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CHAPITRE SIX

10h05

Observatoire Naval des États-Unis – Washington DC

« Monsieur le député, merci d’être venu. »

Susan tendit la main pour serrer celle de l’homme de grande taille en costume bleu foncé qui se trouvait devant elle. C’était le représentant de l’Ohio, Michael Parowski. Il avait des cheveux blancs précoces et de petits yeux plissés bleu pâle. Il avait cinquante-cinq ans et c’était un homme beau et solide, dans le sens un peu sauvage du terme. Né et élevé dans une famille d’ouvriers, il avait de grandes mains solides et les larges épaules d’un homme qui avait commencé sa carrière en tant que ferronnier.

Susan connaissait son histoire. C’était un célibataire endurci. Il avait grandi à Akron et il était le fils d’immigrés polonais. Quand il était adolescent, il était boxeur amateur. Les cités industrielles du Nord, Youngstown, Akron et Cleveland, étaient son bastion. Le soutien qu’il avait là-bas était inébranlable. C’était presque devenu une légende, un mythe. Il en était à son neuvième mandat au sein du congrès et ses réélections avaient chaque fois été une formalité.

Est-ce que Michael Parowski allait être réélu dans le Nord de l’Ohio ? Est-ce que le soleil se lèverait demain ? Est-ce que la Terre continuerait à tourner sur son axe ? Si je laissais tomber un œuf, est-ce qu’il allait s’écraser sur le sol de la cuisine ? Michael Parowski était devenu aussi incontournable que les lois de la physique.

Susan l’avait vu sur des vidéos faisant des bains de foule lors de manifestations syndicales, de fêtes ou au cours de festivals ethniques (où il ne discriminait personne – Polonais, Grecs, Portoricains, Italiens, Afro-américains, Irlandais, Mexicains, Vietnamiens – si vous aviez une origine ethnique, Michael Parowski était votre homme). Il serrait les mains de tout le monde, donnait de grandes tapes dans le dos, saluait des deux mains et serrait les gens dans ses bras. On le voyait souvent murmurer quelque chose à l’oreille des dames, c’était typique de lui.

En plein milieu de la foule et du chaos, avec des dizaines ou même des centaines de personnes se pressant contre lui, il prenait immanquablement une vieille dame à part et lui murmurait quelque chose à l’oreille. Il arrivait parfois que les femmes rient, rougissent ou qu’elles agitent leur doigt d’un air réprobateur. La foule adorait ces moments et aucune des femmes n’a jamais répété ce qu’il lui avait dit. C’était une vraie mise en scène politique de haut niveau. Le genre de mise en scène que Susan adorait.

Ici, à Washington, c’était un syndicaliste convaincu. Au Capitole, il était l’un des plus grands défenseurs de la condition ouvrière. Il était plus hésitant sur certains autres sujets qui tenaient à cœur à Susan, comme le droit des femmes et des homosexuels, ou la protection de l’environnement. Mais pas au point qu’ils ne puissent pas s’entendre. En fait, dans un sens, ses points forts venaient compléter ceux de Susan. Elle pouvait parler de manière passionnée au sujet de la pureté de l’air ou de la santé des femmes, et il pouvait l’égaler en passion quand il parlait de la détresse du travailleur américain.

Mais même ainsi, Susan n’était pas sûre qu’il soit la personne idéale, bien que les aînés du parti lui aient assuré le contraire. Ils voulaient vraiment que ce soit lui. Pour dire vrai, ils avaient pratiquement pris la décision pour elle. Et ce qu’ils voulaient de lui, en plus de sa popularité, c’était sa ténacité. Il était l’image même de la solidité. Il ne buvait pas, il ne fumait pas et on avait l’impression qu’il ne dormait pas beaucoup. Il passait sa vie en avion et faisait continuellement des aller-retours entre Washington et son district. On pouvait le voir à des réunions de comité ou à des votes au Capitole à des heures tardives, et six heures plus tard, le retrouver dans un cimetière de Youngstown, frais et dispos, les larmes aux yeux, entourant de ses bras la mère d’un mécanicien qui venait de mourir tragiquement.

