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— Oui.

— Et qu’est-ce que Speck sait sur moi ?

L’homme secoua la tête.

— Je ne sais pas.

Murphy envoya un coup de poing et frappa l’homme au visage. Il sentit l’os de l’arête du nez de l’homme se briser. L’homme recula brusquement la tête. Deux secondes plus tard, du sang commença à couler d’une narine, sur le visage de l’homme puis sur son menton.

Murphy recula d’un pas. Il ne voulait pas avoir de sang sur ses chaussures.

— Essaye encore.

— Speck a dit qu’il y avait un agent secret des opérations spéciales qui avait des informations de première main sur l’emplacement du chef de cabinet du Président, Lawrence Keller. Le gars des opérations spéciales allait se rendre à Montréal. Il faisait partie de l’équipe censée sauver Keller. Il était peut-être le chauffeur. Il voulait de l’argent. Après ça …

L’homme secoua la tête.

— Tu penses que je suis ce gars ? dit Murphy.

L’homme hocha la tête, pitoyable, désespéré.

— Pourquoi le penses-tu ?

L’homme dit quelque chose à voix basse.

— Quoi ? Je ne t’ai pas entendu.

— J’y étais, dit l’homme.

— À Montréal ?

— Oui.

Murphy secoua la tête. Il sourit. Cette fois-ci, il rit, juste un peu.

— Hé ben.

L’homme hocha la tête.

— T’as fait quoi ? Tu t’es tiré quand ça s’est mis à chauffer ?

— J’ai vu où ça allait mener.

— Et tu m’as vu.

Ce n’était pas une question, mais l’homme y répondit quand même.

— Oui.

— As-tu dit à Speck à quoi je ressemblais ?

L’homme haussa les épaules. Il regardait fixement le sol en béton.

— Parle ! dit Murphy. Je n’ai pas toute la nuit.

— Après ça, je ne lui ai plus jamais reparlé. Il s’est retrouvé en prison avant le lever du soleil.

— Regarde-moi, dit Murphy.

L’homme leva les yeux.

— Répète-moi ça, mais sans détourner le regard, cette fois-ci.

L’homme regard Murphy droit dans les yeux.

— Je n’ai pas parlé à Speck. Je ne sais pas où ils le détiennent. Je ne sais pas s’il avoue ou pas. Je ne sais pas du tout s’il sait qui vous êtes mais, s’il le sait, visiblement, il ne vous a pas encore dénoncé.

— Pourquoi ne t’es-tu pas enfui ? dit Murphy.

Ce n’était pas une question en l’air. Murphy était lui-même forcé de se poser cette question. Il pouvait disparaître. Maintenant, ce soir ou demain matin. Bientôt, en tout cas. Il avait deux millions et demi de dollars en liquide. Ça pouvait permettre à un homme comme lui de vivre longtemps et, avec ses compétences exceptionnelles, il pourrait gagner un peu d’argent supplémentaire de temps à autre.

Cependant, il passerait le reste de sa vie à se méfier de tout le monde et, s’il s’enfuyait, une des personnes susceptibles de lui causer des ennuis serait Luke Stone. Ce n’était pas une idée agréable.

L’homme haussa à nouveau les épaules.

— J’aime bien cet endroit. J’aime ma vie. J’ai un jeune fils que je vais voir parfois.

L’homme venait de mentionner son fils et Murphy n’aimait pas ça. Ce tueur au sang froid, un homme qui venait d’avouer le meurtre d’une jeune mère et qui avait collaboré à l’assassinat de deux petits enfants et Dieu savait à quoi d’autre, essayait de jouer la carte de la compassion.

Murphy alla à la chaise et sortit son arme de l’étui. Il vissa le silencieux au canon de l’arme. C’était un bon silencieux. Il ferait peu de bruit. Murphy pensait souvent qu’il avait le son d’une agrafeuse de bureau qui trouait des piles de feuilles de papier. Clac, clac, clac.

— Vous n’avez aucune raison de me tuer, dit l’homme derrière lui. Je n’ai rien dit à qui que ce soit. Je ne parlerai à personne.

