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Читать книгу: «Chroniques de J. Froissart, Tome Premier, 1re partie», страница 2

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D'après l'opinion que nous combattons, Froissart se serait attaché à Robert de Namur de 1390 à 1392, et il faudrait reporter entre ces deux dates la rédaction du premier livre, entreprise sous les auspices de ce seigneur. Mais cette hypothèse est entièrement gratuite, en opposition avec les faits les mieux établis et contraire à toute vraisemblance. Froissart dit en termes formels dans le prologue du troisième livre, composé précisément vers 1390, qu'il a pour maître et seigneur Gui, comte de Blois: «Et pour ce je sires Jehans Froissars, qui me sui ensoingnez et occupez de dicter et escripre ceste hystoire à la requeste et contemplacion de hault prince et renommé messire Guy conte de Bloys, mon bon maistre et seigneur38…» Depuis le jour où notre chroniqueur, devenu dès 1373 curé des Estinnes, où Gui de Châtillon possédait un fief dépendant de la seigneurie de Chimay, s'attacha par un lien étroit à la fortune et même au service de la maison de Blois, rien, absolument rien ne fait supposer que la protection dont cette illustre maison ne cessa de l'entourer se soit démentie un seul instant. Au contraire, dans le prologue du quatrième livre, Froissart apparaît pour la première fois investi d'un canonicat dont il était certainement redevable à la faveur du comte de Blois, seigneur de Chimay. L'auteur des Chroniques s'intitule dans ce prologue «presbiterien et chapelain à mon très cher seigneur dessus nommé (Gui de Blois) et pour le temps de lors tresorier et chanoine de Chimay et de Lille en Flandres.» Un des plus récents biographes de Froissart n'en a pas moins intitulé l'un des chapitres de son livre: Froissart chez Robert de Namur39. Il est vrai que l'on se borne dans ce chapitre à raconter divers incidents des dernières années de la vie de Robert mort le 18 août 1392, incidents qui n'ont rien à démêler ni avec la personne ni avec la vie du chroniqueur: on n'y trouve pas un mot d'où l'on puisse inférer que le chapelain de Gui de Blois ait vécu, comme on le prétend, de 1390 à 1392, auprès du pensionnaire, du partisan dévoué des Anglais.

Le caractère essentiel, le trait distinctif de cette partie de la première rédaction qui s'arrête entre 1369 et 1373 et qui a été composée à la requête et sous les auspices de Robert de Namur, c'est que l'influence anglaise y est beaucoup plus marquée que dans les autres rédactions du premier livre et même que dans le reste des Chroniques. Sans doute, Froissart est trop animé de l'esprit chevaleresque pour ne pas rendre hommage à la générosité, à la bravoure, à la grandeur, partout où il les voit briller; il n'en est pas moins vrai qu'à la complaisance avec laquelle il s'étend sur les événements où l'Angleterre a joué le beau rôle, à l'insistance qu'il met à faire ressortir les prouesses des chevaliers du parti anglais, on reconnaît aisément la prédilection de l'auteur pour la patrie adoptive de Philippe de Hainaut. Au sujet des différends, des guerres, des batailles qui, de 1325 à 1372, mirent aux prises la France et l'Angleterre, la rédaction dédiée à Robert de Namur donne presque toujours la version anglaise. On peut citer comme exemple le récit des journées de Crécy et de Poitiers qui dans cette rédaction est fondé principalement, suivant le témoignage de Froissart lui-même, sur le témoignage des compagnons d'armes d'Édouard III et du Prince Noir. Prise dans son ensemble, la rédaction faite pour Robert de Namur doit être considérée avant tout comme un monument élevé par une âme enthousiaste, par une main amie et pieuse à la gloire anglaise. Et l'on voudrait attribuer une pareille œuvre au serviteur d'une maison aussi française que celle des comtes de Blois, au chapelain de ce Gui de Châtillon dont le père avait été tué à Crécy et qui, donné lui-même en otage aux Anglais, n'avait obtenu sa mise en liberté que moyennant une rançon ruineuse! Et l'on voudrait placer la composition de cette œuvre vers 1390, c'est-à-dire à une époque où la gloire des premières années du règne d'Édouard III était depuis longtemps évanouie, où les superbes vainqueurs de Crécy et de Poitiers, après les revers réitérés de leurs armes en France, en Espagne, en Écosse, étaient réduits à trembler sous la menace d'une invasion française!