Bien que ses ennemis affirment qu’il soit resté ami avec certains truands, avec lesquels il avait grandi dans son quartier… eh bien, ça ne faisait qu’en ajouter à son image. C’était un homme doux mais dur, loyal mais pas quelqu’un à qui il fallait chercher des noises.

Il lui décocha un large sourire. « Madame la Présidente, que me vaut l’honneur ? »

« S’il te plaît, Michael. Continue à m’appeler Susan. »

« OK, Susan. »

Elle le mena jusqu’à son cabinet privé. Déjà en tant que Vice-Présidente, elle avait très vite cessé d’organiser les réunions importantes dans son bureau. Elle préférait l’ambiance informelle de son cabinet privé. Quand ils entrèrent, Kat Lopez les y attendait.

« Est-ce que vous connaissez ma chef de cabinet, Kat Lopez ? »

« Je n’ai pas encore eu ce plaisir. »

Ils se serrèrent la main. Kat lui sourit, ce qui était assez rare chez elle. « Monsieur le député, je suis l’une de vos plus grandes fans depuis le collège. »

« Ça ne doit pas remonter à très longtemps, alors. »

Kat eut alors une réaction plutôt inattendue chez elle. Elle se mit à rougir. Ce fut très bref et elle se reprit immédiatement, mais il était clair que cet homme faisait de l’effet aux gens.

Susan fit un geste à Parowski, en disant : « Viens, asseyons-nous. »

Parowski s’assit dans l’un des confortables fauteuils. Susan s’assit en face de lui et Kat resta debout derrière elle.

« Mike, on se connait depuis longtemps. Alors je ne vais pas tourner autour du pot. Comme tu le sais, je suis devenue Présidente du jour au lendemain, quand Thomas Hayes est mort. Ça m’a pris un peu de temps pour m’y faire. Et j’ai préféré attendre avant de choisir un Vice-Président. »

« J’ai entendu quelques rumeurs sur les événements d’hier, » dit Parowski.

Susan hocha la tête. « C’est vrai. Nous pensons qu’il s’agit d’une attaque terroriste. Mais nous la surmonterons, comme nous avons surmonté les autres, et nous continuerons à aller de l’avant. Et l’une des manières dont nous allons y parvenir, c’est avec un solide Vice-Président. »

Parowski la regarda dans les yeux.

Susan hocha la tête. « Toi. »

Il leva les yeux vers Kat Lopez, puis regarda à nouveau Susan. Il sourit, avant de se mettre à rire.

« Je pensais que tu allais me demander de récolter quelques votes pour toi au Capitole. »

« Oui, bien sûr, » dit-elle. « Je vais te demander de le faire. Mais en tant que Vice-Président et Président du Sénat, pas en tant que représentant de l’Ohio. »

Elle leva les mains au ciel. « Je sais… tu as sûrement l’impression que je te jette ça au visage sans prévenir, et c’est un peu le cas. Mais ça fait déjà quelque temps que je tâte le terrain et j’ai eu plusieurs réunions à ce sujet au cours des six dernières semaines. Et c’est à chaque fois ton nom qui revient. Tu jouis d’une énorme popularité dans ton district et tu attires une vaste majorité à travers tout le Nord des États-Unis, et même dans les districts des classes ouvrières du Sud. Et tu es aussi un candidat infatigable, qui pourra m’accompagner sur les routes quand le moment de faire campagne sera venu. »

« J’accepte, » dit-il.

« Prends ton temps, » dit Susan. « Je ne veux pas te presser. »

Un large sourire se dessina sur ses lèvres. C’était maintenant lui qui levait les mains au ciel. « Qu’est-ce que je peux dire ? C’est un rêve devenu réalité. J’adore ta manière de diriger. Tu as réussi à maintenir ce pays uni à un moment où il aurait pu s’effondrer. Tu as été beaucoup plus forte que les gens pensaient. »

« Merci, » dit Susan. Mais s’il l’avait vu pleurer toute seule dans cette même pièce, quand elle avait cru que quatre-vingt-dix mille personnes allaient mourir de l’Ébola, peut-être qu’il ne penserait plus la même chose.

