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Читать книгу: «Œuvres Complètes de Frédéric Bastiat, tome 2», страница 30

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66. – LE SUCRE ANTÉDILUVIEN

13 Février 1818.

On croit que le sucre est d'invention moderne; c'est une erreur. L'art de le fabriquer a pu se perdre au déluge; mais il était connu avant ce cataclysme, ainsi que le prouve un curieux document historique, trouvé dans les grottes de Karnak, et dont on doit la traduction au savant polyglotte, l'illustre cardinal Mezzofante. Nous reproduisons cet intéressant écrit, qui confirme d'ailleurs cette sentence de Salomon: Il n'y a rien de nouveau sous le soleil.

«En ce temps-là, entre le 42e et le 52e parallèle, il y avait une grande, riche, puissante, spirituelle et brave nation de plus de 36 millions d'habitants, qui tous aimaient le sucre. Le nom de ce peuple est perdu: nous l'appellerons Welche.

Comme leur climat n'admettait pas la culture du saccharum officinarum, les Welches furent d'abord fort embarrassés.

Cependant ils s'avisèrent d'un expédient fort étrange et qui n'avait qu'un tort, celui d'être essentiellement théorique, c'est-à-dire raisonnable.

Ne pouvant créer le sucre en nature, ils imaginèrent d'en créer la valeur.

C'est-à-dire qu'ils faisaient du vin, de la soie, du drap, de la toile et autres marchandises, qu'ils envoyaient dans l'autre hémisphère pour recevoir du sucre en échange.

Un nombre immense de négociants, armateurs, navires et marins étaient occupés à accomplir cette transaction.

D'abord, les Welches crurent bonnement avoir trouvé le moyen le plus simple, dans leur situation, de se sucrer. Comme ils pouvaient choisir, sur plus de la moitié du globe, le point où l'on donnait le plus de sucre contre le moins de vin ou de toile, ils se disaient: Vraiment, si nous faisions le sucre nous-mêmes, à travail égal, nous n'en obtiendrions pas la dixième partie!

C'était trop simple, en effet, pour des Welches, et cela ne pouvait durer.

Un grand homme d'État (amiral sans emploi) jeta un jour parmi eux cette terrible pensée: «Si jamais nous avons une guerre maritime, comment ferons-nous pour aller chercher du sucre?»

À cette réflexion judicieuse tous les esprits furent troublés, et voici de quoi l'on s'avisa.

On se mit en devoir d'accaparer, précisément dans cet autre hémisphère avec lequel on craignait de voir les communications interrompues, un imperceptible lopin de terre, disant: «Que cet atome soit à nous, et notre provision de sucre est assurée.»

Donc, en prévision d'une guerre possible, on fit une guerre réelle qui dura cent ans. Enfin, elle se termina par un traité qui mit les Welches en possession du lopin de terre convoité, lequel prit nom: Saccharique.

Ils s'imposèrent de nouvelles taxes pour payer les frais de la guerre; puis de nouvelles taxes encore pour organiser une puissante marine afin de conserver le lopin.

Cela fait, il fut question de tirer parti de la précieuse conquête.

Le petit recoin des antipodes était rebelle à la culture. Il avait besoin de protection. Il fut décidé que le commerce de la moitié du globe serait désormais interdit aux Welches, et que pas un d'entre eux ne pourrait sucer une boule de sucre qui ne vînt du lopin en question.

Ayant ainsi tout arrangé, taxes et restrictions, on se frotta les mains, disant: Ceci n'est pas de la théorie.

Cependant quelques Welches, traversant l'Océan, allèrent à Saccharique pour y cultiver la canne. Mais il se trouva qu'ils ne pouvaient supporter le travail sous ce climat énervant. On alla alors dans une autre partie du monde, puis, y ayant enlevé des hommes tout noirs, on les transporta sur l'îlot, et on les contraignit, à grands coups de bâton, à le cultiver.

Malgré cet expédient énergique, le petit îlot ne pouvait fournir le demi-quart du sucre qui était nécessaire à la nation Welche. Le prix s'en éleva, ainsi qu'il arrive toujours quand dix personnes recherchent une chose dont il n'y a que pour une. Les plus riches d'entre les Welches purent seuls se sucrer.

