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Читать книгу: «Des homicides commis par les aliénés», страница 6

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AFFECTION CÉRÉBRALE GRAVE DANS LA PREMIÈRE ENFANCE. – BIZARRERIES. – IDÉES D'EMPOISONNEMENT ET DE PERSÉCUTION. – ACCÈS D'INTENSITÉ DIFFÉRENTE SÉPARÉS PAR DES INTERVALLES DE LUCIDITÉ PRESQUE ABSOLUE. – CRISE ABOUTISSANT À UN MEURTRE. – RESPONSABILITÉ ATTÉNUÉE

M. le Dr Lasègue et moi, nous avons été commis, par ordonnance de M. E. Saffers, juge d'instruction près le Tribunal de première instance de la Seine, en date du 18 mai 1877, a l'effet de constater l'état mental du nommé C… Jules, âgé de 41 ans, inculpé d'avoir volontairement commis un homicide sur la personne de la veuve C… sa mère légitime.

Voici d'abord l'acte d'accusation, qui donne des faits un résumé succinct, mais complet:

La dame C… est devenue veuve en 1857; elle avait quatre fils: Jules, l'accusé; Eugène, Charles et Émile; Charles était en ce moment à l'armée. Les deux frères, Jules et Eugène, ont demeuré pendant sept années avec la mère de famille, l'aidant dans l'exploitation de son commerce de boucherie.

Émile s'était engagé de bonne heure, et il est encore musicien dans un régiment, Eugène avant été appelé au service militaire, l'accusé est resté seul auprès de la veuve C… jusqu'en 1872, époque à laquelle elle a vendu son fonds. En février 1876, Eugène a acheté un étal, il a pris avec lui sa mère et son frère Charles.

En 1873, de graves mésintelligences se sont élevées dans la famille: Jules et Émile, cédant aux conseils d'un agent d'affaires, ont demandé la liquidation de la succession de leur père, qui était restée indivise du consentement de tous. Cette opération a été terminée le 14 mai 1875. Elle paraît avoir entraîné des frais considérables et a donné lieu à de nombreuses difficultés entre les co-partageants. Le notaire qui en a été chargé affirme que déjà, à cette époque, l'accusé avait manifesté des sentiments de vive animosité contre sa mère. Charles et Eugène, qui étaient restés en bons rapports avec la veuve C., ont renoncé à prélever ce qui leur revenait, Jules et Émile ont reçu chacun 250 francs, montant de leur part héréditaire.

À partir du règlement de leurs intérêts, toutes les relations avaient à peu près cessé entre l'accusé, sa mère et ses frères Charles et Eugène. Sa haine avait persisté, et il ne craignait pas de dire à un témoin qu'il en voulait à sa mère jusqu'à la mort. Il n'avait pas paru depuis six mois environ à l'étal de la rue d'A., lorsqu'il s'y présenta le 7 mai dernier, vers 4 heures et demie du soir. Il resta d'abord silencieux, refusant de répondre aux questions qui lui étaient adressées, et regardant ses frères vaquer à leurs occupations. Pendant ce temps, la veuve C… était assise à la caisse, dans l'arrière-boutique. Au bout d'une demi-heure, il s'approcha de sa mère et se mit à causer avec elle. La conversation ne paraissait pas fort animée. À ce moment, Eugène s'était éloigné pour faire une course aux environs. Charles était seul et lisait un journal. Tout à coup il entendit un bruit sourd, semblable à celui que produit un coup porté avec violence. Il s'élança dans l'arrière-boutique et trouva sa mère renversée sur le côté gauche, la tête appuyée sur une chaise; elle venait d'être frappée à la tempe par l'accusé. En même temps, il arracha de la main droite de celui-ci une corde enroulée autour du poignet, et à l'extrémité de laquelle se trouvait attaché un poids d'un kilogramme. Aux reproches que lui adressait Charles, Jules répondit,: «Ce n'est pas à toi ni à mon frère que j'en veux, c'est à ma mère; je m'en vais chez le commissaire de police.»

Charles courut chercher du secours; Jules sortit et fut, peu d'instants après, arrêté dans la rue.

La veuve C… est morte le 11 mai des suites de ses blessures. Le médecin chargé de l'autopsie a constaté qu'elle avait succombé à une fracture multiple de la région pariétale droite, compliquée d'enfoncement des fragments, d'épanchement de sang intra-cranien, et de contusion cérébrale étendue.

Mis en présence du cadavre de sa mère, l'accusé n'a manifesté aucune émotion. Il a reconnu qu'il avait prémédité son crime et qu'il avait acheté, à la fin d'avril, un poids et une corde avec l'intention de s'en servir pour frapper sa mère. Il a ajouté que celle-ci lui avait, le 7 mai, parlé d'affaires de famille, et l'avait provoqué en lui reprochant de l'avoir mise sur la paille.