Combien il est plus naturel d'admettre la conclusion à laquelle nous ont conduit des preuves non pas plus fortes, mais plus topiques et plus précises, en faisant remonter la rédaction du premier livre inspirée par Robert de Namur à cette période comprise entre 1369 et 1373 où quelques échecs partiels avaient à peine entamé le prestige de la puissance anglaise, où l'on était encore sous l'éblouissement produit par des victoires merveilleuses, où surtout l'ancien clerc de la reine Philippe, qui venait de passer les huit plus belles années de sa vie à la cour d'Édouard III, avait des raisons personnelles de ressentir avec une vivacité particulière l'admiration générale!

Outre la partialité pour l'Angleterre que nous venons de signaler, on remarque dans la première rédaction un caractère de jeunesse, d'entrain belliqueux que n'offrent pas à un égal degré les rédactions postérieures. On dirait que le souffle guerrier qui anime nos grands poëmes du douzième siècle a passé tout entier dans cette rédaction. Notre chroniqueur, il est vrai, a toujours aimé les descriptions de combats, mais il y porte ici une verve, un éclat, une furie de pinceau supérieure. Les récits des batailles de Crécy et de Poitiers, pour ne rappeler que ceux-là, sont des chefs-d'œuvre qu'on n'a pas surpassés. Froissart lui-même, lorsque plus tard il a voulu raconter de nouveau ces mémorables journées, n'a plus retrouvé la largeur de dessin, la vivacité de coloris, l'heureuse fougue qui distinguent l'inspiration de la fleur de l'âge. Combien la seconde rédaction écrite par un chapelain parvenu à la maturité reste sous ce rapport, malgré des beautés d'un autre ordre, inférieure à la première! Dans celle-ci, qui remonte à une période où l'auteur n'avait guère plus de trente ans, on sent qu'une jeunesse ardente ajoute encore sa flamme aux instincts d'une nature chevaleresque.

Qui sait si Froissart n'a pas eu le premier conscience de cette supériorité de la première rédaction au point de vue qui devait le plus toucher les lecteurs de son temps et si la préférence littéraire de l'auteur n'est pas pour quelque chose dans la multiplicité des copies de cette rédaction, dont quelques-unes ont été exécutées de son vivant, tandis que la seconde rédaction, représentée par l'unique exemplaire d'Amiens, dont le manuscrit de Valenciennes n'est qu'un imparfait abrégé, demeurait isolée et inconnue dans les archives de ce château de Chimay dont les maîtres l'avaient inspirée?

En résumé, la partie de la première rédaction antérieure à 1373, composée par Froissart immédiatement après son retour d'Angleterre à la demande de Robert de Namur, l'un des partisans les plus dévoués de la cause anglaise, cette rédaction affecte un triple caractère: 1o Pour la partie qui s'arrête à 1356, elle contient généralement moins de développements originaux, elle fait des emprunts plus nombreux et surtout plus serviles au texte de Jean le Bel que les deux rédactions postérieures; 2o l'auteur y montre partout plus de sympathie, d'admiration et même de partialité pour les Anglais que dans les autres parties de ses Chroniques; 3o on y trouve, notamment dans les récits de batailles, l'expression la plus brillante peut-être du génie littéraire de Froissart.