Murphy ne s’était pas encore retourné.

— Tu n’as jamais entendu dire qu’il fallait régler les derniers détails ? Je veux dire, c’est bien dans ce secteur que tu travailles, n’est-ce pas ? Speck sait peut-être qui je suis, ou pas, mais toi, tu le sais sans aucun doute.

— Savez-vous combien de secrets je connais ? dit l’homme. Si on me capturait, croyez-moi, vous seriez le cadet de leurs soucis. Je ne sais même pas qui vous êtes. Je ne connais pas votre nom. J’ai vu un gars cette nuit-là. Il avait peut-être les cheveux noirs. Il était petit. Il mesurait un mètre soixante-quinze. Ç’aurait pu être n’importe qui.

Murphy se retourna et lui fit face. L’homme transpirait et la sueur apparaissait sur son visage. Il ne faisait pas si chaud que ça, ici.

Murphy prit l’arme et la pointa sur le centre du front de l’homme. Pas d’hésitation. Pas de son. Il ne dit pas un seul mot. Chaque ligne était d’une clarté extrême et l’homme semblait être baigné dans un cercle de lumière blanc vif.

L’homme parlait vite, maintenant.

— Écoutez, ne faites pas ça, dit-il. J’ai du liquide. Beaucoup de liquide. Je suis le seul à savoir où il est.

Murphy hocha la tête.

— Oui, moi aussi.

Il appuya sur la détente et …

CLAC.

Il y eut un peu plus de bruit qu’en temps normal. Murphy n’avait pas imaginé qu’il y aurait tant d’écho dans ce grand espace vide. Il haussa les épaules. Aucune importance.

Il partit sans regarder les saletés qu’il y avait par terre.

Dix minutes plus tard, il était dans sa voiture et il conduisait sur le périphérique. Son téléphone portable sonna. Le numéro était dissimulé. Cela ne signifiait rien. Cela pouvait être bon ou mauvais. Il décrocha.

— Oui ?

Une voix féminine :

— Murph ?

Murphy sourit. Il reconnut immédiatement la voix.

— Trudy Wellington, dit-il. Tu appelles à un beau moment de la soirée. Si tu me dis d’où tu appelles, j’arrive tout de suite.

Elle rit presque. Il l’entendit dans sa voix. Il fallait les faire rire. C’était le meilleur moyen d’accéder à leur cœur puis à leur chambre à coucher.

— Euh … oui. Calme tes ardeurs, Murph. J’appelle du bureau de l’EIS. Il y a une crise et nous sommes convoqués. Don veut que plusieurs personnes viennent ici maintenant, aussi vite que possible, et tu fais partie de la liste.

CHAPITRE QUATRE

22 h 20, Heure de l’Est

Comté de Fairfax, Virginie

Banlieue de Washington, DC

— À quoi penses-tu, mon bébé ?

Luke Stone chuchota les mots. Il fut probablement le seul à les entendre.

Il était assis sur le long sofa blanc de son nouveau salon et tenait sur ses genoux son bébé de quatre mois, Gunner. Gunner était un bébé gros et lourd. Il portait une couche et un tee-shirt bleu sur lequel on pouvait lire Le Plus Beau Bébé du Monde.

Il s’était endormi dans les bras de Luke quelques minutes auparavant. Son petit ventre se levait puis retombait et il dormait en ronflant doucement. Est-ce que les bébés étaient censés ronfler ? Luke ne savait pas mais, d’une façon ou d’une autre, le son était réconfortant. Il était même beau.

Alors que Luke tenait Gunner dans la pénombre et regardait dans la pièce, il essayait de comprendre comment il avait pu avoir cette maison.

C’était un cadeau des parents de Becca, Audrey et Lance. Rien que ça était difficile à admettre. Avec son salaire de l’EIS, il n’aurait jamais pu se permettre d’acheter cette maison, et encore, il gagnait beaucoup plus que quand il avait été à l’Armée. Becca ne travaillait pas du tout. Même si Becca avait travaillé, à eux deux, ils n’auraient jamais pu se permettre d’acheter cette maison. Finalement, cela rappelait à Luke que la famille de Becca avait vraiment beaucoup d’argent.