Ou peut-être que si… justement.

Il pointa le doigt vers elle et continua à parler : « Et j’ajouterai encore autre chose. J’ai toujours su ça à ton sujet. J’ai toujours su lire à travers les gens et voir de quoi ils étaient capables. Et j’ai tout de suite vu ton potentiel, il y a des années, quand tu es arrivée pour la première fois à Washington. Demande à n’importe qui. Le 6 juin, j’ai dit à tout le monde de ne pas se préoccuper, qu’on était entre de bonnes mains. J’ai dit ça à tous les députés encore vivants du Capitole, aux journalistes et à au moins dix mille personnes de mon district. »

Susan hocha la tête. « Je sais. » Et c’était vrai. Ce détail avait été mentionné à plusieurs reprises au cours des réunions. Michael Parowski vous soutient à cent pourcents.

« Mais il faut aussi que tu saches quelque chose à mon sujet, » dit-il. « Je prends de la place. Non seulement physiquement, mais j’ai aussi une forte personnalité. Si tu cherches quelqu’un qui reste en retrait et se fonde dans le paysage, alors je ne suis pas ton homme. »

« Michael, on t’a examiné sous toutes les coutures. On sait tout de toi. On ne veut pas que tu restes en retrait. On veut que tu sois sur le devant de la scène et que tu sois toi-même. Nous avons besoin de ta force. Nous sommes occupés à reconstruire un gouvernement et nous voulons que la population ait de nouveau confiance en l’Amérique. C’est du gros boulot et c’est pour ça qu’on t’a choisi. »

Il la regarda avant de lui dire : « Tu sais vraiment tout de moi, hein ? »

Elle sourit. « Eh bien, presque tout. Il reste encore un mystère que j’aimerais élucider. »

« OK, » dit-il. « C’est quoi ? »

« Quand tu prends ces dames âgées à part, qu’est-ce que tu leur murmures à l’oreille ? »

Il rit. Une expression amusée lui envahit le visage. Pendant quelques secondes, il donna l’impression de rajeunir. Il eut presque l’air innocent, comme l’enfant espiègle qu’il avait dû être à une époque.

« Je leur dis combien elles sont jolies aujourd’hui, » dit-il. « Puis je leur demande de ne le dire à personne, que c’est notre petit secret. Et je pense vraiment chaque mot que je leur dis. »

Il secoua la tête d’un air émerveillé – en pensant aux gens, à la politique et à l’importance de ce que faisaient des gens comme lui et Susan chaque jour de leur vie.

« Ça marche à chaque fois, » dit-il.

CHAPITRE SEPT

11h45

Atlanta, Géorgie

« Est-ce que monsieur Li va bien ? Ça fait un bout de temps que je ne l’ai pas vu. »

L’homme était petit et mince, avec un dos étroit et voûté. Il portait un uniforme gris avec le nom de Sal cousu sur la poitrine. Il gardait à tout moment une cigarette allumée aux lèvres. Il la gardait même en bouche quand il parlait. Il ne ressentait apparemment pas le besoin de la jeter avant qu’elle soit finie. Et quand ça arrivait, il en rallumait une autre. Dans une main, il portait une grosse paire de pinces coupantes.

« Oh, il va bien, » dit Luke.

Ils traversèrent un long et large couloir, éclairé par des néons crépitants. Un petit rat surgit juste devant eux, avant de se précipiter au coin du mur. Sal n’eut apparemment pas l’air étonné par la présence du rat, alors Luke évita de faire un commentaire. Il regarda Ed, qui sourit et resta silencieux. Derrière eux, ils entendirent Swann tousser.

Le bureau de Li se trouvait dans un ancien entrepôt qui avait été subdivisé en de nombreux espaces plus petits au fil des ans. Des dizaines de petites entreprises y louaient un espace. Il y avait un quai de chargement au bout du couloir, qui était assez large pour accueillir des chariots permettant l’entrée et la sortie des marchandises.