Troisième phase. C'est après 1378 que se place la troisième phase de la composition de la première rédaction. Froissart a continué dans cette période le récit des événements de 1372 à 1378; il a fait cette continuation à deux reprises et sous deux formes fort différentes. L'une de ces continuations est plus sommaire, elle a un caractère en quelque sorte provisoire, et l'on dirait parfois qu'elle a été esquissée un peu au fur et à mesure des événements: c'est celle qui caractérise la première rédaction proprement dite. L'autre continuation qui semble avoir été écrite d'un seul jet, est une révision de la première dont elle corrige les erreurs ou dont elle enrichit le texte par des développements et même par des récits tout nouveaux: c'est celle qui distingue la première rédaction révisée; et elle forme, comme on le verra, une sorte de trait d'union entre la première rédaction et la seconde où elle se retrouve aussi.

L'exemplaire le plus ancien de la continuation, qui appartient en propre à la première rédaction proprement dite, pourrait bien être offert par le beau manuscrit de Besançon où le premier livre s'étend jusqu'à ces mots: «Adonc s'esmeut la guerre entre le roy de Portingal et le roy Jehan de Castille qui dura moult longuement, si comme vous orrés recorder avant en l'istore.» Le premier livre du manuscrit de Besançon empiète ainsi sur les quarante-deux premiers chapitres du second livre des autres manuscrits40. Plus tard sans doute, ces quarante-deux chapitres furent reportés en tête du second livre, et Froissart les remplaça en ajoutant à la fin du premier livre certains développements qui manquent dans le manuscrit de Besançon. Ces développements commencent après ces mots: «… Laquelle fille estoit convenancée au damoisel de Haynault, filz aisné du duc Aubert41;» ils se terminent ainsi: «… et par toutes les marches sur le clos de Costentin.» Les quatre ou cinq chapitres additionnels où sont contenus ces développements marquent la fin du premier livre dans les manuscrits de la première rédaction proprement dite.

Quant à la continuation qui distingue la première rédaction revisée, si l'on excepte les manuscrits 5006 et 20357 où, comme on l'a fait remarquer plus haut, cette continuation à partir de 1369 est comprise dans le second livre, elle s'arrête dans le manuscrit 6477-6479 à ces mots qui finissent le premier livre: «… je parlerai plus à plain quant j'en serai mieux informé42;» la coupure est rejetée quatre ou cinq chapitres plus loin dans le manuscrit de Mouchy-Noailles qui se termine au siége de Bergerac et dont voici la dernière ligne: «… près receu un grant damage43

§ 3. Des deux branches de la première rédaction: 1o Première rédaction proprement dite; 2o première rédaction révisée; – caractères distinctifs de ces deux branches

La division de la première rédaction en deux branches tire surtout, ainsi qu'on vient de le voir, sa raison d'être de la partie du premier livre postérieure à 1372. En effet, dans un certain nombre de manuscrits de la première rédaction, le récit des événements, depuis 1372 jusqu'en 1377, comme aussi depuis 1350 jusqu'en 135644, est tout autre et plus ample, plus développé que celui qu'on trouve dans la partie correspondante des autres exemplaires de la même rédaction.

Laquelle des deux branches dont il s'agit a précédé l'autre? Évidemment, les manuscrits où la narration a le moins d'originalité et d'ampleur doivent être considérés comme les plus anciens; les exemplaires de cette branche, qui sont de beaucoup les plus nombreux, constituent ce que nous avons appelé déjà dans le paragraphe précédent la première rédaction proprement dite, par opposition aux manuscrits où le récit a reçu plus de développement entre les dates indiquées ci-dessus, qui forment la première rédaction revisée.

Il importe aussi de faire remarquer que le commencement du premier livre diffère dans les deux branches de la première rédaction jusque vers le milieu du paragraphe 11 de ce volume45. Au contraire, le texte de ces dix premiers paragraphes est le même dans la seconde rédaction que dans la première rédaction proprement dite.