Il avait su qu’ils étaient riches, mais Luke avait grandi sans argent. Il ne savait pas ce qu’était la richesse. Il avait habité avec Becca dans le chalet de sa famille, qui se dressait face à la Baie de Chesapeake sur la rive est. Pour Luke, ce chalet vieux de trois siècles, bien que distant d’une heure et demi de voiture de son lieu de travail, avait été une amélioration considérable question logement. Luke avait l’habitude de dormir par terre, à la dure, ou de ne pas dormir du tout.

Donc, cet endroit le stupéfiait.

Il examina la maison. C’était une maison moderne, avec des portes-fenêtres, comme celles qu’on voyait dans les magazines d’architecture. Elle ressemblait à une boîte en verre. Quand l’hiver serait là, quand il neigerait, il imaginait que la maison serait peut-être semblable à une de ces vieilles boules à neige que les gens avaient quand il était enfant. Il imagina la période de Noël qui arrivait, assis dans ce salon stupéfiant enfoncé dans le sol, avec l’arbre dans le coin, la cheminée allumée et la neige qui tomberait tout autour.

Et ce n’était que le salon. Il y avait aussi l’immense cuisine campagnarde avec l’îlot au milieu et le réfrigérateur géant à deux portes, avec le congélateur en bas. Il y avait aussi la chambre principale et la salle de bain principale. Et aussi le reste de la maison qui, de plus, se trouvait à environ douze minutes de voiture du bureau.

De l’endroit où Luke était assis sur le sofa, il voyait les grandes fenêtres orientées vers le sud et vers l’ouest. La maison se dressait sur une petite colline d’herbes ondulantes. La hauteur améliorait son point de vue. La maison était dans un quartier tranquille qui contenait d’autres grandes maisons situées en retrait de la rue. On ne se garait pas dans la rue. Dans ce quartier, les gens se garaient dans leurs propres allées ou garages.

Luke et Becca n’avaient pas encore rencontré leurs voisins, mais Luke imaginait qu’ils étaient avocats, peut-être docteurs, ou qu’ils occupaient peut-être des postes élevés dans de grandes entreprises. Il ne savait pas quoi en penser. Pas des gens, mais de l’endroit.

D’abord, il ne faisait pas confiance à Audrey et à Lance.

Les parents de Becca ne l’avaient jamais aimé. Ils l’avaient toujours exprimé clairement. Même après la naissance de Gunner, ils ne les avaient laissés occuper le chalet qu’à contrecœur. Audrey était notamment la reine des réflexions narquoises et des manœuvres de déstabilisation.

Il se la représenta dans son esprit. En elle, quelque chose lui rappelait un corbeau. Elle avait des yeux enfoncés aux iris si sombres qu’ils avaient presque l’air d’être noirs. Elle avait un nez pointu, comme un bec. Elle avait de petits os et un corps mince. Enfin, elle avait tendance à rester aux alentours comme un messager qui apportait de mauvaises nouvelles.

Alors, l’Équipe d’Intervention Spéciale avait effectué deux opérations à profil élevé et Audrey et Lance avaient rencontré le légendaire Don Morris, pionnier des opérations spéciales et directeur de l’EIS.

Alors, Audrey et Lance avaient subitement considéré que Luke et Becca avaient besoin d’une maison plus belle et plus proche du travail de Luke. Ainsi, comme par un coup de baguette magique, ils s’étaient retrouvés ici.

Luke secoua la tête, encore stupéfait par la vitesse du changement. Au cours de sa carrière, il s’était fait connaître pour ses réflexes soudains et son temps de réaction rapide, mais l’achat de cette maison s’était déroulé si vite qu’il en avait presque eu le vertige.

Deux personnes qui le détestaient intensément depuis des années venaient de lui offrir le cadeau le plus somptueux qu’il ait jamais reçu.

Il s’arrêta et écouta le silence. Il inspira profondément, presque en tandem avec son jeune fils. Non. C’était faux. Le plus beau cadeau qu’on lui ait jamais donné, c’était ce petit garçon. La maison n’était rien, comparée à ça.

