentes sans qu'on pût discerner s'il obéissait à un sentiment vrai, ou s'il cédait à l'arrière pensée d'intéresser ses interlocuteurs.

J… comprenait au mieux les questions, ses réponses timidement articulées témoignaient de la réserve défiante qu'on constate si souvent chez les enfants. On comprend combien sont limités les interrogatoires qui s'adressent à un jeune sujet dont l'intelligence ne dépasse pas un étroit questionnaire.

Une fois que nous étions partis, J… reprenait son indifférence et sa sérénité, revenant à ses goûts de jeu et à ses distractions favorites. Les surveillants ne se plaignaient ni de son obéissance, ni de sa conduite, mais il n'éveillait en eux aucune sympathie. De fait, on avait peine, en causant avec lui, à se fier à la sincérité de ses regrets ou de ses larmes; si peu favorable que fût notre impression, et tout en découvrant le dessous d'une nature vicieuse, nous ne pouvions nous dissimuler les chances d'erreur, ni méconnaître les signes d'infériorité cérébrale, accusés à la fois par les antécédents héréditaires et par les malformations évidentes de la face et du crâne.

Ces défectuosités, visibles et palpables, s'imposent au médecin, sans effort d'interprétation, et sont d'une valeur irrécusable. Leur existence ne permettrait pas d'affirmer que des troubles nerveux se produiront fatalement, encore moins d'en prévoir la nature; mais quand un fait inattendu, ou une perversion étrange vient éveiller l'attention, on doit scientifiquement en tenir compte.

Les déformations crâniennes représentent un mode de transmission héréditaire tout particulier. Les ascendants n'ont pas transmis une maladie définie, analogue à celles dont ils pouvaient être atteints, mais ils ont donné le jour à une progéniture dégénérée, inférieure, dépourvue d'équilibre nerveux, capable des pires entraînements, sans aboutir forcément à la folie confirmée. Impulsifs ou instinctifs, ces infirmes de naissance viennent au monde avec des aptitudes pathologiques tantôt durables, tantôt passagères, qui échappent aussi bien à la prévision qu'au classement, et qui ne s'accommodent pas aux lois plus stables des maladies. J… rentre dans un de ces types. Peut-être s'il n'avait pas été provoqué par les injures de son frère, peut-être même s'il n'avait pas été troublé profondément par la mort de son frère le plus jeune, qui paraît lui avoir causé une excessive émotion, ces appétits de violence n'auraient-ils pas fait explosion. Il fallait à la prédisposition dont témoignent et la conformation vicieuse et l'hérédité, l'appoint d'une excitation vive.

Dans ces conditions qui ne sont rien moins qu'exceptionnelles, la question de responsabilité prend une face toute spéciale. Il ne s'agit pas d'un aliéné commandé par des conceptions délirantes invincibles, mais d'un demi-malade entraîné par des idées passionnées auxquelles il ne sait opposer qu'une résistance insuffisante, faute d'une conformation organique égale à celle des autres hommes.

J… a certainement prémédité l'agression, certainement il n'a pas subi une de ces impulsions instantanées que la réflexion n'a le temps ni de corriger ni même d'amoindrir; il pouvait se défendre dans une certaine mesure, et il ne l'a pas fait.

La responsabilité de ses actes ne peut lui être enlevée, mais il nous semble qu'elle n'est pas entière et que les antécédents que nous avons exposés la diminuent notablement.

Depuis qu'il est soumis au régime de la maison de détention correctionnelle, J… paraît s'être amélioré physiquement et même moralement. On est en droit d'espérer que sous l'influence d'une discipline ferme et éclairée, continuée jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de 21 ans, J… peut gagner encore, l'infériorité de conformation dont on constate chez lui l'existence étant de celles qui s'atténuent par le fait d'une évolution soigneusement et habilement dirigée.

À Paris, le 25 juillet 1877,

CH. LASÈGUE, É. BLANCHE.

Ce qu'il y a de remarquable et d'instructif dans cette affaire, c'est l'influence de l'hérédité et des malformations cérébrales congénitales sur le degré de résistance aux mauvaises tentations.