La première rédaction revisée et la seconde offrent deux traits communs d'une importance capitale: elles remplacent l'une et l'autre, entre 1350 et 1356, le fragment d'emprunt de la première rédaction proprement dite, par une version originale et plus développée qui, sans être identique dans les deux rédactions, présente du moins beaucoup d'analogie. En outre, le texte plus complet et meilleur que donne la première rédaction revisée pour la partie comprise entre 1372 et 1377, se retrouve intégralement dans la seconde rédaction. Des ressemblances aussi caractéristiques, aussi considérables entre celle des branches de la première rédaction qui a été écrite la dernière, et la seconde rédaction confirment d'une manière frappante la date plus récente que nous avons assignée à la composition de celle-ci. En effet, supposer, comme on l'a fait, que la première rédaction proprement dite est postérieure à la seconde rédaction, c'est supposer que Froissart a substitué de gaieté de cœur, 1o de 1350 à 1356, un fragment emprunté et insipide à une version plus originale dont il était l'auteur; 2o de 1372 à 1377, un texte imparfait à un texte plus complet et meilleur, en un mot, à un texte revisé. Une telle hypothèse n'est-elle pas contraire à la vraisemblance?

§ 4. De la première rédaction proprement dite; – classement des manuscrits de cette rédaction

Les manuscrits de la première rédaction sont extrêmement nombreux; on en compte environ cinquante, tandis que la seconde n'est représentée que par les deux exemplaires d'Amiens et de Valenciennes, et la troisième par le texte unique de Rome. Une disproportion aussi énorme peut être considérée comme un argument de plus en faveur de la priorité de la rédaction qui compte un si grand nombre de copies, car il tombe sous le sens que des trois rédactions, c'est la première en date qui a dû être le plus tôt et le plus souvent reproduite. L'expérience enseigne que, dans ce cas, l'avantage reste quelquefois au premier occupant; mais cela est surtout vrai lorsqu'il s'agit d'une transcription aussi longue et aussi coûteuse que celle du premier livre des Chroniques. Serait-il téméraire d'attribuer, en partie du moins, à l'apparition plus tardive des seconde et troisième rédactions la rareté vraiment singulière des exemplaires qui les représentent?

Des cinquante manuscrits de la première rédaction, plus de quarante appartiennent à la première rédaction proprement dite; il reste six mss. seulement de la première rédaction revisée. Encore faut-il comprendre parmi ces six un ms. où le premier livre presque tout entier est perdu, un simple fragment et un abrégé.

On a prévenu le lecteur qu'il ne devait pas chercher ici une description des manuscrits; diverses raisons ont fait renvoyer cette description à la fin de l'édition. Le tableau sommaire qu'on trouvera ci-dessous n'en a pas moins coûté à l'éditeur plus de six mois de travail; il a nécessité de lointains voyages et des recherches sans nombre. Il a présenté d'autant plus de difficultés qu'il est impossible de grouper les manuscrits par familles, en se fondant sur les caractères saillants, extérieurs et pour ainsi dire matériels de ces mss. L'éditeur avait, au début de son travail, nourri cette illusion; mais il a dû y renoncer après bien des tâtonnements et de vains efforts. Ainsi, il semble au premier abord que les manuscrits où le premier livre est coupé au même endroit et se termine beaucoup plus tôt que dans les autres, doivent être rattachés à la même famille; et pourtant il est tel cas où l'on s'égarerait infailliblement en suivant cette méthode. Le ms. de Besançon, par exemple, ne contient pas trois ou quatre chapitres qui terminent le premier livre dans les mss. 2649, 2663, 2674, etc., et néanmoins il appartient à la même famille que ces derniers exemplaires. Au contraire, le ms. de notre Bibliothèque impériale coté 86 et le ms. de Breslau finissent l'un et l'autre le premier livre au siége de Bourdeilles, en 1369; ce qui n'empêche pas ces copies de se rattacher à deux familles différentes.