La cherté du sucre eut un autre effet. Elle excita les planteurs de Saccharique à aller enlever un plus grand nombre d'hommes noirs, afin de les assujettir, toujours à grands coups de bâton, à cultiver la canne jusque sur les sables et les rochers les plus arides. On vit alors ce qui ne s'était jamais vu, les habitants d'un pays ne rien faire directement pour pourvoir à leur subsistance et à leur vêtement, et ne travailler que pour l'exportation.

Et les Welches disaient: C'est merveilleux de voir comme le travail se développe sur notre îlot des antipodes.

Pourtant, dans la suite des temps, les plus pauvres d'entre eux se prirent à murmurer en ces termes:

«Qu'avons-nous fait? Voilà que le sucre n'est plus à notre portée. En outre, nous ne faisons plus le vin, la soie et la toile qui se répandaient dans tout un hémisphère. Notre commerce est réduit à ce qu'un petit rocher peut donner et recevoir. Notre marine marchande est aux abois, et les taxes nous accablent.»

Mais on leur répondait avec raison: N'est-ce pas une gloire pour vous d'avoir une possession aux antipodes? Quant au vin, buvez-le. Quant à la toile et au drap, on vous en fera faire en vous accordant des priviléges. Et pour ce qui est des taxes, il n'y a rien de perdu, puisque l'argent qui sort de vos poches entre dans les nôtres.

Quelquefois ces mêmes rêveurs demandaient: À quoi bon cette grande marine militaire? On leur répondait: À conserver la colonie. – Et s'ils insistaient, disant: À quoi bon la colonie? on leur répliquait sans hésiter: À conserver la marine militaire.

Ainsi les pauvres utopistes étaient battus sur tous les points.

Cette situation, déjà fort compliquée, s'embrouilla encore par un événement imprévu.

Les hommes d'État du pays des Welches, se fondant sur ce que l'avantage d'avoir une colonie entraînait de grandes dépenses, avaient jugé qu'en bonne justice, elles devaient retomber, du moins en partie, sur les mangeurs de sucre. En conséquence, ils l'avaient frappé d'un lourd impôt.

En sorte que le sucre, déjà fort cher, renchérit encore de tout le montant de la taxe.

Or, quoique le pays des Welches ne fût pas propre à la culture de la canne, comme il n'y a rien qu'on ne puisse faire moyennant une suffisante dose de travail et de capital, les chimistes, alléchés par les hauts prix, se mirent à chercher du sucre partout, dans la terre, dans l'eau, dans l'air, dans le lait, dans le raisin, dans la carotte, dans le maïs, dans la citrouille; et ils firent tant qu'ils finirent par en trouver un peu dans un modeste légume, dans une plante jugée jusque-là si insignifiante, qu'on lui avait donné ce nom doublement humiliant: Beta vulgaris.

On fit donc du sucre chez les Welches; et cette industrie, contrariée par la nature, mais secondée par l'intelligence de travailleurs libres et surtout par l'élévation factice des prix, fit de rapides progrès.

Bon Dieu! qui pourrait dire la confusion que cette découverte jeta dans la situation économique des Welches. Bientôt, elle compromit tout à la fois et la production si dispendieuse du sucre dans le petit îlot des antipodes, et ce qui restait de marine marchande occupée à faire le commerce de cet îlot, et la marine militaire elle-même, qui ne peut se recruter que dans la marine marchande.

En présence de cette perturbation inattendue, tous les Welches se mirent à chercher une issue raisonnable.

Les uns disaient: Revenons peu à peu à l'état de choses qui s'était établi naturellement, avant que d'absurdes systèmes ne nous eussent jetés dans ce désordre. Comme autrefois, faisons du sucre sous forme de vin, de soie, et de toile; ou plutôt laissons ceux qui veulent du sucre en créer la valeur sous la forme qui leur convient. Alors nous aurons du commerce avec un hémisphère tout entier; alors notre marine marchande se relèvera et notre marine militaire aussi, si besoin est. Le travail libre, essentiellement progressif, surmontera le travail esclave, essentiellement stationnaire. L'esclavage mourra de sa belle mort, sans qu'il soit nécessaire que les peuples fassent des uns aux autres une police pleine de dangers. Le travail et les capitaux prendront partout la direction la plus avantageuse. Sans doute, pendant la transition, il y aura quelques intérêts froissés. Nous leur viendrons en aide le plus possible. Mais quand on a fait depuis longtemps fausse route, il est puéril de refuser d'entrer dans la bonne voie parce qu'il faut se donner quelque peine.

Ceux qui parlaient ainsi furent traités de novateurs, d'idéologues, de métaphysiciens, de visionnaires, de traîtres, de perturbateurs du repos public.