J… compte plusieurs aliénés parmi ses ascendants; sa mère est une faible d'esprit; son père est atteint d'un affaiblissement intellectuel prématuré; le frère qu'il a frappé est resté sourd à la suite d'accidents cérébraux graves avec convulsions dans sa première enfance; un autre frère est mort d'une méningite; lui-même a la tête asymétrique, et la face déviée ainsi que la scissure de la voûte palatine.

Les parents de J… qui sont d'ailleurs de très-braves gens, n'ont pas veillé avec une sollicitude éclairée sur l'éducation de leurs enfants. Les deux frères J… ont lu beaucoup de mauvais romans ornés d'images représentant principalement des scènes de meurtre; ils allaient aux théâtres de drames, et ils avaient l'imagination farcie d'aventures romanesques et sanglantes. Le cadet, rendu soupçonneux par sa surdité, était susceptible et taquin; l'aîné abusait souvent avec lui de sa force physique, ce dont le cadet se vengeait en appelant son frère des noms d'assassins fameux; de là des luttes fréquentes qui ne dépassaient pas la limite des coups que l'on échange entre camarades, mais qui avaient fini par altérer les sentiments d'affection réciproque des deux frères.

Les choses en seraient peut-être restées à ce point si J… n'avait éprouvé une commotion très-violente de la mort de son jeune frère; depuis cet événement on avait remarqué un changement dans son humeur, et son système nerveux avait certainement subi un profond ébranlement.

C'est dans cet ensemble de conditions que s'est produite la tentative de meurtre.

Le fait accompli, J… n'en a d'abord qu'une conscience vague; il fuit, et erre toute la journée; vers le soir, il se laisse arrêter; il commence par chercher à se disculper en rejetant la faute sur les provocations incessantes de son frère; son langage trahit encore la colère et la haine; puis, confronté avec son frère qui semble menacé d'une mort prochaine, ses sentiments naturels se réveillent, il éclate en sanglots et en transports de désespoir; quelques instants après il redevient absolument calme et mange de bon appétit.

En somme, antécédents héréditaires fâcheux, vices congénitaux de conformation; pas d'actes qui excèdent la moyenne de ceux auxquels se livrent les enfants vicieux. Grande perturbation attribuée au chagrin que lui cause la mort de son frère, excitation cérébrale croissante caractérisée par de l'agitation, de l'irritabilité, des inégalités plus saillantes de caractère. Tentative de meurtre. La crise passée, retour à l'état habituel; l'appoint de l'excitation cérébrale a seul disparu, mais rien n'est changé au fond de la nature, et dans nos nombreuses entrevues avec J… nous avons toujours été frappés de son accent peu sincère et de son égoïsme, qu'il ne réussissait pas à dissimuler sous des expressions d'affection pour ses parents et de repentir.

Toutefois, nous avions constaté que les soins physiques et moraux dont il était l'objet dans la maison des jeunes détenus avaient sur lui une influence favorable, et en lui attribuant une responsabilité limitée, nous avions demandé qu'il fût maintenu jusqu'à sa majorité sous le régime correctionnel.

Le jury l'a acquitté, et J… a été rendu à sa famille.

HÉRÉDITÉ. – ÉPILEPSIE. – ALCOOLISME. – TENTATIVES DE SUICIDE. – VOL. – TENTATIVES D'HOMICIDE. – RESPONSABILITÉ ATTÉNUÉE

G… âgé de 45 ans, marié, est fils d'un père aliéné et d'une mère morte d'apoplexie cérébrale. Un de ses enfants est épileptique, et un de ses neveux s'est brûlé la cervelle. G… est atteint d'épilepsie; il a eu la première attaque à l'âge de 15 ans; une seconde survint peu de temps après, et depuis, elles se sont reproduites 12 fois, avec des intervalles de deux, trois et quatre années. G… a fait deux tentatives sérieuses de suicide; l'une en 1852 et l'autre en 1875.

Au mois de janvier 1877, il a eu un accès d'alcoolisme aigu dont il a été traité à l'asile de Ville-Évrard.

Engagé volontaire, d'abord dans la marine, puis dans l'armée de terre, il a été grièvement blessé devant Sébastopol. Mis à la retraite, il a reçu la médaille militaire.