Sal était une sorte de gérant ou de concierge de l’endroit. Il avait tout d’abord hésité à coopérer. Mais quand Ed et Swan lui avaient montré leur badge, il avait changé d’avis. Luke n’avait pas sorti le sien. C’était encore celui de l’Équipe d’intervention spéciale et cette équipe n’existait plus.

« Quel genre de problèmes est-ce qu’il peut bien avoir ? » demanda Sal.

Luke haussa les épaules. « Rien de trop grave. Quelques problèmes de taxes et de contrefaçons. Le genre de choses auxquelles il faut s’attendre venant d’un type qui importe des trucs de Chine. Vous devez voir ça tout le temps, non ? J’étais à Chongking il y a quelques années. Quand tu vas dans les entrepôts qui se trouvent sur les quais, tu peux acheter de nouveaux iPhones pour cinquante dollars et des montres Breitling pour cent cinquante. Ce ne sont pas des vrais, bien entendu. Mais en les regardant, c’est difficile de voir la différence. »

Sal hocha la tête. « Vous n’imaginez pas les trucs que je vois entrer et sortir d’ici. » Il s’arrêta devant une porte en acier ondulé, le genre qui s’ouvre en s’enroulant vers le haut. « Enfin… Li avait l’air très gentil. Il ne parle pas beaucoup anglais mais il arrive à se débrouiller avec le peu qu’il connait. Et il est très poli. Toujours à saluer et à sourire. Mais je ne suis pas sûr qu’il fasse beaucoup d’affaires. »

La porte en métal était fermée par une attache et un gros cadenas. Sal souleva les pinces coupantes et en un geste, il sectionna le cadenas.

« Ça y est, vous y êtes, » dit-il. « J’espère que vous trouverez ce que vous cherchez. »

Il avait déjà recommencé à traverser le couloir, en direction de son bureau.

« Merci pour votre aide, » lui cria Ed de loin.

Sal leva la main, sans prendre la peine de se retourner. « De rien. »

Ed se pencha et ouvrit la porte qui s’enroula vers le haut. Ils observèrent attentivement l’espace avant d’entrer. Ed passa sa main à l’intérieur et la bougea lentement de gauche à droite et de haut en bas, pour vérifier si l’entrée était piégée.

Mais l’entrepôt de Li n’était pas protégé par des pièges. Et il avait l’air d’avoir été laissé à l’abandon depuis un petit temps. Quand Luke alluma l’interrupteur, la moitié des lampes du plafond ne s’allumèrent pas. Des palettes de jouets bon marché emballés dans du plastique, étaient alignées les unes à côté des autres dans l’obscurité et recouvertes de bâches vertes. Des cartons de produits de nettoyage génériques, le genre qui se retrouvaient dans les magasins bon marché et les bazars, étaient empilés dans un coin, jusqu’au plafond. Tout était recouvert d’une fine couche de poussière. Il était clair que toutes ces choses étaient là depuis un bon bout de temps.

Apparemment, Li avait importé toute une cargaison d’objets divers pour garder les apparences, mais il n’avait jamais pris la peine d’en faire quoi que ce soit.

« Le bureau est par là, » dit Swann.

Dans le fond, se trouvait la porte qui permettait d’accéder au bureau. La porte était en bois, avec une vitre en verre dépoli sur le haut. Luke essaya d’ouvrir la porte mais elle était verrouillée. Il regarda Ed et Swann.

« Vous avez un truc sur vous pour crocheter les serrures ? Sinon, il va falloir qu’on retourne voir Sal et qu’on le persuade de nous ouvrir. »

Ed haussa les épaules et sortit ses clés de la poche de son jean. Il y avait une petite torche noire accrochée à l’anneau. Ed la tint en main comme une petite matraque et frappa la vitre. Le verre se brisa instantanément. Il passa le bras par l’ouverture et ouvrit la porte depuis l’intérieur. Il montra ensuite la torche à Luke.