Les hommes d'État disaient: «Il est indigne de nous de chercher à sortir d'une situation artificielle par un retour vers une situation naturelle. On n'est pas grand homme pour si peu. Le comble de l'art est de tout arranger sans rien déranger. Ne touchons pas à l'esclavage, ce serait dangereux; ni au sucre de betterave, ce serait injuste; n'admettons pas le commerce libre avec tout l'autre hémisphère, ce serait la mort de notre colonie; ne renonçons pas à la colonie, ce serait la mort de notre marine; et ne restons pas dans le statu quo, ce serait la mort de tous les intérêts.»

Ceux-ci acquirent un grand renom d'hommes modérés et pratiques. On disait d'eux: Voilà d'habiles administrateurs, qui savent tenir compte de toutes les difficultés.

Tant il y a que, pendant qu'on cherchait un changement qui ne changeât rien, les choses furent toujours en empirant, jusqu'à ce que survint la solution suprême, le déluge, qui a tranché, en les engloutissant, cette question et bien d'autres.»

67. – MONITA SECRETA

20 Février 1848.

Un grand nombre d'électeurs protectionnistes catalans ont rédigé, pour leur député, une sorte de Cahier dont une copie nous a été communiquée. En voici quelques extraits assez curieux.

N'oubliez jamais que votre mission est de maintenir et étendre nos priviléges. Vous êtes Catalan d'abord et Espagnol ensuite.

Le ministre vous promettra faveur pour faveur. Il vous dira: Votez les lois qui me conviennent; j'étendrai ensuite vos monopoles. Ne vous laissez pas prendre à ce piége, et répondez: Étendez d'abord nos monopoles, et je voterai ensuite vos lois.

Ne vous asseyez ni à gauche, ni à droite, ni au centre. Quand on est inféodé au ministère, on n'obtient pas grand'-chose; et quand on lui fait de l'opposition systématique, on n'obtient rien. Prenez votre siége au centre gauche, ou au centre droit. Les positions intermédiaires sont les meilleures. L'expérience le prouve. Là, on se rend redoutable par les boules noires, et l'on se fait bien venir par les boules blanches.

Lisez à fond dans l'âme du ministre, et aussi dans celle du chef de parti qui aspire à le remplacer. Si l'un est restrictionniste par nécessité et l'autre par instinct, poussez à un changement de cabinet. Le nouvel occupant vous donnera deux garanties au lieu d'une.

Il n'est pas probable que le ministre vous demande jamais des sacrifices par amour de la justice, de la liberté, de l'égalité; mais il pourrait y être conduit par les nécessités du Trésor. Il se peut qu'il vous dise un jour: «Je n'y puis plus tenir. L'équilibre de mon budget est rompu. Il faut que je laisse entrer les produits français pour avoir une occasion de perception.»

Tenez-vous prêt pour cette éventualité, qui est la plus menaçante et même la seule menaçante en ce moment. Il faut avoir deux cordes à votre arc. Entendez-vous avec vos corestrictionnistes du centre, et menacez de faire passer un gros bataillon à gauche. Le ministre effrayé aura recours à un emprunt, et nous y gagnerons un an, peut-être deux; le peuple payera les intérêts.

Si pourtant le ministre insiste, ayez à lui proposer un nouvel impôt; par exemple, une taxe sur le vin. Dites que le vin est la matière imposable par excellence. Cela est vrai, puisque le vigneron est par excellence le contribuable débonnaire.

Surtout ne vous avisez pas, par un zèle mal entendu, de parer le coup en faisant allusion à la moindre réduction de dépenses. Vous vous aliéneriez tous les ministres présents et futurs, et de plus, tous les journalistes, ce qui est fort grave.

Vous pouvez bien parler d'économies en général, cela rend populaire. Tenez-vous-en au mot. Cela suffit aux électeurs.

Nous venons de parler des journalistes. Vous savez que la presse est le quatrième pouvoir de l'État, nous pourrions dire le premier. Vous ne sauriez employer avec elle une diplomatie trop profonde.

Si, par le plus grand des hasards, il se rencontre un journal disposé à vendre les questions, achetez la nôtre. C'est un moyen fort expéditif. Mais il serait encore mieux d'acheter le silence; c'est moins coûteux, et, à coup sûr, plus prudent. Quand on a contre soi la raison et la justice, le plus sûr est d'étouffer la discussion.