Dans son interrogatoire, il a modifié ses premières déclarations. Il a prétendu que, lorsqu'il s'était procuré la corde et le poids, il n'était pas animé d'intentions coupables. Il croyait la veuve C… propriétaire du fonds de la rue d'A.; le 7 mai, il s'était rendu après d'elle pour lui demander de le prendre avec elle, et il s'était muni de son arme pour s'en servir si elle refusait. Cette idée de meurtre, ajoute-t-il, l'avait abandonné à son arrivée à l'étal. Sa mère lui avait dit, dans leur conversation, que, par sa faute, elle était sans ressources et obligée de travailler chez les autres. Il avait cru qu'elle se moquait de lui, et il l'avait frappée.

À raison de certaines bizarreries, constatées par l'information dans la vie de Jules C… son état mental a été l'objet d'un examen médical. MM. les docteurs Lasègue et Blanche ont reconnu chez lui tous les signes d'un trouble intellectuel réel. Cependant, tout en faisant à sa responsabilité une part fort restreinte, ils ne vont pas jusqu'à l'exonérer complètement.

Voici maintenant le rapport:

C… est un homme robuste, qui ne présente, malgré la recherche la plus attentive, aucun indice d'une malformation congénitale. En le soumettant à une inspection minutieuse, on ne trouve pas de traces d'affections antécédentes, mais on constate à la nuque deux cicatrices produites par un séton.

L'inculpé déclare avoir été malade dans son enfance, et, une fois guéri de ces accidents, avoir joui d'une santé irréprochable.

L'enquête à laquelle nous nous sommes livrés apprend, en effet, conformément à l'instruction judiciaire, que tout enfant, vers l'âge de 2 ou 3 ans, C… a subi des accidents cérébraux graves, attribués à une chute, et qui ont exigé un traitement de plusieurs années. Le séton, et c'est un dérivatif commandé seulement par des lésions profondes et menaçantes, aurait été employé pour combattre cette affection rebelle.

La vie pathologique de C… s'explique par cette première atteinte. Un long répit, simulant la guérison réelle, a succédé aux manifestations initiales; l'inculpé a pu vivre de la vie commune, apprendre à lire et à écrire sans trop de difficultés, mais il n'a jamais guéri complètement. De même que les enfants dont le cerveau est mal conformé restent sujets pendant toute leur vie à des troubles encéphaliques, de même ceux qui ont traversé au premier âge une maladie cérébrale indélébile, demeurent des infirmes intellectuels. C'est à cette dernière catégorie qu'appartient l'inculpé, et si on ne tenait compte de ses antécédents, son état mental aérait inintelligible.

On retrouve, en effet, chez lui, les signes caractéristiques de ces perversions secondaires. Physiquement, son développement est normal; il semble qu'il se soit fait deux parts, l'une de l'évolution corporelle qui s'est poursuivie sans entrave, l'autre du développement des facultés morales, tantôt suffisant, tantôt défectueux, mais toujours irrégulier, et n'assurant, aucun moment de son existence, l'équilibre des fonctions.

C… adolescent ou parvenu à la période stable de la vie, n'est ni un aliéné, ni un homme semblable aux autres. Sobre en toutes choses, poussant, on pourrait dire, la sobriété à un excès qui répond à l'indifférence, il n'a jamais bu malgré les entraînements de son milieu; on ne lui a pas connu de maîtresse, et lui-même déclare, avec une sincérité dédaigneuse, n'en avoir jamais voulu.

Étranger à son alentour, il s'isole instinctivement pour obéir à ses goûts très-limités, sans rien sacrifier aux aspirations des autres. Son appétit dominant est de se livrer aux exercices gymnastiques qui témoignent de la force musculaire. Dès son adolescence, il descend seul dans la cave de la maison et soulève des poids de plus en plus lourds; c'est la qu'il passe ses heures de loisir, acceptant de temps en temps la lutte avec de rares camarades pour avoir la mesure comparative de sa force. Encore aujourd'hui, on lui fait oublier la gravité de sa situation en rappelant ces souvenirs. Plus âgé, il sollicite la permission de se produire dans les fêtes publiques comme athlète. L'autorisation lui est refusée parce que les renseignements recueillis n'inspirent pas confiance, et il a gardé, au fond de son coeur, rancune de ce refus.