Écartant donc ces apparences trompeuses et ces analogies purement superficielles, il a fallu pénétrer plus avant pour essayer de saisir les caractères vraiment génériques qui sont les variantes du texte. On comprend tout ce qu'une pareille tâche exige de comparaisons minutieuses et combien ces comparaisons sont difficiles lorsqu'elles doivent porter sur d'énormes manuscrits souvent fort éloignés les uns des autres! Heureusement, un fil conducteur nous a guidé dans ce dédale: ce fil, nous l'avons trouvé dans les titres des chapitres qui, provenant uniquement du fait des copistes, constituent un indice à peu près sûr de l'identité des variantes et par suite de la communauté d'origine des manuscrits où ces intitulés ajoutés au texte sont semblables. Conformément à cette méthode, on n'a rangé dans la même famille que les manuscrits dont le texte présente des modifications identiques qui leur sont exclusivement propres et que l'on ne retrouve point dans les autres. Toutefois, une exception a été admise en faveur de certains exemplaires qui, tout en offrant généralement les mêmes variantes que ceux auxquels on les a réunis, se distinguent cependant de ceux-ci par des différences plus ou moins notables, sans qu'on puisse d'ailleurs les rattacher à une autre famille. Ces manuscrits excentriques ont été joints à ceux dont ils se rapprochent le plus; seulement, on les a laissés en dehors de l'accolade pour bien marquer leur singularité.

Примечание 146


Dans ce tableau comme dans tout le cours de notre édition, la première rédaction proprement dite est désignée par la lettre A suivie d'un chiffre qui varie pour chacun des manuscrits de cette rédaction.

La première classe comprend les manuscrits où le texte du premier livre est reproduit intégralement; non qu'il n'y manque çà et là des mots ou même des membres de phrase, mais ces lacunes résultent de l'inadvertance des copistes et n'ont pas le caractère de suppressions systématiques.

Dans la première famille de cette classe, le ms. de Besançon a47 été mis à part, non-seulement à cause de son antiquité exceptionnelle, mais encore parce que le premier livre, s'il s'étend beaucoup plus loin dans cet exemplaire que dans les cinq congénères, manque en revanche des trois ou quatre chapitres qui le terminent dans ces derniers mss.

La seconde famille (mss. A 7 à 1048) comprend les copies à la fois les moins étendues et les plus anciennes du premier livre; ces manuscrits ont cela de très-particulier qu'ils ne semblent pas dériver les uns des autres et ne présentent pas toujours les mêmes variantes.

Les troisième, quatrième et cinquième familles de la première classe (mss. A 11 à 19) sont plus modernes que les deux familles précédentes; et un certain nombre d'additions des mss. A 11 à 19, mais surtout des mss. A 11 à 14, ne doivent provenir que du fait des copistes.

La seconde classe embrasse les manuscrits où le texte est tantôt complet, tantôt plus ou moins abrégé. Dans les exemplaires de cette classe, les lacunes, les abréviations, au lieu d'être comme dans ceux de la première une exception due à la distraction d'un scribe, deviennent la règle; et ce système de suppressions s'étend à toutes les parties, on pourrait presque dire à tous les chapitres du texte.

La première famille de la seconde classe (mss. A 20 à 22) dérive de la première famille de la première classe (mss. A 1 à 6).

Le texte est encore plus abrégé dans les mss. A 23 à 28 que dans les mss. A 20 à 22.

Si dans la deuxième famille de la seconde classe le ms. de Breslau a été mis en dehors de l'accolade, c'est qu'à partir de 1340 le texte y est plus développé et offre certains détails qu'on ne trouve pas dans les autres mss. de la même famille.

Les simples fragments du premier livre sont rangés dans la troisième classe. Les mss. 34 à 36, qui sont la reproduction les uns des autres, ne contiennent que le commencement du premier livre; le texte, d'ailleurs complet, de ces mss. s'arrête à la mort de Philippe de Valois en 1350. Quant au ms. de Rouen, découvert et signalé pour la première fois par M. Delisle, on n'y trouve que des chapitres détachés.