« C’est comme un kit de crochetage de serrures, mais en plus rapide. »

Ils entrèrent. Le bureau était sombre, mais bien rangé. Il n’y avait pas de fenêtre. Il y avait une armoire de classement à trois tiroirs, qui était presque entièrement vide. Les tiroirs du bas ne contenaient que quelques reçus d’expédition. Dans celui du haut, ils trouvèrent quelques barres énergétiques, des petits sachets de bretzels et de chips, ainsi que des bouteilles d’eau minérale.

Il y avait une longue table en bois qui servait de bureau, avec un vieil ordinateur posé dessus. Sur l’un des côtés du bureau, il y avait de profonds tiroirs qui servaient à ranger des dossiers. Mais les tiroirs étaient fermés à clé.

« Ed ? » dit Luke.

Ed s’approcha, prit la poignée du premier tiroir en main, et tira violemment dessus pour l’ouvrir – à l’œil nu, on aurait pu croire qu’il s’agissait d’un simple tour de passe-passe mais Luke savait très bien à quoi s’en tenir. Ed ouvrit chacun des tiroirs en utilisant la même technique.

« Comme un kit de crochetage, » dit-il.

Luke hocha la tête. « Oui, mais en plus rapide. »

Il n’y avait pas grand-chose dans les tiroirs. Des crayons, des stylos, du matériel de bureau. Un paquet de chewing-gum. Une vieille calculatrice Texas Instruments. Au fond de l’un des tiroirs, ils trouvèrent trois CD-ROM dans des boîtiers sales en plastique. Sur les boîtiers, étaient indiquées les lettres A, B et C, écrites au marqueur sur un morceau de ruban adhésif. Le boîtier avec la lettre B était fendu.

Swann s’assit devant l’ordinateur et l’alluma. « C’est du vieux matos, » dit-il. « Ce truc a probablement plus de vingt ans. Je parie qu’il n’est même pas connecté à internet. Regardez ça… Ça date d’avant la connexion par câble, et bien avant le wifi. Il n’y a rien pour brancher un câble Cat 5. Si vous voulez connecter ce machin à internet, il faut retourner à l’époque de la numérotation à distance. »

Aux yeux de Luke, tout ça n’avait aucun sens.

« Pourquoi est-ce qu’un type de son envergure, venant d’un pays réputé pour ses piratages informatiques, aurait un ordinateur qui ne serait même pas connecté à internet et qui ne pourrait de toute façon pas l’être, même s’il le voulait ? »

Swann haussa les épaules. « J’ai bien quelques hypothèses en tête. »

« Tu veux nous en faire part ? »

« La première hypothèse, c’est qu’il ne soit pas Chinois. Qu’il ne fait partie d’aucun plan sophistiqué de sabotage. Le piratage qui a permis de contrôler le barrage n’était pas particulièrement compliqué. Il travaille peut-être pour un groupe sans aucun soutien gouvernemental. »

« S’il n’est pas Chinois, alors d’où vient-il ? » dit Luke.

Swann haussa les épaules. « Il pourrait tout aussi bien être Américain. Ou Canadien… Il a des pommettes saillantes et un faciès assez plat, alors il pourrait être Thaïlandais. Mais il a aussi une corpulence imposante, alors il pourrait venir du Nord de la Chine. Ou ça pourrait être un Américain, avec des ancêtres asiatiques. Quand j’étais avec vous dans cette cabane, je n’ai rien vu qui puisse indiquer une nationalité en particulier. Mais je ne le considérerais pas forcément Chinois, juste parce qu’il a un passeport issu par ce pays. »

« OK… Et quelles sont tes autres hypothèses ? » demanda Luke.