Sur la table devant lui, son téléphone s’éclaira. Il le regarda fixement. La lumière bleue diffusait des ombres folles dans la pénombre. Le téléphone était silencieux parce que Luke avait désactivé la sonnerie. Il n’avait pas voulu déranger le bébé, ni la maman du bébé, qui profitait d’un sommeil bien mérité et fort nécessaire dans la chambre.

Il lut l’heure sur l’écran. Il était plus de dix heures du soir. Il ne pouvait y avoir qu’un nombre réduit de raisons à cet appel. Soit un vieux copain de l’armée l’appelait ivre, soit c’était une erreur, soit … Il laissa le téléphone sonner jusqu’à ce qu’il s’arrête et que sa lumière s’éteigne.

Un moment plus tard, le téléphone recommença à sonner.

Luke soupira et jeta un coup d’œil au numéro. C’était le travail, bien sûr.

Il prit le téléphone.

— Allô ?

Il le dit de la voix Je dors et pourquoi m’embêtez-vous la plus douce possible.

Il entendit une voix féminine. Trudy Wellington. Il se la représenta. Elle était jeune, belle, intelligente et elle avait des cheveux marron qui lui tombaient en cascade sur les épaules.

— Luke ?

— Oui.

Elle était en mode pragmatique. Ce qui avait failli arriver entre eux, et dont ils n’avaient jamais parlé, semblait disparaître dans le rétroviseur. C’était probablement mieux comme ça.

— Luke, il y a un problème. Don rassemble toute l’équipe. J’y suis déjà. Swann, Murphy et Ed Newsam sont en chemin.

— Maintenant ? demanda-t-il alors qu’il connaissait la réponse.

— Oui. Maintenant.

— Est-ce que ça peut attendre ? dit Luke.

— Pas vraiment.

— Mmm.

— Au fait, Luke, amène un sac d’évacuation.

Il leva les yeux au ciel. Son travail et sa vie de famille avaient du mal à coexister. Pour la énième fois, il se demanda si son gagne-pain était compatible avec le foyer heureux qu’il essayait de fonder avec Becca.

— Où allons-nous ? dit-il.

— C’est top-secret. Tu l’apprendras au briefing.

Il hocha la tête.

— OK.

Il raccrocha et inspira profondément.

Il souleva le bébé et le prit dans ses bras, se leva et prit le couloir pour se rendre à la chambre principale. Il faisait noir, mais il y voyait assez bien. Becca somnolait dans le lit king-size. Il se baissa et plaça le bébé à côté d’elle en lui effleurant la peau. Dans son demi-sommeil, elle produisit un petit son de plaisir. Elle posa doucement une main sur le bébé.

Il les contempla un petit moment. Maman et bébé. Une vague d’amour si intense qu’il n’aurait pas pu la décrire le submergea. Comme il la comprenait à peine, il n’aurait jamais pu l’expliquer à quelqu’un d’autre. C’était au-delà des mots.

Ils étaient toute sa vie.

Mais il fallait aussi qu’il parte en mission.

CHAPITRE CINQ

23 h 05, Heure de l’Est

Quartier général de l’Équipe d’Intervention Spéciale

McLean, Virginie

— Que faisons-nous ici ? demanda Kevin Murphy.

Il portait une tenue d’affaires décontractée, comme s’il sortait juste d’une soirée de jeunes cadres.

Mark Swann, dont la tenue n’avait rien absolument en commun avec celle d’un cadre, sourit. Il portait un tee-shirt Ramones noir et un jean troué. Il avait les cheveux en queue de cheval.

— D’un point de vue existentiel ? dit-il.

Murphy secoua la tête.

— Non. Je veux juste savoir pourquoi nous sommes tous ensemble dans cette salle au milieu de la nuit.

La salle de conférence, que Don Morris appelait parfois non sans optimisme le centre de commandement, contenait une longue table rectangulaire avec un téléphone mains libres installé au centre. Tous les mètres, il y avait des ports de données où les gens pouvaient brancher leurs ordinateurs portables. Il y avait deux grands moniteurs vidéo au mur.