Quant aux théories que vous aurez à soutenir, voici la grande règle:

S'il y a deux manières de produire une chose, que l'une de ces manières soit dispendieuse et l'autre économique, frappez d'une taxe la manière économique au profit de la manière dispendieuse. Par exemple, si avec soixante journées de travail consacré à produire de la laine, les Espagnols peuvent faire venir de France dix varas de drap, et qu'il leur faille cent journées de travail pour obtenir ces dix varas de drap en les fabriquant eux-mêmes, favorisez le second mode aux dépens du premier. Vous ne pouvez vous figurer tous les avantages qu'il en résultera.

D'abord, tous les hommes qui emploient la manière dispendieuse vous seront reconnaissants et dévoués. Vous aurez en eux un fort appui.

Ensuite, le mode économique disparaissant peu à peu du pays et le mode dispendieux s'étendant sans cesse, vous verrez grossir le nombre de vos partisans et s'affaiblir celui de vos adversaires.

Enfin, comme un mode plus dispendieux implique plus de travail, vous aurez pour vous tous les ouvriers et tous les philanthropes. Il vous sera aisé, en effet, de montrer combien le travail serait affecté, si on laissait se relever le mode économique.

Tenez-vous-en à cette première apparence et ne souffrez pas qu'on aille au fond des choses, car qu'arriverait-il?

Il arriverait que certains esprits, trop enclins à l'investigation, découvriraient bientôt la supercherie. Ils s'apercevraient que si la production des dix varas de drap occupe cent journées, il y a soixante journées de moins consacrées à la production de la laine, contre laquelle on recevait autrefois dix varas de drap français.

Ne disputez pas sur cette première compensation; c'est trop clair, vous seriez battu; mais montrez toujours les autres quarante journées mises en activité par le mode dispendieux.

Alors on vous répondra: «Si nous nous en étions tenus au mode économique, le capital qui a été détourné vers la production directe du drap aurait été disponible dans le pays; il y aurait produit des choses utiles et aurait fait travailler ces quarante ouvriers que vous prétendez avoir tirés de l'oisiveté. Et quant aux produits de leur travail, ils auraient été achetés précisément par les consommateurs de drap, puisque, obtenant à meilleur marché le drap français, une somme de rémunération suffisante pour payer quarante ouvriers serait restée disponible aussi entre leurs mains.»

Ne vous engagez pas dans ces subtilités. Traitez de rêveurs, idéologues, utopistes et économistes ceux qui raisonnent de la sorte.

Ne perdez jamais ceci de vue. Dans ce moment, le public ne pousse pas l'investigation aussi loin. Le plus sûr moyen de lui faire ouvrir les yeux, ce serait de discuter. Vous avez pour vous l'apparence, tenez-vous-y et riez du reste.

Il se peut qu'un beau jour les ouvriers, ouvrant les yeux, disent:

«Puisque vous forcez la cherté des produits par l'opération de la loi, vous devriez bien aussi, pour être justes, forcer la cherté des salaires par l'opération de la loi.»

Laissez tomber l'argument aussi longtemps que possible. Quand vous ne pourrez plus vous taire, répondez: La cherté des produits nous encourage a en faire davantage; pour cela, il nous faut plus d'ouvriers. Cet accroissement de demande de main-d'œuvre hausse vos salaires, et c'est ainsi que nos priviléges s'étendent à vous par ricochet.

L'ouvrier vous répondra peut-être: «Cela serait vrai si l'excédant de production excité par la cherté se faisait au moyen de capitaux tombés de la lune. Mais si vous ne pouvez que les soutirer à d'autres industries, n'y ayant pas augmentation de capital, il ne peut y avoir augmentation de salaires. Nous en sommes pour payer plus cher les choses qui nous sont nécessaires, et votre ricochet est une déception.»

Donnez-vous alors beaucoup de mal pour expliquer et embrouiller le mécanisme du ricochet.

L'ouvrier pourra insister et vous dire:

«Puisque vous avez tant de confiance dans les ricochets, changeons de rôle. Ne protégez plus les produits, mais protégez les salaires. Fixez-les législativement à un taux élevé. Tous les prolétaires deviendront riches; ils achèteront beaucoup de vos produits, et vous vous enrichirez par ricochet106

Nous faisons ainsi parler un ouvrier, pour vous montrer combien il est dangereux d'approfondir les questions. C'est ce que vous devez éviter avec soin. Heureusement, les ouvriers, travaillant matin et soir, n'ont guère le temps de réfléchir. Profitez-en; parlez à leurs passions; déclamez contre l'étranger, contre la concurrence, contre la liberté, contre le capital, afin de détourner leur attention du privilége.