« Mon autre hypothèse, c’est qu’ils aient intentionnellement évité toute technologie afin qu’on ne puisse pas facilement découvrir leurs intentions. Il est impossible de pirater quelque chose qui ne se trouve pas en ligne. Si Li n’est pas connecté à internet, personne ne peut lire ses dossiers. La seule manière d’y accéder, c’est en venant ici, dans cet entrepôt perdu au milieu de nulle part, dans un quartier industriel pourri en périphérie d’Atlanta. Et la seule manière de découvrir l’existence de cet entrepôt, c’est de torturer Li ou, comme dans ton cas, de le menacer de le faire. Et c’est quelque chose qui n’aurait jamais dû arriver, vu que Li était supposé se donner la mort avant d’être arrêté. Ceux qui étaient supposés récupérer cet ordinateur, c’étaient les supérieurs de Li ou éventuellement Sal, si l’argent de la location n’était plus versé. Et Sal aurait sûrement jeté ce vieux machin à la poubelle, ou il l’aurait vendu pour dix dollars. »

L’écran de l’ordinateur apparut, avec une fenêtre demandant le mot de passe.

Swann fit un geste de la tête en direction de l’écran. « Et ça… ça aurait été suffisant pour que Sal ne cherche pas à en savoir plus. »

« Tu vas pouvoir passer outre ? » demanda Ed.

Swann sourit. « Tu rigoles ? Les cryptages des années quatre-vingt-dix, c’est un vrai jeu d’enfants. J’arrivais déjà à les contourner à l’âge de treize ans. »

Il tapa une commande et un vieil écran noir MS-DOS apparut dans le coin supérieur gauche. Il tapa plusieurs autres commandes et il hésita un instant avant de continuer. L’écran Windows apparut à nouveau, sans plus demander de mot de passe.

Une fois qu’il eut accès à l’écran du bureau, Swann cliqua à plusieurs endroits. Ça ne lui prit pas très longtemps. « Il n’y a aucun fichier, » dit-il. « Aucun document Word, ni Excel, aucune photo, rien. »

Il regarda Luke par-dessus son épaule.

« Cet ordinateur a été nettoyé. Le disque dur est toujours là et il fonctionne mais il n’y a plus rien dessus. Je pense que notre ami monsieur Li nous a joué un mauvais tour. »

« Est-ce que tu peux récupérer les fichiers qui ont été supprimés ? » demanda Luke.

Swann haussa les épaules. « Peut-être, mais je ne pourrai pas le faire d’ici. Et peut-être qu’il n’y avait aucun fichier, de toute façon. Il faudra retirer le disque dur et le ramener à la NSA pour en être sûr. »

Luke se sentit légèrement démoralisé. Normalement, il avait plutôt confiance en sa capacité à lire à travers les gens. Mais peut-être que Swann avait raison. Peut-être que Li leur avait joué un mauvais tour. Il avait vraiment eu l’air terrorisé, mais peut-être qu’il avait fait semblant. Mais pourquoi ferait-il ça ? Il devait savoir que Luke allait revenir et qu’il n’y aurait aucun moyen de l’éviter.

« Et les CD ? » dit-il. « Si on y jetait un coup d’œil. »

Swann prit le premier CD, sur lequel la lettre A était indiquée. Il le prit du bout des doigts, comme s’il contenait une maladie contagieuse. « Oui, pourquoi pas… »

Il fit glisser le CD dans la fente. L’ordinateur se mit soudain à tourner à plein régime. On aurait dit un avion se préparant au décollage. Après un moment, une fenêtre apparut à l’écran. C’était une liste de fichiers Word. Ils avaient des noms qui suivaient des motifs séquentiels, le plus souvent avec un mot et un numéro. Il y avait des dizaines et des dizaines de fichiers.

Le premier mot de la liste était le mot ‘air’, et ça allait de ‘air1’ à ‘air27.’ Vers la fin de la liste, il y avait un autre mot qui semblait intéressant et c’était le mot ‘réseau’, et ça allait de ‘réseau1’ à ‘réseau9.’ Entre ces deux mots, il y avait aussi le mot ‘barrage.’ Et ça allait de ‘barrage1’ à ‘barrage39.’ Plus loin, il y avait ‘plateforme1’ à ‘plateforme19.’ Et ‘train1’ à ‘train21.’

« Je commence avec le mot ‘air’ ? » demanda Swann.

« Oui, vas-y. »

Swann ouvrit le document air1. Les mots en haut du document faisaient office de titre. Aéroport international John F. Kennedy, New York City.

« OK, » dit Swann.