La salle n’était pas très grande, mais Luke y avait participé à des réunions où jusqu’à vingt personnes avaient été présentes. Vingt personnes dans cette pièce, cela donnait l’impression de prendre le métro de Tokyo à l’heure de pointe.

— OK, les gars, dit Don Morris.

Don portait une chemise élégante moulante, les manches roulées au milieu des avant-bras. Devant lui, il avait une tasse de café dans un gobelet en carton épais. Ses cheveux blancs étaient coupés au ras du crâne, comme s’il était allé chez le coiffeur cet après-midi. Son langage corporel était détendu, mais ses yeux avaient la dureté de l’acier.

— Merci d’être venus si vite. Bon, laissons tomber les salamalecs, si vous voulez bien.

Partout dans la pièce, les gens approuvèrent d’un murmure. Mis à part Don Morris, Swann, Murphy et Luke, il y avait Ed Newsam. Avachi sur sa chaise, il portait un tee-shirt noir à manches longues qui moulait son torse musclé, un jean et des bottes de travail jaunes Timberland délacées. On aurait dit que cette réunion l’avait tiré d’un sommeil profond.

Enfin, il y avait Trudy Wellington. Elle portait un chemisier et un pantalon élégant, comme si elle n’était jamais rentrée chez elle après le travail. Ses lunettes rouges étaient poussées contre son visage. Elle paraissait être en forme, buvait du café elle aussi et avait déjà commencé à saisir des informations sur l’ordinateur portable qui se trouvait devant elle. Quoi qu’il se passe, elle avait été mise au courant en premier.

À l’autre bout de la table, près des écrans vidéo, il y avait un général quatre étoiles grand et mince en uniforme de cérémonie impeccable. Ses cheveux gris étaient coupés au ras du crâne. Son visage était imberbe, comme s’il s’était rasé juste avant d’entrer ici. Même s’il était tard, cet homme avait l’air frais et prêt à fonctionner vingt-quatre ou quarante-huit heures de plus, ou plus longtemps si nécessaire.

Luke l’avait déjà rencontré une fois mais, même s’il ne l’avait jamais vu, il aurait quand même connu cet homme à fond. À chaque matin au réveil, il faisait son lit avant tout autre chose ; c’était sa première tâche de la journée et elle annonçait les autres. Avant que le soleil ne fasse son apparition dans le ciel, cet homme avait probablement déjà couru seize kilomètres et englouti du gruau froid et du café fort. On reconnaissait l’homme ambitieux de West Point à un kilomètre.

Assis à la table près de lui, il y avait un colonel avec un ordinateur portable et une pile de feuilles. Le colonel n’avait pas encore levé les yeux de l’ordinateur.

— Messieurs, dit Don Morris, j’aimerais vous présenter le Général Richard Stark du Comité des Chefs d’États-Majors Interarmées et son aide de camp, le Colonel Pat Wiggins.

Don regarda le général.

— Dick, le groupe d’experts de l’Équipe d’Intervention Spéciale est à ta disposition.

— Dans la limite de ses capacités, dit Mark Swann.

Don Morris fit la tête à Swann, comme pour faire taire un fils adolescent grande gueule, mais il ne dit rien.

— Messieurs et madame, dit Stark en baissant la tête à l’intention de Trudy, j’irai droit au but. Une crise avec prise d’otages est en cours dans la zone arctique de l’Alaska et le Président des États-Unis a autorisé un sauvetage. Il a précisé que le sauvetage devrait s’effectuer sous la supervision et avec la participation d’une agence civile, d’où votre intervention.

— Pendant que je parlais au Président, je me suis dit que vous pourriez nous donner ce que ces deux mondes avaient de mieux. En effet, l’Équipe d’Intervention Spéciale est un organisme d’application de la loi civil, mais il regorge d’agents spéciaux de l’armée. Le directeur du FBI a approuvé votre participation et Don a eu la délicatesse d’organiser cette réunion au dernier moment.

Il regarda le groupe.

— Vous me suivez jusque-là ?