Les mss. A 38 à 40, qui composent la quatrième classe, renferment le même résumé des quatre livres des Chroniques abrégés chapitre par chapitre; le premier livre est divisé dans ce résumé en 167 chapitres.

§ 5. De la première rédaction revisée; – classement des manuscrits de cette rédaction

La première rédaction revisée, comparée à la première rédaction proprement dite, présente trois différences caractéristiques: 1o le texte des onze premiers paragraphes du premier livre est différent dans les deux rédactions; 2o de 1350 à 1356, la première rédaction revisée substitue un récit plus ample au fragment fort sec que la première rédaction proprement dite offre pour la même période; 3o de 1372 à 1378, le texte de la première rédaction proprement dite est revisé et développé dans la première rédaction appelée pour cette raison revisée.

Ces deux dernières différences sont tout à l'avantage de la première rédaction revisée et prouvent surabondamment, comme nous l'avons dit plus haut, qu'elle a été composée après la première rédaction proprement dite sur laquelle elle constitue un progrès notable. Il n'en est pas ainsi de la première différence: on trouve dans les manuscrits de la branche plus ancienne un meilleur texte que dans ceux de la branche plus moderne. Serait-ce pour cette raison qu'il a été reproduit dans la seconde rédaction de préférence à celui de la première rédaction revisée?

Suivant une remarque déjà faite, les manuscrits de Froissart sont d'autant plus nombreux que la rédaction qu'ils représentent est plus ancienne. Le nombre des exemplaires de la première rédaction revisée confirme cette observation. Cette rédaction ne compte aujourd'hui que trois manuscrits complets; mais notre Bibliothèque impériale en possède un quatrième exemplaire dont malheureusement le tome I, qui contenait la plus grande partie du premier livre, ne se retrouve plus. L'Anglais Johnes, qui vivait au commencement de ce siècle et dont il paraît que la riche collection a péri dans un incendie, devait aussi avoir en sa possession au moins un manuscrit de la rédaction dont il s'agit, puisqu'il a signalé et publié le premier certaines variantes propres à cette rédaction49; et la bonne leçon de 1350 à 1356, renvoyée en appendice à la fin du ms. du fonds Arundel 67 au British Museum, avait peut-être été extraite au quinzième siècle des manuscrits qui plus tard ont appartenu au châtelain de Hafod. On arrive ainsi pour la première rédaction revisée à un total de cinq manuscrits au moins contre quarante de la première rédaction proprement dite, deux de la seconde, un seulement de la troisième.


Примечание 150

Примечание 251


Dans le tableau qui précède et dans le cours de cette édition, de même que la lettre A désigne la première rédaction proprement dite, la lettre B correspond à la première rédaction revisée dont les divers manuscrits sont indiqués par les chiffres qui suivent B.

A défaut du tome I aujourd'hui perdu du manuscrit B2, le manuscrit B1, le plus ancien de beaucoup et le meilleur de la branche dont il fait partie, a été adopté comme texte du premier livre; et l'on exposera plus loin les raisons qui ont dicté ce choix52.

Les mss. B2 et B3 offrent le même texte, plus ancien dans le ms. B2, plus moderne dans le ms. B3 qui n'est qu'une copie du premier; voilà pourquoi ces deux mss. ont été réunis par une accolade. Une main postérieure a pris à tâche de faire disparaître du ms. B2, en grattant ou en ajoutant des lettres à certains mots, une empreinte wallonne très-caractérisée ainsi que les signes usités dans notre ancienne langue pour marquer la distinction du cas sujet et du cas régime qui est encore généralement observée dans ce précieux ms. Il est fâcheux que nous ne connaissions pas la date précise de l'exécution du ms. B3: nous saurions ainsi à quelle époque la fameuse règle de l's est devenue, non-seulement une lettre close, mais encore un objet de scandale pour ceux qui faisaient copier ou copiaient les manuscrits. Ce qui prouve, malgré la différence de l'orthographe, que le ms. B3 a été copié sur le ms. B2, c'est que la plupart des notes marginales du t. II coté 5006 se trouvent reproduites sur les marges du t. II de l'exemplaire provenant du fonds de Gaignières coté 20357.