C… n'a pas d'amis, même dans sa famille; il est sombre, taciturne, inquiétant, au dire de tous les témoins, bien qu'il n'ait été ni agressif, ni injurieux pour personne. Il dort peu et mal, sans qu'on puisse rapporter cette insomnie à des habitudes alcooliques: le vin lui répugne, il n'en boit ni seul, ni en compagnie. Sur ce fond qui représente déjà un état maladif, se dessinent de temps en temps des crises mal définies, des absences, des frayeurs, des hallucinations confuses. Il reste absorbé pendant des heures ou des journées, et semble sous le coup d'anxiétés dont la raison échappe, puisqu'il se refuse à toute confidence. Ces accès surviennent la nuit comme le jour; tantôt il s'enferme dans sa chambre avec un luxe de précautions, tantôt il se lève à des heures indues et sort vêtu comme s'il allait à l'abattoir.

On cite dans l'instruction des singularités sans nombre et toutes significatives. Pendant la guerre il revêt un costume bizarre, des guêtres blanches avec des rubans noirs; après la commune, il ne se couche pas sans avoir une fourche dans sa chambre; un jour il lacère son portrait à coups de couteau, une autre fois il passe la nuit à laver son linge en chantant et en riant aux éclats. On sent que C… se maintient en défiance contre des obsessions ou des dangers sur lesquels il ne s'explique pas.

C'est au plein de ce désordre sournois, et par conséquent latent, de l'intelligence, que surviennent deux événements, l'un réel, l'autre imaginaire, et qui paraissent avoir exercé sur l'esprit de C… une énorme influence. Son père meurt, et l'inculpé reste avec sa mère qu'il seconde dans son commerce de boucherie et qui subvient à tous ses besoins.

Un jour, en 1864, C… se rappelle à la fois la date et le fait, on lui sert une assiettée de soupe d'un goût saumâtre; à peine en a-t-il goûté quelques cuillerées qu'il reconnaît, dit-il, la saveur du vitriol. Il s'aperçoit qu'on l'a servi à part, que sa mère s'est réservé une portion qu'elle n'a pas puisée à la soupière; la soupe est jetée aux ordures; mais la nuit, C… éprouve de la diarrhée, des douleurs d'entrailles; il a été empoisonné par sa mère. Six mois plus tard, on lui donne du vin qui contient encore du vitriol. Vers 1868, on lui sort une côtelette qu'il trouve toute préparée sur son assiette en venant dîner. La viande recouverte d'une écume blanchâtre a un goût particulier; on l'a arrosée de nitrate d'argent acheté soi-disant pour nettoyer les couverts.

Encore un empoisonnement organisé par sa mère!

Ces prétendues tentatives s'imposent à son esprit sous la forme habituelle aux conceptions délirantes. «Je n'ai pas de preuves, répète-t-il, et je le sais bien, mais ce sont des faits, puisque j'ai été malade après le repas.»

À toute objection il répond: «Vous avez raison contre moi, je ne peux rien prouver» et n'en demeure pas moins convaincu.

Les épreuves de ce genre ne se sont pas multipliées; il cite les trois qui viennent d'être rappelées et pas une de plus. Leur souvenir ne l'obsède pas, mais à son heure, quand vient la crise d'excitation haineuse, il utilise ses réminiscences et s'en fait à la fois un encouragement et un argument.

Dix-sept ans après la mort du père, C… qui a ruminé ses griefs, demande des comptes à sa mère, soit spontanément, soit incité par des agens d'affaires.

La succession est liquidée après un assez long délai, sans querelles, sans violences de paroles incompatibles avec la froideur sèche de l'inculpé. C… passe une année dans l'oisiveté, vivant de peu, presque de rien, ne demandant d'assistance ou de pitié à personne, et se suffisant avec une dépense de quelques centimes chaque jour. À bout de ressources, il entre comme ouvrier dans une fabrique d'huile de pieds de boeufs à Grenelle; son gain est limité, son existence absolument solitaire et monotone. Les récits des voisins sont conformes à ceux des habitants du quartier où s'est passée sa jeunesse. Même mutisme, mêmes accès d'appréhension, mêmes actes de défiance inquiète; sa porte est verrouillée chaque soir; il lui arrive de mettre la commode en travers pour défendre l'entrée de sa chambre; il garde un nerf de boeuf à la tête de son lit; on en a peur, bien qu'il ne donne prise à aucun reproche.