Il y eut un murmure approbateur général.

Le colonel contrôlait l’écran vidéo à partir de son ordinateur portable. Une carte du nord de l’Alaska y apparut avec une bande de l’Océan Arctique. Dans la mer, un petit point était cerclé de rouge.

— La situation évolue rapidement. Ce que je peux vous dire, c’est que, il y a une heure et demie, une plate-forme pétrolière de l’Océan Arctique a été attaquée et envahie par un groupe d’hommes lourdement armés. Environ quatre-vingt-dix hommes étaient stationnés sur cette plate-forme et sur l’île artificielle qui l’entoure et nous ne savons pas combien de ces hommes ont été tués au cours de l’attaque initiale. Certains ont aussi été pris en otage, mais nous ne savons pas non plus combien.

— Qui a attaqué la plate-forme ? dit Luke.

Le général secoua la tête.

— Nous ne savons pas. Ils ont rejeté nos tentatives de contact, mais ils ont envoyé des vidéos des ouvriers de la plate-forme. Ils les ont rassemblés dans une salle et des hommes masqués de noir les tiennent en joue avec leurs armes. Les données audio de l’équipement de surveillance de la plate-forme ont été mises à disposition par l’entreprise propriétaire de la plate-forme. Le son est mauvais, mais on repère quand même quelques voix. Mis à part l’anglais que parlent les ouvriers de la plate-forme, il semblerait que certains attaquants parlent une langue d’Europe de l’Est, peut-être une langue slave, même si nous n’en avons aucune preuve formelle.

Sur l’écran, la carte fut remplacée par une photo aérienne de la plate-forme et du camp qui l’entourait. La plate-forme pétrolière, probablement haute de trente ou quarante étages, occupait la première image. Au-dessous de la plate-forme, il y avait de nombreux bâtiments de type hutte Quonset reliées par des passerelles. Autour de ce camp minuscule s’étendait une vaste mer gelée.

Un gros plan apparut. Il montrait le camp et les bâtiments en détail. On ne voyait personne se tenir debout où que ce soit. Il y avait au moins une dizaine de corps qui gisaient au sol. Certains étaient entourés d’un halo de sang.

Une autre image apparut. Étalée au sol, il y avait une grande bannière blanche avec des lettres peintes en noir.

AMÉRIQUE = MENTEURS + HYPOCRITES.

— Sacré message, dit Swann.

— Il faut reconnaître que cela nous apporte très peu de renseignements. La bannière que vous voyez suggère certainement une attaque par des ressortissants étrangers. Toutes nos vidéos par drone nous montrent un camp privé de personnel. Les attaquants semblent avoir emmené tous les ouvriers survivants à l’intérieur. Est-ce à l’intérieur de ces bâtiments que vous voyez ou à bord de la plate-forme elle-même ? Nous ne le savons pas.

Pendant un moment, l’écran se vida.

— Nous avons un plan pour reprendre ce complexe, neutraliser les terroristes et sauver tout le personnel civil qui est encore en vie. Le plan suppose une infiltration et un assaut, essentiellement à l’aide de Marines en service actif mais aussi de vous-mêmes. Pour exécuter ce plan, il faut que nous vous emmenions dans la région arctique de l’Alaska. Cela signifie qu’il faut que nous nous dépêchions.

Ed Newsam leva une main.

— Quand comptez-vous exécuter ce plan ?

Le général hocha la tête.

— Ce soir. Avant l’aube. Toutes les expériences que nous avons eues avec des terroristes au cours des années nous montrent que, si on laisse une situation de ce type de prolonger, c’est la meilleure façon d’échouer, sinon même d’obtenir un désastre. Le public s’y intéresse et tous les politiciens aussi. Les médias en parlent en boucle à la télévision, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Deviner les intentions du gouvernement devient un passe-temps national. Si on attend longtemps, cela excite et inspire les autres terroristes d’autres pays. Des images d’otages aux yeux bandés tenus en joue …

Il secoua la tête.