Les mss. B1, B2-3 et B4 ont cela de particulier qu'aucun des trois n'a été copié sur l'un des deux autres53; en d'autres termes, chacun d'eux a sa valeur propre et indépendante. La rareté relative des exemplaires de la première rédaction revisée rend cette circonstance doublement précieuse.

Comme le ms. du British Museum fonds Arundel no 67 appartient à la première rédaction proprement dite, il ne donne pour la partie du premier livre comprise entre 1350 et 1356 que le sec fragment qui caractérise les exemplaires de cette branche. Mais une note placée en marge du ms., au feuillet 173, renvoie à la leçon plus ample propre à la première rédaction revisée que le copiste du ms. Arundel avait sans doute connue trop tard pour l'insérer dans le corps du texte. Cette note est conçue en ces termes: «Après ceste presente rubriche de rouge coumensant: Coument le roy Phelippe de France trespassa, fault seize feiles lesquelx vous trouverez au dernier du livre. Et coumence la rubriche de rouge: Du chapelet de perles que le roy Edouart d'Angleterre donna…» Le fragment du ms. Arundel figure sous la rubrique B5 dans le tableau des mss. de la première rédaction revisée et sera désigné ainsi dans notre édition.

On conserve à notre Bibliothèque impériale sous le numéro 10144 un abrégé du premier livre tellement original qu'on pourrait le considérer presque comme une quatrième rédaction. Cet abrégé se termine par l'explicit suivant: «Che sont les croniques de Froissart. Cest croniques escript Bertoulet Lebrun, archiés de corps de Phelippe duc de Bourgoigne, que Dieu absol! et le commencha au Noel mil CCCLXXVII54; et furent fait quinze jours devant le Saint Jehan Baptiste en sievant. Et priés à Dieu pour luy, et il pri[er]a à Dieu pour vout (sic) et pour tous vos amis. Et avoit le dit Bertoulet soissante trois ans quant il furent parfait.» Le caractère paléographique du ms. 10144 s'accorde bien avec la date de 1477 que le copiste a voulu écrire, et l'orthographe de ce ms. sent, comme on vient de le voir, son archer d'une lieue. D'ailleurs, rien dans le contenu de cet abrégé n'autorise à mettre en doute l'authenticité de l'exemplaire unique qui nous l'a conservé. Il porte comme tous les bons manuscrits des Chroniques une forte empreinte de dialecte wallon; et il rectifie ou complète parfois heureusement les autres rédactions du premier livre55.

Le ms. 10144 contient, du feuillet 423 au feuillet 532, pour les années 1350 à 1356, le même texte, mais plus abrégé, que les mss. de la première rédaction revisée. Il renferme aussi, à partir du feuillet 809, pour les années 1372 à 1375, un sommaire de la version particulière à ces mêmes manuscrits. Ces deux circonstances nous ont déterminé à le classer sous la rubrique B6 parmi les exemplaires de la première rédaction revisée.