Depuis, son existence a été des plus désordonnées: successivement inspecteur de commissariat de police, garde-champêtre, représentant de commerce, employé dans diverses administrations publiques, expéditionnaire dans une étude de notaire, planton à la Banque de France, il ne peut conserver aucune position, tantôt révoqué, tantôt démissionnaire, et enfin il en est réduit à sa pension militaire.

Marié deux fois, séparé judiciairement de sa femme qu'il avait abandonnée avec cinq enfants, il rencontre une fille B… pour laquelle il conçoit une violente passion, dont il a un enfant, et qu'il rend si malheureuse qu'elle rompt avec lui; il la poursuit de ses instances, mais sans réussir à la ramener. Exaspéré, il la menace de l'assassiner.

Sans emploi, presque dénué de ressources, ne vivant que d'expédients et d'emprunts, le plus souvent ivre, il commet un vol. Pris de remords, il ne voit pour lui de refuge que dans la mort; il achète un couteau, bien décidé, dit-il, à en finir avec une vie qui lui est insupportable.

Toutefois, avant de mourir, il veut avoir une dernière entrevue avec sa maîtresse; il lui écrit pour la supplier de le recevoir, et dans sa lettre, après l'avoir rassurée sur ses intentions à son égard, il lui avoue le vol qu'il a commis, et lui annonce sa résolution de se tuer.

La fille B… terrifiée par les menaces de son amant et incrédule à ses promesses, le dénonce à la police comme un voleur, et demande à être protégée contre ses poursuites.

G… la guette, et au moment où elle sort de chez elle, il s'approche pour lui parler, et est arrêté; les agents les emmènent tous deux, et presqu'aussitôt G… frappe la fille B… d'un coup de couteau.

Quand je le visite à Mazas, G… est calme et lucide; il ne cherche pas à se disculper des actes qu'il a commis, en les attribuant à un trouble de raison; il me déclare qu'il savait parfaitement ce qu'il faisait quand il à volé, et quand il a frappé la fille B… il s'est laissé emporter par l'indignation d'être trahi par une femme qu'il aimait passionnément, et qui pour se débarrasser de lui l'avait livré à la justice. Il se reconnaît coupable et ne demande que de l'indulgence.

Cette observation est intéressante en ce qu'on y trouve réunis l'hérédité, l'épilepsie, l'alcoolisme, deux tentatives de suicide, et comme crise finale, une tentative d'homicide, et qu'on peut y suivre les effets de ces diverses influences et l'intensité de plus en plus marquée des impulsions auxquelles G… a successivement cédé, sans perdre toutefois conscience de ses actes.

C'est d'abord une grande inconsistance d'esprit, l'inaptitude à des occupations régulières, un besoin immodéré de mouvement.

Dans une seconde période, des passions violentes, une existence aventureuse, des excès de boisson, le dénûment, la misère, des accès de désespoir, des tentatives de suicide; puis, une troisième période dans laquelle on trouve d'abord une impulsion au vol que rien dans les antécédents de G… ne pouvait faire prévoir, et enfin, l'impulsion qui détermine une tentative d'homicide.

Ainsi a vécu, ainsi a agi G…

D'une constitution cérébrale originellement défectueuse, épileptique, ivrogne, il était prédisposé aux impulsions contre lesquelles ses facultés mal équilibrées ne lui donnaient pas une force normale de résistance, mais, sauf un accès court de délire alcoolique, il n'a pas présenté de véritables troubles de la raison; ce n'est pas un aliéné. Il reconnaît d'ailleurs que dans les actes dont il est inculpé il savait ce qu'il faisait.

Il n'y avait donc pas lieu à le considérer comme irresponsable, et je n'ai demandé pour lui qu'une atténuation de responsabilité, en me fondant sur ses antécédents héréditaires et sur la névrose dont il est atteint.

G… a été condamné à dix ans de réclusion.

Возрастное ограничение:
12+
Дата выхода на Литрес:
25 июня 2017
Объем:
190 стр. 1 иллюстрация
Правообладатель:
Public Domain

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