Il y avait une brève description de l’aéroport, comprenant la date d’inauguration, sa localisation exacte en latitude et en longitude, le nombre de vols et de passagers par an, les principales compagnies aériennes qui y opéraient, etc. Il y avait ensuite plusieurs pages de photos du terminal, un plan de la ville de New York sur lequel l’aéroport était indiqué, et plusieurs plans des terminaux. Après ça, les informations devenaient plus techniques – de longues listes de données apparurent, un mélange de chiffres et de lettres. Swann les examina attentivement en restant silencieux.

« Houston, on a un problème, » finit-il par dire.

*

Le SUV noir fonçait à toute vitesse à travers les rues de la ville, en direction de l’autoroute.

Luke essayait de joindre la Présidente mais son appel avait été mis en attente. Derrière lui, il pouvait entendre les conversations d’Ed et de Swann qui parlaient tous deux au téléphone.

« Je vais avoir besoin d’une équipe d’analystes pour passer le tout au peigne fin, » dit Swann. « C’est ça, dès que j’aurai pu tout télécharger. Non, c’est sur des CD-ROM. Je ne peux pas le faire pour l’instant. Je suis en voiture. Oui. Il y a une base en périphérie de la ville, la base aéronavale d’Atlanta, et on ne va pas tarder à y arriver. J’imagine que quelqu’un pourra me prêter un système avec un lecteur CD. Pourquoi penses-tu qu’il l’a mis sur CD ? Pour que personne ne puisse le pirater, bien sûr ! Les CD se trouvaient dans un bureau fermé à clé, dans un vieil entrepôt dont personne n’avait entendu parler. »

Ed parlait plus fort que Swann. « J’ai besoin que vous me passiez le camp FEMA qui se trouve dans la forêt Chattahoochee, » dit-il. Il resta un moment silencieux, à écouter ce qu’on lui répondait.

« Je vous assure qu’il existe. Essayez avec Campement de la Liberté ou le Camp de Nulle part. J’y étais ce matin. Là-bas, se trouve un type du nom de Pete Winn. Je ne connais pas son titre exact. Directeur de camp, peut-être. Ou professeur de natation, je ne sais pas. Oui, je sais que ce camp n’est référencié nulle part. Mais j’ai tout de même besoin de parler à ce Winn. Il a un prisonnier. Il saura duquel je veux parler. Nous avons confirmé les informations reçues de ce prisonnier. Oui, je vous le répète. Ce détenu est maintenant un prisonnier de très grande valeur. Nous sommes en route pour le camp. Le détenu doit être préparé pour un autre interrogatoire. Il doit être surveillé vingt-quatre heures sur vingt-quatre par des caméras et je veux en gardien en permanence devant sa porte. Il est très probable qu’il essaye de s’enfuir ou de se suicider. »

Ed s’interrompit à nouveau. « Faites ce qu’il faut mais trouvez-moi ce camp ! Demandez une autorisation spéciale à votre supérieur ! Puisque je vous dis que je m’y trouvais ce matin. »

Luke était toujours en attente de parler à la Présidente. Il était un peu surpris par lui-même. Ils étaient partis du camp FEMA sans se demander comment ils allaient pouvoir les recontacter par la suite. Luke avait tout simplement supposé qu’ils pourraient leur parler à travers les canaux standards de communication. Il se rendait compte qu’il était un peu rouillé après ces deux mois sans rien faire. Est-ce qu’il aurait fait la même supposition s’il avait continué à travailler sans interruption ? Probablement pas.

Un instant plus tard, il entendit un clic sur la ligne. Quelqu’un avait prit l’appel et il entendit le bruit étouffé de conversations.

« Kat Lopez, » dit une voix à l’autre bout du fil.