38.Ms. de Besançon, t. II, fo 201.
39.Étude littéraire sur Froissart, par M. Kervyn, t. I, ch. XII, p. 242 à 246.
40.Cf. dans Buchon, t. II, p. 49.
41.Ms. de Besançon, fo 371 vo. Le manuscrit de notre Bibliothèque impériale coté 2649, reproduction généralement fidèle de celui de Besançon, contient quelques lignes seulement de plus que la partie de ce dernier manuscrit qui correspond au premier livre des autres exemplaires de la première rédaction proprement dite. Le manuscrit 2649 se termine à ces mots: «… ains passèrent oultre et prindrent.» Cf. Froissart dans Sauvage, édit. de 1559, t. I, p. 457, ligne 11.
42.Cf. dans Buchon, t. I, p. 717, col. 2, fin du chap. 394.
43.Cf. dans Buchon, t. II, p. 4, fin de la col. 1.
44.Selon M. Kervyn, cette version plus originale, particulière aux manuscrits de la première rédaction revisée pour les années 1350 à 1356, serait postérieure à 1388, époque du voyage de Froissart en Béarn: «Elle est postérieure à 1388, dit-il, puisque Froissart y raconte les démêlés du sire d'Albret avec les habitants de Capestang, d'après ce que ceux-ci lui dirent. Je la crois écrite vers 1391.» Froissart, t. I, p. 243 en note. Voici le passage sur lequel s'appuie l'argumentation de M. Kervyn: «Depuis me fu dit qu'ils (il s'agit des habitants de Capestang) laissèrent prendre leurs ostages…» Voyez Buchon, éd. du Panthéon, t. I, p. 317. Froissart ne dit nullement dans ce passage qu'il tient les détails qu'il va raconter de la bouche même des habitants de Capestang; par conséquent il n'y a pas lieu d'en conclure avec M. Kervyn que la version des manuscrits revisés pour les années 1350 à 1356 est postérieure au voyage du chroniqueur en Béarn en 1388 et a été écrite vers 1391.
45.Voyez p. 26, l. 21. Le texte devient semblable dans les manuscrits des deux branches après ces mots: Si singlèrent par mer.
46.Les manuscrits désignés simplement par un chiffre appartiennent à notre Bibliothèque impériale. Il faut ajouter à la liste ci-jointe, le bel exemplaire du premier livre conservé dans la bibliothèque du château de Branitz (Prusse). Malheureusement, il ne nous a pas été donné de voir, d'étudier nous-même ce manuscrit; et les renseignements transmis par Son A. le prince de Puckler-Muskau ne nous ont pas permis de le comprendre dans notre classement.
47.Mon ami, M. A. Castan, a publié une excellente étude sur le ms. de Saint-Vincent de Besançon. Bibl. de l'École des Chartes, t. XXVI, p. 114 à 148. Buchon croyait ce manuscrit égaré si non perdu; M. Castan ne l'a pas seulement retrouvé, il a éclairci toutes les questions qui s'y rattachent.
48.Sur la manière dont se terminent ces manuscrits, voyez ce qui a été dit plus haut, p. XIII et XIV, XXVII et XXVIII.
49.Voyez l'édition imprimée par Johnes en son château d Hafod en 1803, formats in-4o et in-8o. Johnes est également l'auteur d'une traduction anglaise des Mémoires de la Curne de Sainte-Palaye sur Froissart, qui parut à Londres en 1801. Notre chroniqueur a su toujours inspirer de belles passions à nos voisins; espérons que Johnes aura des successeurs.
50.Dans ce tableau, comme dans le précédent, les manuscrits désignés par un simple chiffre appartiennent à notre Bibliothèque impériale.
51.Ce manuscrit, qui provient du fonds de Gaignières, est toujours appelé dans les variantes du texte de ce volume: Ms. de Gaignières. Dans les volumes suivants, il sera désigné sous la rubrique B3, le ms. 6477 à 6479 sous la rubrique B1, le ms. de Mouchy-Noailles sous la rubrique B4.
52.Voyez le chapitre I de la seconde partie de cette introduction.
53.Sur la manière dont se termine le premier livre dans les divers manuscrits de la première rédaction revisée, voyez plus haut la fin du § 2, p. XIII et XIV, XXVII et XXVIII.
54.Le copiste doit avoir oublié un C. Ces mots: que Dieu absol ne peuvent se rapporter qu'à Philippe le Bon, duc de Bourgogne, mort à Bruges le 14 juin 1467.
55.Notre édition est la seule où l'on ait utilisé ce précieux abrégé.
Возрастное ограничение:
12+
Дата выхода на Литрес:
28 сентября 2017
Объем:
321 стр. 3 иллюстрации
Правообладатель:
Public Domain

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