— N’y pensons pas trop. Les terroristes ont attaqué sans avertissement et nous ferons de même. Nous les frapperons avant l’aube, sous couvert de l’obscurité, seulement quelques heures après leur propre assaut. Cela nous permettra de reprendre l’initiative. Une incursion réussie, car je suis sûr qu’elle le sera, démontrera aux autres groupes de terroristes que nous ne plaisantons pas.

Stark avait dû voir que le personnel de l’EIS le regardait fixement.

— Nous pensons que l’Équipe d’Intervention Spéciale est l’agence civile idéale pour participer à cette opération. Si vous n’êtes pas d’accord …

Il ne termina pas sa phrase.

Luke ne pouvait s’empêcher d’admettre qu’il n’aimait pas la direction que prenait cette mission. Il venait de laisser sa femme et son bébé au lit, et maintenant, il était censé partir pour l’Arctique ?

— La zone arctique de l’Alaska est à plus de six mille kilomètres d’ici, dit Swann. Comment voulez-vous que nous y emmenions les nôtres avant l’aube ?

Stark hocha à nouveau la tête.

— Elle est plutôt à sept mille kilomètres, en fait. Vous avez raison, c’est loin, mais nous avons quatre heures d’avance sur eux. À la plate-forme pétrolière, il n’est pas tout à fait dix-neuf heures trente. Nous allons profiter du décalage horaire.

Il s’interrompit.

— De plus, nous avons la technologie qu’il faut pour vous y emmener plus vite que vous ne pourriez l’imaginer.

* * *

— Qu’est-ce qu’il ne nous dit pas ? demanda Luke.

Il était assis au très grand bureau de Don, en face de l’homme lui-même.

Don haussa les épaules.

— Tu sais qu’ils cachent toujours quelque chose. Peut-être la plate-forme pétrolière a-t-elle quelque chose de secret défense. Ou alors, ils connaissent mieux les coupables qu’ils ne le disent. Ça pourrait être n’importe quoi.

— Pourquoi nous ? dit Luke.

— Tu as entendu ce qu’il a dit, dit Don. Ils ont besoin d’une participation et d’une supervision civiles. Cette exigence vient tout droit du Président. Cet homme est un libéral depuis longtemps. Il pense que l’armée est un grand croquemitaine effrayant. Il est loin de savoir que les agences civiles sont toutes bourrées d’ex-soldats.

— Mais regardez nos effectifs, dit Luke. Je ne veux pas vous offenser, Don, mais la NSA est une agence civile, et le FBI aussi, et elles ont toutes deux une puissance de frappe bien supérieure à la nôtre.

— Luke, nous faisons partie du FBI.

Luke hocha la tête.

— Oui, mais le Bureau lui-même a des bureaux proches du terrain. Au lieu de ça, ils veulent nous faire traverser le continent en avion.

Don regarda fixement Luke pendant un long moment. Pour la première fois, Luke comprit vraiment l’étendue de l’ambition de Don. Le Président voulait l’EIS pour cette mission, mais Don voulait tout autant que l’EIS y participe, sinon encore plus. Ces missions étaient des victoires pour Don. Don Morris avait constitué une équipe d’experts de niveau mondial et il voulait que le monde le sache.

— Comme tu le sais, dit Don, les bureaux extérieurs regorgent d’agents sur le terrain, surtout des enquêteurs et des agents de police. Nous, on effectue des opérations spéciales. C’est pour cela que nous sommes faits et c’est ce que nous faisons. Nous sommes rapides et légers, nous frappons fort et nous avons acquis une réputation pas seulement de réussite en circonstances difficiles mais aussi de discrétion totale.

Des deux côtés du grand bureau, Luke et Don se contemplèrent mutuellement.

Don secoua la tête.

— Est-ce que tu as peur, mon gars ? Je comprendrais. Tu n’as rien à prouver à qui que ce soit, surtout pas à moi. Cependant, à l’heure actuelle, ton équipe est en train de se préparer.

Luke haussa les épaules.

— Mes affaires sont déjà prêtes.

Le grand sourire de Don apparut soudain sur son visage.

— Bien. Je suis sûr que tu te débrouilleras bien et que tu seras revenu pour le petit-déjeuner.