« Salut, Kat. C’est Luke Stone. Il faut que je parle à Susan. »

« Salut, Luke. Susan est en réunion mais je peux prendre un message pour elle. »

« Je préférerais lui parler directement, si ça ne vous dérange pas. »

« Luke, je suis sa chef de cabinet. Je suis autorisée à prendre des messages pour elle. Vous pouvez me faire confiance. Je prendrai bien note et je ne manquerai pas de l’informer. »

« Mais nous n’avons pas beaucoup de temps devant nous, Kat. »

La voix de Kat répondit d’un ton ferme. « Alors si vous arrêtiez de vous demander si vous allez ou pas me laisser un message, on pourrait gagner du temps. »

Luke soupira. C’était comme ça que ça se passait. Ils faisaient appel à vous, ils vous envoyaient en mission et tout devait être fait le plus vite possible. Puis quand vous vouliez leur communiquer les renseignements que vous aviez trouvés, ils étaient en réunion. Laissez un message et on vous rappellera.

« OK, Kat, vous avez un stylo ? »

« Très marrant, » dit-elle. Bien sûr… elle était plutôt du genre à pianoter sur une tablette. Luke n’était jamais vraiment parvenu à s’adapter à ces nouvelles technologies. Il était encore du genre à préférer prendre des notes sur des bouts de papier.

« Nous avons interrogé Li Quiangguo ce matin. Sur base des informations qu’il nous a fournies, nous avons découvert une série de listes contenant des dizaines d’infrastructures qui constituent des cibles potentielles d’attaques terroristes. Notre IT pense qu’il s’agira probablement de cyberattaques, comme celle qui a ouvert les écluses du barrage de Black Rock. Chaque infrastructure cible a sa propre documentation, qui décrit la technologie qui y est utilisée, les spécificités du réseau y compris les limites de données, la taille de la dorsale, la rapidité de traitement, ainsi que l’âge de la technologie utilisée et ses points faibles. »

« De quel genre d’infrastructures s’agit-il ? » demanda-t-elle.

« Des aéroports, des centrales électriques, des réseaux entiers de distribution d’électricité, des plateformes pétrolières, des raffineries, des barrages, des ponts, des systèmes de métro et de trains. Il y a un peu de tout. »

« On a une indication de dates en particulier ? »

« Oui. Le dernier document de la liste était appelé Heure zéro. Nous l’avons ouvert. Il y est indiqué la date du 18 août, dans deux jours. »

Un silence s’installa sur la ligne.

Luke continua à parler. « On retourne interroger Li. Il nous faudra environ quatre-vingt-dix minutes pour arriver jusque-là. Les listes de cibles se trouvent sur des CD. Mon spécialiste IT, Swann, va rester ici, à Atlanta, pour superviser le téléchargement des données afin qu’elles puissent être envoyées le plus rapidement possible aux analystes du FBI, de la NSA et de la CIA. Ce serait une bonne idée de faire appel à la sûreté de l’état, pour qu’ils soient prêts dès que les résultats des analyses seront disponibles. Et nous avons besoin que vous nous aidiez à obtenir tous les analystes nécessaires. On aura probablement besoin d’une centaine de personnes dès cet après-midi, ce qui veut dire qu’il faudra la coopération de plusieurs agences. »

« Il vaudrait mieux que vous parliez directement à Susan, » dit Kat.

« Oui, c’est exactement ce que je vous ai demandé depuis le début. Ça nous aurait évité de perdre du temps. »

« Je comprends. »

Le silence se fit à nouveau sur la ligne.

Ed regardait en direction de Luke. Il avait les yeux écarquillés. Ses traits étaient affligés. On aurait dit qu’il venait juste d’apprendre une nouvelle désagréable.

Derrière la tête d’Ed, Luke voyait défiler les bâtiments et les panneaux d’affichage. Ils se trouvaient maintenant sur un pont d’autoroute.

« J’ai le pilote de l’hélicoptère en ligne. C’est ce que j’ai pu faire de mieux. »

« OK, qu’est-ce qu’il dit ? »

« Il nous attend sur l’héliport d’Atlanta. Et il est en contact avec le campement FEMA. »

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399 ₽
Возрастное ограничение:
0+
Дата выхода на Литрес:
15 апреля 2020
Объем:
382 стр. 5 иллюстраций
ISBN:
9781094313023
Правообладатель:
Lukeman Literary Management Ltd
Формат скачивания:
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