C'est à la fin de cette longue période d'éloignement volontaire que C… achète la corde et les poids qui serviront à commettre son crime. Il hésite pendant des semaines, et son indécision rappelle celles qui précédent si souvent les suicides. Le samedi 5 mai, contrairement à ses habitudes, il ne se rend pas le matin à l'usine; l'après-midi, il fait régler son compte par le patron. Son idée est, dit-il, de reprendre sa profession de boucher. Le dimanche il se promène au hasard dans Grenelle, pensant à sa mère, à ses différends passés, à ses arrangements vagues d'avenir. Le lundi, il va à la Villette, incertain de ses intentions, plaidant en lui-même le pour et le contre, allongeant le chemin pour assurer ses idées. C… raconte ses hésitations avec une sorte d'insouciance, mais son récit est si conforme de tous points à ce qu'enseigne l'observation, qu'il ne laisse pas matière à un doute. Le crime accompli, et nous n'avons pas à redire comment il l'a été, la crise est épuisée.

C… se dénonce lui-même. Confronté avec le cadavre de sa mère, il ne marque aucune émotion et semble se complaire, alors comme aujourd'hui, à énumérer les motifs qui l'ont fait agir.

Ajoutons que depuis 1875, C… a subi une transformation inconsciente dont témoignent des preuves positives.

Jusque-là, il avait vécu correct dans la forme, étonnant par ses allures tous ceux qui se trouvaient en contact avec lui, mais ne donnant prise à aucune plainte.

En septembre 1875, il est arrêté et condamné pour vagabondage; le 24 et le 28 décembre de la même année, le 3 janvier 1878, nouvelles arrestations pour le même délit.

Pour qui a pu suivre l'existence de ces malades atteints d'une lésion cérébrale larvée et qui ne prend pas les aspects de la folie, ces défaillances répétées à courts intervalles accusent un état de mal et une préparation à des troubles plus menaçants, sans que ni l'inconduite, ni la débauche, n'aient fourni leur appoint ou, pour ainsi dire, leur excuse.

À Mazas, où il est soumis à une surveillance assidue, où nous avons multiplié nos visites, C… ne se dément pas. Tantôt parleur, tantôt silencieux, sombre avec ses compagnons de captivité qui s'en effrayent, incapable de mesurer la valeur et la portée de ses actes, toujours sur la défensive, interrogeant du regard avant de répondre, ne questionnant jamais, convaincu à la fois qu'il a eu tort en fait, mais qu'en principe il avait raison, nous ne l'avons pas surpris, plus que les surveillants, en proie à un accès de délire, en dehors de ses réminiscences d'empoisonnement.

Est-ce à dire que l'inculpé jouisse de sa raison pleine, et doive être considéré comme entièrement responsable? nous ne le croyons pas.

C… rentre dans une catégorie de malades qui représentent une exception dans la population courante des asiles.

Jusqu'au jour où un acte étrange, un crime inexplicable a contraint de se poser la question de leur sanité d'esprit, ils passent pour des gens bizarres et n'appellent pas de mesures coercitives.

Expansifs, violents comme quelques-uns, ou sombres comme C… ils éveillent une impression vague, mais ne justifient pas une conviction précise. On a peur d'eux, sans savoir d'où naît et où peut aboutir cette crainte. Les médecins les plus expérimentés ne vont pas et ne doivent pas aller au delà. C'est quand l'explosion a eu lieu qu'on remonte vers le passé et qu'on découvre la maladie qui a couvé à l'insu du malade.

Les épileptiques représentent l'expression la plus achevée de ces affections cérébrales impulsives revenant par accès, mais il s'en faut qu'ils en représentent le seul type.

C… n'est pas épileptique; ses crises cérébrales n'ont ni l'instantanéité, ni l'inconscience, ni l'imprévu des attaques comitiales. Lentes dans leur évolution, elles se préparent plus ou moins longuement; beaucoup d'entre elles avortent, et le trouble se réduit aux impulsions inoffensives que nous avons énumérées. Le jour où la crise finale éclate, après une incubation durable, elle emprunte à l'épilepsie quelques-uns de ses caractères.

Pour affirmer la maladie, il faut trouver réunis les deux éléments; celui de la lésion cérébrale permanente, et celui de la propulsion plus soudaine en réalité qu'en apparence, et qui clôt l'accès. On ne saurait méconnaître que ces deux ordres de symptômes décisifs existent chez C… et c'est pour en prouver l'existence que nous avons dû dresser le long exposé qui précède. L'affection cérébrale, traumatique ou non, mais qui a débuté dans la première enfance et s'est prolongée pendant des années, a été l'origine certaine du mal. À partir de son invasion, C… est devenu et est resté un malade. Dans les intervalles demi-lucides, on le trouve ombrageux, plus troublé de caractère que d'intelligence, capable de dissimuler ses tendances, ou incapable de les affirmer. Aux périodes critiques, il se laisse d'abord entraîner à un délire limité de persécutions, puis il s'excite à froid, peu à peu, au hasard des irritations, méditant dans le vide les événements dont il se croit victime, plus ruminant que raisonnant, mais dans un stade comme dans l'autre, hors d'état de préserver absolument sa liberté de pensée ou d'action.