Attaquez vertement, en toute occasion, les professeurs d'économie politique. S'il est un point sur lequel ils ne s'accordent pas, concluez qu'il faut repousser les choses sur lesquelles ils s'accordent.

Voici le syllogisme dont vous pourrez faire usage:

«Les économistes sont d'accord que les hommes doivent être égaux devant la loi;

«Mais ils ne sont pas d'accord sur la théorie de la rente;

«Donc ils ne sont pas d'accord sur tous les points;

«Donc il n'est pas certain qu'ils aient raison quand ils disent que les hommes doivent être égaux devant la loi;

«Donc il faut que les lois créent des priviléges pour nous aux dépens de nos concitoyens.»

Ce raisonnement fera un très-bon effet.

Il est un autre mode d'argumentation que vous pourrez employer avec beaucoup de succès.

Observez ce qui se passe sur la surface du globe, et s'il y survient un accident fâcheux quelconque, dites: Voilà ce que fait la liberté.

Si donc Madrid est incendié, et si, pour le reconstruire à moins de frais, on laisse entrer du bois et du fer étrangers, attribuez l'incendie, ou du moins tous les effets de l'incendie, à cette liberté.

Un peuple a labouré, fumé, hersé, semé et sarclé tout son territoire. Au moment de récolter, sa moisson est emportée par un fléau; ce peuple est placé dans l'alternative ou de mourir de faim, ou de faire venir des subsistances du dehors. S'il prend ce dernier parti, et il le prendra certainement, il y aura un grand dérangement dans ses affaires ordinaires; cela est infaillible: il éprouvera une crise industrielle et financière. Dissimulez avec soin que cela vaut mieux, après tout, que de mourir d'inanition, et dites: «Si ce peuple n'avait pas eu la liberté de faire venir des subsistances du dehors, il n'aurait pas subi une crise industrielle et financière.» (V. les nos 21 et 30.)

Nous pouvons vous assurer, par expérience, que ce raisonnement vous fera grand bonheur.

Quelquefois on invoquera les principes. Moquez-vous des principes, ridiculisez les principes, bafouez les principes. Cela fait très-bien auprès d'une nation sceptique.

Vous passerez pour un homme pratique, et vous inspirerez une grande confiance.

D'ailleurs vous induirez ainsi la législature à mettre, dans chaque cas particulier, toutes les vérités en question, ce qui nous fera gagner du temps. Songez où en serait l'astronomie, si ce théorème: Les trois angles d'un triangle sont égaux à deux angles droits, n'était pas admis, après démonstration, une fois pour toutes, et s'il fallait le prouver en toute rencontre? On n'en finirait pas.

De même, si vos adversaires prouvent que toute restriction entraîne deux pertes pour un profit, exigez qu'ils recommencent la démonstration dans chaque cas particulier, et dites hardiment qu'en économie politique il n'y a pas de vérité absolue107.

Profitez de l'immense avantage d'avoir affaire à une nation qui pense que rien n'est vrai ni faux.

Conservez toujours votre position actuelle à l'égard de nos adversaires.

Que demandons-nous? des priviléges.

Que demandent-ils? la liberté.

Ils ne veulent pas usurper nos droits, ils se contentent de défendre les leurs.

Heureusement, dans leur ardeur impatiente, ils sont assez mauvais tacticiens pour chercher des preuves. Laissez-les faire. Ils s'imposent ainsi le rôle qui nous revient. Faites semblant de croire qu'ils proposent un système nouveau, étrange, compliqué, hasardeux, et que l'onus probandi leur incombe. Dites que vous, au contraire, ne mettez en avant ni théorie ni système. Vous serez affranchi de rien prouver. Tous les hommes modérés seront pour vous.

106
  V. le pamphlet Spoliation et Loi, pages 1 à 15 du tome V.
(Note de l'éditeur.)

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107
  V. ci-dessus les nos 57 et 58, pages 377 et 384, et V. au tome IV, pages 79, 86 et 94, les chap. XIII, XIV et XVIII de la première série des Sophismes.
(Note de l'éditeur.)

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Возрастное ограничение:
12+
Дата выхода на Литрес:
30 июня 2017
Объем:
545 стр. 9 иллюстраций
Правообладатель:
Public Domain

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