* * *

— Allons-y, l’ami, dit Ed Newsam. Cette mission ne va pas se faire toute seule.

Ed était à la porte de Luke. Il s’y tenait, un sac lourd à l’épaule. Il n’avait pas l’air enthousiaste. Il n’avait pas l’air passionné. Si Luke avait pu décrire l’air qu’avait Ed en un seul mot, il aurait dit résigné.

Luke était assis à son bureau et il fixait le téléphone du regard.

— L’hélicoptère est sur l’héliport.

Luke hocha la tête.

— Compris. J’arrive tout de suite.

Ils étaient sur le point de partir. Entre temps, Luke souffrait d’une maladie qu’on appelait le syndrome du téléphone d’une tonne. Il était physiquement incapable de prendre le receveur et de passer un appel.

— Bordel, chuchota-t-il.

Il avait vérifié et revérifié ses sacs. Il avait son équipement standard pour un voyage d’une nuit. Il avait son Glock neuf millimètres dans son étui d’épaule en cuir. Il avait prévu quelques chargeurs de plus pour le Glock.

Un sac à vêtements avec deux jours de rechange était posé sur le bureau. Un petit sac d’évacuation rempli de matériel de toilette taille voyage, d’un stock de barres énergétiques et d’une demi-douzaine de cachets de Dexedrine se trouvait à côté du sac à vêtements.

Les cachets de Dexedrine étaient des amphétamines, de la drogue. Elles étaient quasiment mentionnées dans le manuel de l’agent spécial. Ils permettaient de rester éveillé et alerte pendant des heures successives. Parfois, Ed les appelait les « remontants rapides ».

C’étaient des fournitures génériques, mais il n’y avait aucune raison d’essayer d’être plus spécifique. Ils allaient en Arctique, l’opération allait nécessiter l’utilisation d’équipements spécialisés et ces équipements seraient fournis quand ils atterriraient. Trudy avait déjà envoyé les mensurations de tout le monde.

Donc, maintenant, Luke regardait fixement le téléphone.

Il avait quitté la maison en laissant tout juste un mot d’explication à Becca. Bien sûr, elle avait été endormie, mais ça ne changeait rien.

Quant au message qu’il avait posé sur la table de la salle à manger, il n’expliquait rien non plus.

On m’a appelé pour une réunion tardive. Je risque de devoir y passer la nuit. Je t’aime. Luke

Y passer la nuit. C’était pas mal, ça. On aurait dit qu’il était un étudiant qui bossait dur avant l’examen final. Il avait pris l’habitude de mentir sur son travail à Becca et il avait du mal à se défaire de cette habitude.

S’il disait la vérité, est-ce que ça serait mieux ? Il pouvait l’appeler dès maintenant, la réveiller, réveiller le bébé et le faire pleurer, tout ça pour lui dire quoi ?

— Salut, chérie, je monte au Cercle Arctique pour éliminer des terroristes qui ont attaqué une plate-forme pétrolière. Le sol est jonché de cadavres. Oui, on dirait que je vais me retrouver dans un autre bain de sang. En fait, je pourrais ne plus jamais te revoir. OK, dors bien. Embrasse Gunner pour moi.

Non. Il valait mieux se contenter de risquer son va-tout, effectuer l’opération et se souvenir que, grâce à l’aide des Marines et de ses collègues de l’EIS, il serait idéalement accompagné pour faire le boulot. Il appellerait Becca demain matin, quand tout serait fini. Si tout se passait bien et si tout le monde était en un seul morceau, il lui dirait qu’ils avaient dû partir à Chicago pour interroger un témoin. Il continuerait à lui faire croire que son travail pour l’EIS était surtout une sorte de travail d’enquête contrarié par quelques rares explosions de violence.

399 ₽
Возрастное ограничение:
0+
Дата выхода на Литрес:
15 апреля 2020
Объем:
411 стр. 2 иллюстрации
ISBN:
9781094304977
Правообладатель:
Lukeman Literary Management Ltd
Формат скачивания:
epub, fb2, fb3, ios.epub, mobi, pdf, txt, zip

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