Ces oscillations confuses de l'intelligence excluent les délires continus, mais pour se produire sous un autre aspect, et tout en ne répondant pas à la définition populaire de la folie, le désordre n'en est pas moins profond.

Notre avis formel est que la maladie cérébrale dont C… est atteint, et dont nous avons énoncé les principaux signes, annule chez lui la responsabilité presque complètement.

CH. LASÈGUE, É. BLANCHE.

Conformément à ces conclusions, C… comparut devant les assises et fut condamné à huit ans de travaux forcés, le jury et la cour ayant admis, suivant notre avis, la maladie à titre d'atténuation.

Voici enfin quelques-unes des réflexions si éminemment instructives et intéressantes dont M. le Dr Lasègue a accompagné ce rapport:

«C… n'était certainement pas dans un état d'aliénation continu tel que la vie sociale lui fût interdite. Était-il sujet à des crises qui le privaient à des degrés variables, ou de la conscience de ses actes, ou de la libre délibération sans laquelle aucun acte n'est volontaire?

Les perversions permanentes de l'intelligence prêtent peu à la discussion. Elles sont ou ne sont pas. À l'égal des affections organiques du coeur, elles appartiennent à toute heure à l'observation. Que la maladie soit aiguë ou chronique, qu'elle se montre dans un paroxysme ou durant une rémission, ce sont des différences de degré; le fond demeure et se constate.

Il en est autrement, au point de vue médico-légal, des formes intermittentes où les accès sont séparés par des intervalles de santé morale, absolue ou relative. L'expert, qui n'est plus un témoin, ne dispose que de renseignements douteux, et son enquête rétrospective n'a pas la certitude que comporte une constatation directe.

L'épilepsie est le type suprême des délires à brusque invasion et à cessation non moins brusque; on a rendu à la science un signalé service en l'étudiant sous ses modalités d'ailleurs peu variées, mais on s'écarterait de la vérité en la représentant comme représentant tous les cas possibles.

Déjà, à l'occasion d'un procès criminel des plus dramatiques (affaire Th…; Archives générales de médecine, janvier 1875) nous avons, le Dr Blanche et moi, montré que des crises impulsives, épileptoïdes par quelques-uns de leurs caractères, plus soudaines en apparence qu'en réalité, se prolongeant pendant des heures et des journées, pouvaient survenir en dehors de toute atteinte d'épilepsie vraie.

Le cas de C… appartient à une autre espèce.

Tous les médecins savent qu'un homme frappé par une affection cérébrale profonde se manifestant par des symptômes comateux, délirants, paralytiques, convulsifs, guérit de la crise sans guérir forcément de la maladie. Après des semaines, des mois, des années, apparaissent de nouveaux accidents reliés à l'attaque initiale par une attache pathologique incontestable. Ce ne serait pas excéder la vérité que de dire que la guérison absolue est plus près de l'exception que de la règle; la comparaison populaire du feu couvant sous la cendre s'applique à merveille à ces espèces banales. C'est à cette catégorie qu'appartient C… frappé d'une affection cérébrale énorme dans son enfance, étrange, incomplet, pendant sa vie, soumis à des poussées inégales quant à leur intensité ou à leur durée, variables quant à leur forme, et dont notre rapport donne un aperçu sommaire.

En résumé, l'espèce dont je viens de résumer les principaux traits se reconnaît aux caractères suivants: ictus initial, répétitions de crises séparées par des intermissions ou des rémissions plus ou moins complètes et plus ou moins durables, ne se reproduisant pas sous un type et avec une durée obligatoires, soit chez les divers individus ainsi frappés, soit chez le même malade.»

Dans ce fait, il ne s'agit pas, comme dans ceux qui précèdent, d'un inculpé dont le trouble mental fût assez accentué pour entraîner l'irresponsabilité. C… n'est certainement pas un homme dont les facultés intellectuelles soient saines et normales; il a même présenté de véritables accès de délire, mais il ne nous a pas semblé qu'il ait agi sous l'influence exclusive et directe d'un trouble de la raison, et nous avons dû lui attribuer une responsabilité atténuée.

Cette observation sert de transition entre les irresponsables, et les inculpés à responsabilité atténuée ou entière, dont je vais citer encore quelques exemples pour compléter ce travail.

Возрастное ограничение:
12+
Дата выхода на Литрес:
25 июня 2017
Объем:
190 стр. 1 иллюстрация
Правообладатель:
Public Domain

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